Les gouvernements espagnol et portugais ont constitué un groupe d’accompagnement conjoint pour identifier les causes de la panne électrique majeure qui a frappé la péninsule ibérique le 28 avril. La ministre espagnole de la Transition écologique, Sara Aagesen, a averti qu’aucune explication ne pourra être fournie avant plusieurs jours, en raison de la complexité de l’événement, qualifié d’« inédit » par les autorités.
Selon Red Eléctrica de España (REE), le gestionnaire du réseau de transport, l’incident a provoqué l’effondrement de 15 gigawatts de charge électrique, soit 60% de la consommation espagnole, en seulement cinq secondes. Cette rupture brutale a déclenché une série de coupures qui ont affecté l’ensemble de la péninsule.
Des pistes techniques encore à confirmer
Dans un entretien publié le 4 mai dans El País, Sara Aagesen a déclaré que « toutes les hypothèses sont ouvertes », y compris celle d’une cyberattaque. Cette piste fait l’objet d’une enquête judiciaire en Espagne, bien que REE ait indiqué n’avoir relevé « aucune intrusion » dans ses systèmes de contrôle.
Interrogée sur une éventuelle implication des énergies renouvelables, la ministre a reconnu la possibilité d’un dysfonctionnement provenant d’installations photovoltaïques situées dans le sud-ouest de l’Espagne. Elle a toutefois insisté sur le caractère prématuré de cette hypothèse : « À ce jour, nous ne savons pas quelles installations ont cessé de fonctionner ». REE avait mentionné deux événements techniques distincts, espacés d’une seconde et demie, comme origine probable du déséquilibre.
Un réseau fragilisé par l’équilibre production-demande
Certains experts du secteur s’interrogent sur la stabilité du réseau dans un contexte où l’éolien et le solaire occupent une part croissante sans systèmes de compensation technologique pleinement intégrés. La ministre a écarté l’idée selon laquelle la forte présence du renouvelable serait responsable de l’incident, affirmant que le système avait fonctionné normalement lors de journées avec davantage de production solaire et une demande plus faible.
Elle a défendu le mix énergétique espagnol, indiquant qu’il contribue à l’indépendance énergétique du pays. Elle a aussi critiqué les tentatives de désigner les énergies renouvelables comme responsables de la panne, les qualifiant de « diagnostics faciles » et « irresponsables ».
L’Espagne appelle à renforcer les interconnexions avec la France
Au-delà des causes techniques, Sara Aagesen a souligné l’importance de renforcer la résilience du système ibérique par des interconnexions accrues avec la France. « Plus nous aurons d’interconnexions, plus le système ibérique sera robuste », a-t-elle déclaré. Deux projets de liaisons à travers les Pyrénées sont actuellement à l’arrêt en raison d’oppositions locales en France, notamment pour des motifs environnementaux.
La ministre a appelé à dépasser ce blocage bilatéral, rappelant que la question relève du marché énergétique européen dans son ensemble. « La France doit prendre conscience que les interconnexions doivent se faire, quoi qu’il arrive », a-t-elle insisté, tout en se disant « convaincue qu’on peut pallier l’impact environnemental ».
Les conclusions du groupe d’enquête hispano-portugais seront partagées avec les institutions européennes, notamment l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) et le Réseau européen des gestionnaires de transport d’électricité (ENTSO-E). Aucune date n’a été avancée pour la publication des résultats.