La réunion de l’OPEC+, initialement prévue pour le 1er décembre, a été reportée au 5 décembre, une décision reflétant les tensions croissantes au sein de l’alliance. En jeu : l’équilibre entre maintien des quotas et nécessité de répondre à des conditions de marché de plus en plus complexes.
Avec des prix du Brent oscillant entre 70 et 75 dollars le baril, bien en deçà des 80 dollars jugés idéaux, les 22 membres de l’alliance sont confrontés à des choix difficiles. Une prolongation des coupes actuelles ou des ajustements pourrait être nécessaire pour contenir les excédents et contrer une demande mondiale atone.
Un marché saturé et des divergences stratégiques
Depuis 2022, l’OPEC+ mise sur une stratégie de raréfaction de l’offre, produisant environ 41 millions de barils par jour, contre une capacité réelle de 47 millions, selon Francis Perrin, directeur de recherche à l’Institut français des relations internationales (IFRI). Cependant, cette politique peine à influencer durablement les prix, particulièrement en raison de l’augmentation des volumes produits en dehors du cartel.
Aux États-Unis, où le pétrole de schiste domine, la logique concurrentielle des entreprises privées favorise une production massive. En conséquence, la part du pétrole brut américain dans la production mondiale est passée de 11 % en 2016 à 16 % en 2024. Sur la même période, la part des pays de l’OPEC est tombée de 62 % à 56 %, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
Ce contexte alimente les divisions internes au sein de l’OPEC+. Certains membres, comme les Émirats arabes unis et le Kazakhstan, militent pour une augmentation de leur production afin de financer des projets économiques. À l’inverse, des pays comme l’Arabie saoudite et la Russie privilégient la prudence pour éviter une nouvelle chute des prix.
La Chine et le ralentissement de la demande
L’économie chinoise, traditionnellement un moteur essentiel de la demande pétrolière mondiale, traverse une phase de ralentissement marquée par une consommation atone et une crise immobilière majeure. Ce contexte contribue à la faiblesse des cours et limite les perspectives de reprise à court terme.
Les prévisions de croissance de la demande pétrolière reflètent cette incertitude. Alors que l’OPEC prévoit une hausse de 1,82 million de barils par jour en 2024, l’AIE reste plus prudente avec une estimation de seulement 920 000 barils par jour.
Défis pour l’OPEC+ et montée des alternatives
L’ascension des producteurs non-OPEC, notamment aux États-Unis, sape les efforts de l’alliance pour stabiliser le marché. La politique pro-fossile affichée par Donald Trump, président élu, renforce cette dynamique, avec une volonté claire d’augmenter la production intérieure.
Dans ces conditions, l’OPEC+ cherche à équilibrer sa stratégie entre maintenir des coupes pour soutenir les prix et éviter de perdre davantage de parts de marché. Cependant, comme le souligne Jorge Leon de Rystad Energy, cette approche n’est pas tenable à long terme. L’érosion progressive de la rente pétrolière met en péril la modernisation économique de plusieurs membres du cartel.
Pour contrer ces défis, l’OPEC+ a commencé à envoyer des signaux aux producteurs de pétrole de schiste américains, suggérant qu’elle pourrait rouvrir les vannes à tout moment. Cette menace vise à limiter les investissements dans de nouveaux projets, alors que les analystes anticipent des prix du WTI et du Brent autour de 60 dollars en 2025.