Le Nord Stream 2 en France jouit, tout autant qu’en Allemagne, d’une image favorable pour le développement énergétique européen. Et ce, notamment depuis les discussions entre les deux dirigeants français et allemand ce vendredi 5 février. Emmanuel Macron a finalement soutenu l’Allemagne dans sa démarche. Pourtant, quelques jours auparavant, la France demandait à l’Allemagne de revoir sa participation au projet de gazoduc russe. Une partie de l’Europe ainsi que les États-Unis n’en veulent pas, accusé de menacer la sécurité énergétique de l’Europe.
Le Nord Stream 2 en France soutenu contre l’avis américain
Le Nord Stream 2 en France n’a pas toujours eu la réputation que le président de la République Française Emmanuel Macron lui portait ce vendredi. Mais lors de ce sommet franco-allemand sur la sécurité et la défense, le président a soutenu la position de la chancelière.
Il estime ainsi que la Russie est un fournisseur fiable de pétrole et de gaz. De plus, si le projet profite largement à l’Allemagne, l’énergéticien français Engie est également l’un des sponsors du projet. Toutefois, si le président de la République soutient finalement la position allemande, il estime également qu’il faut continuer de tenir, envers la Russie, un dialogue ferme et exigeant.
Le besoin accru de gaz en Allemagne favorise le projet Nord Stream 2
Selon la chancelière Merkel, l’affaire Navalny n’a pas affecté la position allemande à propos de Nord Stream 2. Néanmoins, elle a affirmé que le projet économique avait également une portée politique, puisque le domaine est hautement stratégique. Il pose en effet la question de la souveraineté énergétique de l’Allemagne et de l’indépendance de l’Europe vis-à-vis de la Russie.
L’Allemagne étant en passe de sortir du nucléaire (2022) et du charbon (2038), le projet Nord Stream 2 devient d’une importance vitale en matière de sécurité énergétique. En effet, ces sorties renforcent la dépendance du pays au gaz. Dans ce contexte, le gaz devient alors une ressource stratégique dans le cadre de la transition énergétique.
Cette transition reste d’ailleurs une priorité pour l’Europe, comme cela a été re-affirmé lors de cette conférence franco-allemande.
L’opposition au projet et les sanctions américaines
La construction de Nord Stream 2, initialement prévue pour l’année 2020, a longtemps été interrompue. En effet, l’application de sanctions américaines a stoppé net le projet. Le président Trump avait ainsi imposé des sanctions au navire russe chargé des travaux.
En janvier, ces séries de sanctions ont été élargies. Au même moment, le navire Fortuna commençait à poser les pipelines dans les eaux danoises.
Ces sanctions visent ainsi toute entité qui fournirait au navire des installations portuaires, des améliorations d’équipement, des assurances ou d’autres services. La société norvégienne DNV GL ainsi que d’autres prestataires se sont donc retirés du projet tant que les sanctions américaines sont en place.
De plus, si le président Trump était opposé au projet, c’est également le cas de son successeur à la Maison-Blanche Joe Biden entré en fonction ce 20 janvier 2021.
La position ambivalente de l’Union Européenne
Le projet Nord Stream 2 est vu d’un mauvais œil tant par les Etats-Unis que par d’autres pays européens. En effet, des pays comme la Pologne estiment que ce projet rendrait les européens dépendant au gaz russe. Selon eux, Moscou pourrait alors exercer des pressions politiques en utilisant ce levier.
Les pays européens, mais également le Parlement Européen estiment que des approvisionnements énergétiques russes créent des vulnérabilités en matière de sécurité. La question de la cohérence de l’Allemagne vis-à-vis de l’OTAN est également posée. Alors que l’Allemagne est membre de l’OTAN, qui œuvre à limiter l’influence russe, elle conclut des accords juteux avec elle, et lui transmets des devises.
Quelle souveraineté énergétique pour l’Union Européenne ?
Au-delà de l’aspect sécuritaire, les acteurs opposés au projet s’interrogent sur la question de la souveraineté énergétique. En effet, chaque euro dépensé dans le projet Nord Stream 2 ne l’est pas dans d’autres projets intra-européens. En ce sens, le Premier ministre Slovaque, Igor Matovic, plaide pour une plus grande cohésion européenne dans un domaine aussi stratégique.
Les différentes prises de position quant à l’affaire Navalny semblent illustrer ce manque de cohérence de l’Union Européenne. En ce sens, alors que le président français et la chancelière allemande dénoncent ces évènements, tout deux sont dans le même temps favorable au projet de gazoduc. Pourtant, l’arrêt de ce projet pourrait être enfin l’occasion d’effectuer des pressions considérables sur la Russie.
Reprise des travaux en mer danoise le 7 février dernier
A l’inverse, la reprise des travaux en mer baltique déplaît à de nombreux pays dont les Etats-Unis. Le projet interroge en effet les capacités d’indépendance et de souveraineté énergétique de l’Europe. Malgré cela, le 7 février dernier, les travaux du gazoduc Nord Stream 2 ont finalement repris. Le navire Fortuna a ainsi commencé la pose de pipelines dans la zone économique exclusive du Danemark.
Pour le moment, quelques 75 kilomètres de tuyaux doivent encore être posés (sur les 1200 kilomètres du projet) sur le territoire allemand et danois. Néanmoins, l’ONG Deutsche Umwelthilfe a déposé un recours administratif contre le permis fédéral allemand de construction du gazoduc. Par conséquent, sa construction dans la juridiction allemande est pour l’instant gelée.