Maritime Fusion, entreprise basée à San Francisco et fondée par d’anciens ingénieurs de Tesla, a levé $4.5mn dans le cadre d’un tour de financement d’amorçage pour développer des réacteurs de fusion destinés aux navires commerciaux. Le financement est mené par Trucks Venture Capital, avec la participation de Paul Graham, Alumni Ventures, Aera VC et Y Combinator. L’objectif est d’accélérer la mise au point de câbles supraconducteurs haute température (HTS) pour propulser un réacteur tokamak à faible densité énergétique.
Contrairement à la majorité des acteurs du secteur qui ciblent une production à l’échelle du réseau, Maritime Fusion adopte une stratégie orientée vers des applications nécessitant dix fois moins de puissance. Le modèle vise une viabilité commerciale plus rapide en s’affranchissant de certains défis scientifiques et industriels inhérents à la fusion à grande échelle, notamment les problèmes de confinement et les contraintes sur les matériaux.
Des partenariats de recherche pour consolider la base technologique
Le développement du réacteur tokamak Yinsen s’appuie sur deux axes de recherche. Le premier repose sur un accord de recherche sponsorisée avec Columbia University, centré sur la mise au point de scénarios d’impulsion et de systèmes temporels. Le second se déroule au sein du DIII-D National Fusion Facility du Département de l’Énergie des États-Unis, avec des expérimentations alignées sur les exigences spécifiques du projet.
La technologie SHIELD (Superconducting High Integrity Energy Link & Distribution), au cœur de l’architecture de Yinsen, a franchi un cap technologique important avec la démonstration d’un courant de 5 000 ampères à 77 kelvins lors d’un essai en laboratoire. Le câble HTS modulaire développé par Maritime Fusion est capable de supporter jusqu’à 8 000 ampères en champ propre, avec un diamètre inférieur à celui d’une pièce de vingt-cinq cents.
Vers de nouveaux marchés pour le câble HTS
Si l’application principale du câble reste la fusion, l’entreprise prévoit également sa commercialisation dans la distribution d’électricité, en particulier pour les centres de données spécialisés dans l’intelligence artificielle. Ce segment exige des transmissions de puissance dense, pour lesquelles les pertes ohmiques des câbles en cuivre deviennent un facteur économique critique. Le système HTS permettrait une réduction importante de la consommation énergétique, estimée à environ 1.5 watt par mètre en refroidissement à 77 kelvins.
Selon l’entreprise, les économies potentielles générées par l’usage de conducteurs HTS dans les centres de données pourraient atteindre $10mn par an. Le principal écart technique entre les applications fusion et commerciales réside dans l’usage de rubans REBCO (Rare Earth Barium Copper Oxide) à ancrage avancé, nécessaire pour résister aux champs magnétiques extrêmes présents dans un tokamak.
Un premier marché ciblé avant l’échelle réseau
Maritime Fusion affirme que les contraintes d’exploitation maritime permettent une approche plus pragmatique de la fusion, en contournant les exigences de facteur de charge élevé et de disponibilité constante imposées par le réseau électrique. Ce positionnement ouvre la voie à une mise sur le marché anticipée, avant la résolution des principaux obstacles associés à la fusion à l’échelle du réseau.
L’entreprise, qui continue de recruter dans les domaines de l’ingénierie, de la fabrication et du développement commercial, poursuit ses travaux pour rapprocher la fusion de ses premières applications concrètes. Le transport maritime, avec ses besoins énergétiques constants et déconnectés des infrastructures terrestres, constitue un banc d’essai stratégique pour valider la technologie avant toute éventuelle extension.