L’Ukraine se prépare à l’hiver en ciblant un stock de 13,2 milliards de mètres cubes (Gm³) de gaz d’ici au 1er novembre. Toutefois, selon l’International Energy Agency (IEA), le pays pourrait devoir importer 0,6 Gm³ supplémentaires pour atteindre cet objectif crucial. Le contexte est marqué par des tensions géopolitiques et des contraintes économiques importantes. L’Ukraine a déjà stocké environ 11,7 Gm³ de gaz au 16 septembre, principalement issus de la production domestique, mais les réserves actuelles ne sont pas suffisantes pour faire face à des conditions hivernales plus sévères.
L’IEA précise que, sous des conditions météorologiques normales, l’Ukraine pourrait subvenir à ses besoins énergétiques grâce à la production locale et à ses stocks. Cependant, un hiver plus froid que prévu pourrait entraîner une hausse de la consommation de gaz, notamment pour le chauffage domestique, ce qui nécessiterait de nouvelles importations. Une telle situation pose un défi financier et logistique important pour l’Ukraine.
Soutien international et coûts d’importation
L’Ukraine ne peut pas se permettre de retarder ses importations de gaz, alors que le coût de ces achats pourrait s’élever à plus de 250 millions d’euros pour les 0,6 Gm³ manquants. Ces estimations se basent sur les prix spot du marché européen au début du mois de septembre. Le soutien des partenaires internationaux est donc essentiel pour éviter un déficit énergétique cet hiver. L’IEA appelle à la mobilisation de fonds via des prêts ou des subventions afin de garantir que l’Ukraine puisse atteindre ses objectifs de stockage.
Le rôle de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (EBRD) s’avère décisif. En novembre 2023, elle accorde un prêt de 200 millions d’euros à l’Ukraine pour soutenir la constitution de réserves stratégiques. En juillet 2024, un accord sur les garanties est signé, et Naftogaz commence à acheter du gaz avec ce prêt dès août 2024. Ce soutien international reste néanmoins fragile face aux incertitudes géopolitiques qui continuent d’affecter les importations et la sécurité énergétique du pays.
Fin du transit gazier russe : un nouveau défi pour l’Ukraine
L’un des enjeux majeurs pour l’Ukraine réside dans la fin du transit de gaz russe via son territoire, prévue pour janvier 2025. Actuellement, l’Ukraine profite du mécanisme de flux inversé virtuel, qui permet de retenir une partie du gaz russe transitant vers l’Europe. Une fois cet accord expiré, le pays devra se tourner vers des importations physiques directes depuis l’Union Européenne, ce qui augmentera les coûts en raison des tarifs de transmission. Cette modification structurelle dans les flux gaziers pourrait accroître la vulnérabilité énergétique de l’Ukraine à long terme.
L’IEA souligne également que les capacités d’importation depuis l’Union Européenne, estimées à environ 60 millions de mètres cubes par jour, ne sont pas totalement fiables sur le long terme. Certaines de ces capacités ne sont pas garanties en raison de la nature variable des contrats d’approvisionnement. L’Ukraine et ses partenaires européens devront donc travailler à renforcer ces capacités pour assurer des approvisionnements stables lors des prochains hivers.
Risques géopolitiques et infrastructures énergétiques
Les risques pour la sécurité énergétique de l’Ukraine sont accrus par les attaques répétées de la Russie contre ses infrastructures gazières. Les dommages causés par ces attaques pourraient limiter la capacité de l’Ukraine à importer et distribuer efficacement le gaz nécessaire cet hiver. L’IEA avertit que ces risques, couplés à la fin des flux inversés virtuels, rendent indispensable la coopération avec l’Union Européenne pour garantir des importations stables et sécurisées.
En parallèle, l’Ukraine poursuit sa stratégie de réduction de ses importations pour devenir autosuffisante en gaz. Cette ambition est toutefois mise à mal par les prix élevés du gaz sur le marché européen, ce qui pousse le pays à maintenir un équilibre entre production domestique et importations. Le mécanisme d’achat conjoint AggregateEU, mis en place par l’Union Européenne, pourrait s’avérer utile pour centraliser les achats de gaz ukrainiens, réduisant ainsi les coûts.
Une situation énergétique incertaine
Le système énergétique ukrainien demeure fragile, et les perspectives pour l’hiver à venir sont incertaines. Bien que l’Ukraine ait progressé dans la constitution de ses réserves de gaz, le pays reste dépendant des importations et de l’évolution des tensions géopolitiques avec la Russie. La coopération avec l’Union Européenne et le soutien financier international seront des éléments clés pour éviter une crise énergétique majeure cet hiver.