L’Ukraine appelle les bourses européennes de l’énergie à interdire les commerçants traitant avec la Russie. Les sanctions internationales contre le Kremlin commencent à se concentrer sur les flux de matières premières. Le 8 mars, le président américain Joe Biden interdit les importations de GNL et de pétrole russe aux États-Unis.
L’Ukraine veut interdire à la Russie l’accès aux bourses européennes de l’énergie
Le ministère ukrainien de l’Économie envoie une lettre datée du 4 mars à l’Association des bourses européennes de l’énergie. La Commission européenne et les États membres de la Communauté de l’énergie la reçoivent également. Dans celle-ci, l’Ukraine formule une demande principale. Elle exhorte :
« Toutes les bourses et centres de compensation à tout mettre en œuvre pour appliquer les plus strictes restrictions et sanctions visant à mettre fin à la guerre. »
Par cette demande, l’Ukraine espère contrecarrer les opérations militaires de la Russie sur son territoire en frappant son économie. En effet, l’Europe représente 60 % des exportations de pétrole russe. Des sanctions sur ce secteur, à court terme, s’avéreraient extrêmement pénalisantes pour la Russie.
En ce sens, le ministère ukrainien poursuit et attend des bourses de l’énergie plusieurs mesures. Il veut, par exemple, faire immédiatement cesser l’accès aux bourses européennes aux commerçants russes. Il demande également d’empêcher les négociants en énergie de coopérer avec la Russie sur des projets d’investissement.
Les demandes de l’Ukraine comportent d’importants contrecoups pour les fournitures européennes en énergie
Néanmoins, répondre favorablement à ces demandes ukrainiennes comporte son lot de conséquences pour les pays de l’Union européenne. Certains d’entre eux restent largement dépendants des importations russes pour leur énergie.
À titre d’exemple, l’Allemagne, première économie de l’UE, reçoit 55 % de son gaz et 42 % de son pétrole de la Russie. Prise continentalement, et en dépit de disparités nationales, l’Europe importe 40 % de gaz et 20 % de pétrole russe. En somme, un alignement sur les demandes de l’Ukraine constitue une rupture majeure de la politique énergétique de l’Union.
Aussi, certains autres pays fournisseurs de l’UE émettent leurs réserves sur de potentielles sanctions énergétiques contre la Russie. Le Qatar, par exemple, prévient ne pas être en capacité de combler le vide créé par la disparition de l’offre russe.
En somme, de telles sanctions doivent s’accompagner d’une nette hausse des prix de l’énergie sur le marché européen. Il est à noter que ce dernier enregistre déjà des records. Le 7 mars dernier, le TTF néerlandais atteignait ainsi 345 euros le mégawattheure (MWh).
Les États-Unis s’alignent sur les exigences ukrainiennes en matière de sanctions énergétiques
Le 8 mars, Shell et BP déclarent qu’elles arrêtent tous les achats au comptant de brut et de produits russes. Ces deux compagnies sont les deux plus grandes majors énergétiques européennes. Le reste des grandes entreprises européennes se joignent à l’effort afin d’isoler économiquement Moscou et de soutenir l’Ukraine.
Shell annonce également qu’elle entend fermer ses stations-service en Russie. Elle doit par ailleurs cesser d’y fournir ses carburants d’aviation.
Ces initiatives européennes suivent la récente annonce de Joe Biden d’interdire les importations de pétrole et de GNL russes. Aux États-Unis, les représailles prises contre Moscou vont maintenant au-delà des premières sanctions financières. En effet, le président Biden prohibe aussi d’éventuels investissements américains dans le secteur énergétique russe.
Les jours suivant l’invasion de l’Ukraine, les négociants et les raffineurs se préparaient déjà à de telles sanctions. En effet, ceux-ci réduisent volontairement les importations américaines de brut et de produits russes en prévoyance d’une telle politique.
Les États-Unis sont les premiers producteurs de pétrole au monde, et occupent la deuxième place en ce qui concerne le gaz naturel. En conséquence, ils restent relativement moins dépendants de la Russie pour leur approvisionnement que ne l’est l’Europe. Cette dernière, enfin, doit encore préciser son positionnement au sujet de cette guerre énergétique.