European Union (EU, Union européenne) met en place une interdiction progressive d’importation de Liquefied Natural Gas (LNG, gaz naturel liquéfié) d’origine russe, assortie de modalités de sortie pour les engagements en cours. Les flux vers le marché européen totalisent environ 11,9 millions de tonnes depuis le début de l’exercice, dont près de 11,7 millions attribués à Yamal LNG. La concentration des volumes sur un unique pôle de production accroît la sensibilité aux contraintes maritimes et au dimensionnement de la flotte spécialisée. Le retrait programmé du marché européen impose des solutions de réacheminement vers des points hors juridiction de l’Union, avec une dépendance accrue aux corridors saisonniers.
Logistique arctique et capacité de détournement
La Northern Sea Route (NSR, Route maritime du Nord) est généralement fermée de décembre à juin, ce qui impose un routage initial vers l’Ouest et un transbordement navire-à-navire vers des méthaniers conventionnels. Le différentiel de coût atteint couramment plus de 2 $/MMBtu pour desservir l’Asie hors saison NSR, contre un ordre de grandeur proche de 0,5 $/MMBtu pour une destination d’Europe du Nord. L’allongement des voyages réduit la productivité de la flotte et abaisse l’offre disponible sur une période donnée. La disponibilité des unités brise-glace de classe Arc7 et les fenêtres de maintenance déterminent la continuité des enlèvements depuis le site de liquéfaction.
Les restrictions européennes sur les opérations de transbordement ont déplacé des opérations vers des hubs extra-UE, ajoutant des jours-navire et des interfaces logistiques. Les coûts d’assurance et de conformité augmentent lorsque les régimes de sanctions intègrent les services connexes, renchérissant le coût total livré hors Union. La combinaison de routes plus longues et d’une flotte spécialisée limitée crée un plafond saisonnier sur les volumes réellement détournables vers l’Asie lorsque la NSR est close. Cette contrainte se traduit par une utilisation moindre des trains de liquéfaction en période froide et par des priorisations de cargaisons selon la disponibilité navire.
Contrats d’offtake et cadre juridique
Yamal LNG affiche une capacité nominale proche de 17,4 millions de tonnes par an avec un actionnariat intégrant PAO Novatek, TotalEnergies SE, China National Petroleum Corporation (CNPC) et Silk Road Fund. Les contrats d’enlèvement couvrent environ 4 millions de tonnes par an pour TotalEnergies SE, environ 3 millions de tonnes par an pour CNPC, environ 2,5 millions de tonnes par an pour Naturgy Energy Group, S.A., et environ 2,4 millions de tonnes par an pour PAO Novatek. Les clauses de force majeure et de « changement de loi » structurent la sortie, la suspension ou la redirection lorsque l’importation dans l’Union devient prohibée. Les acheteurs exposés à des engagements « take-or-pay » documentent les coûts extraordinaires de fret et les contraintes réglementaires pour encadrer une modification des obligations.
Les contreparties évaluent la viabilité financière d’un détournement intégral vers l’Asie en dehors de la fenêtre NSR, avec des distances plus longues et des rotations ralenties. Le positionnement de portefeuille combine contrats long terme indexés et opportunités spot pour lisser les coûts marginaux. Les directions juridiques consolident la traçabilité des événements déclencheurs afin d’aligner la conformité avec les calendriers de livraison. La communication de Patrick Pouyanné mentionne la nécessité de clarifier l’étendue des règles applicables avant d’ajuster l’allocation des cargaisons.
Offre mondiale, indices et sécurité d’approvisionnement
La capacité mondiale de liquéfaction a augmenté d’environ 80 millions de tonnes depuis 2025 pour dépasser 510 millions de tonnes, avec une trajectoire proche de 630 millions de tonnes à l’horizon 2030. Cette onde d’offre élargit la marge de substitution européenne face au retrait des cargaisons russes. Les terminaux de regazéification et les interconnexions renforcent l’absorption de flux non russes à mesure que de nouveaux trains entrent en service. Les importations de la Chine ont reculé d’environ 9,5 millions de tonnes sur neuf mois récents, desserrant la compétition immédiate sur le spot.
Les stocks gaziers européens se situent environ douze points de pourcentage sous les niveaux de l’an dernier à période comparable, ce qui accroît la sensibilité aux épisodes de froid et aux retards industriels. Les référentiels de prix, dont le Japan Korea Marker (JKM) et le Title Transfer Facility (TTF), restent contenus, avec des élargissements de spreads lorsque la NSR est fermée. Les taux d’affrètement reflètent la rareté saisonnière des navires adaptés et les besoins de positionnement hivernal. Les opérateurs réorganisent les transbordements vers des zones moins contraintes et priorisent les nominations pour préserver la flexibilité des portefeuilles.