Pomper plus, encore et toujours: après avoir accepté début juin d’ouvrir davantage les vannes sous la pression occidentale, les pays producteurs de pétrole de l’Opep+, qui se réunissent jeudi, devraient s’en tenir là.
“Nous ne prévoyons pas de surprise”, note Jeffrey Halley, chez Oanda, évoquant “une simple formalité”.
Rendez-vous devenu quasi mensuel depuis la pandémie de Covid-19 qui a bousculé les marchés, les treize membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), menés par Ryad, et leurs dix partenaires conduits par Moscou (Opep+) se retrouvent à 11H00 GMT par visioconférence à Vienne, siège de l’alliance.
Lors de leur dernière rencontre, ils avaient décidé d’augmenter leur production de juillet de 648.000 barils par jour, contre 432.000 barils auparavant. Ils devraient garder le même rythme, selon les analystes. Jusque là, et depuis le printemps 2021, le cartel s’était limité à des hausses modestes de ses quotas dans le but de retrouver graduellement ses niveaux pré-Covid.
“Théâtre politique”
Mais l’effort consenti n’a pas suffi tant les Etats-Unis et l’Union européenne (UE) sont en mal de pétrole du fait de l’instauration d’un embargo sur les livraisons russes.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, le Brent de la mer du Nord, référence du brut en Europe, a pris environ 17%, et son homologue américain, le WTI, plus de 18%.
Vers 09H30 GMT, le Brent évoluait à 116,60 dollars le baril quand celui de WTI s’échangeait à 110,00 dollars, des prix toujours très hauts. Face à cette envolée des prix, la France a de nouveau appelé lundi les pays producteurs à augmenter leur volume de “manière exceptionnelle”.
Le sujet sera également au menu de la visite du président américain Joe Biden mi-juillet en Arabie saoudite. Edward Moya, d’Oanda également, ne se fait cependant guère d’illusions: “c’est du théâtre politique, ce voyage n’aboutira pas à une hausse significative au-delà de ce qui a déjà été décidé”, estime-t-il.
Et même si l’alliance cédait aux appels, “elle n’en aurait pas la capacité”, poursuit l’expert, rappelant que de nombreux pays de l’Opep+ “sont soumis à des sanctions internationales ou souffrent de problèmes de production”. Résultat, les quotas fixés sont rarement atteints.
Membres sur la touche
Cible des Etats-Unis et de l’UE depuis l’invasion de l’Ukraine, la Russie a rejoint le rang des pays indésirables placés sous sanctions, aux côtés de l’Iran et du Venezuela. Quant à la Libye, autre membre de l’alliance, elle est en proie à une longue et grave crise politico-institutionnelle, mettant aux prises deux gouvernements rivaux. Ces divisions prennent en otage la production pétrolière, principale source de revenus.
D’autres nations comme le Nigeria, le Congo ou la Guinée équatoriale font figure de mauvais élèves, le manque d’investissement dans les infrastructures pétrolières au plus fort de la pandémie les empêchant d’atteindre leurs objectifs.
Même les premiers de la classe – les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite – auraient du mal à doper leur volume, selon des propos rapportés cette semaine par le président français Emmanuel Macron. “Si cela s’avère exact, cela signifie que la production de pétrole de l’Opep+ en juillet et août n’augmentera pas davantage malgré l’accord récent”, s’inquiète Stephen Brennock, de PVM Energy.
“Les problèmes d’approvisionnement resteront donc le principal sujet d’actualité pour le pétrole, et les prix devraient grimper encore”, avertit Ipek Ozkardeskaya, analyste chez Swissquote Bank. À moins que les craintes de récession ne prennent le dessus et fassent fléchir les prix.