L’Irak, troisième producteur pétrolier de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), intensifie actuellement sa stratégie de diversification des marchés, en particulier vers l’Afrique. Ce recentrage intervient alors que les États-Unis ont récemment supprimé les dérogations permettant à Bagdad d’importer gaz et électricité d’Iran, indispensables pour environ 30 % de son approvisionnement énergétique interne. Le gouvernement irakien se voit contraint d’accélérer son repositionnement stratégique, notamment via un accord rétabli avec la Turquie, permettant la reprise des exportations pétrolières interrompues depuis mars 2023. Initialement limitées à 185 000 barils par jour, ces exportations doivent progressivement augmenter.
Reprise des exportations via la Turquie
La relance de l’oléoduc vers le port turc de Ceyhan constitue un élément clé de la nouvelle stratégie énergétique irakienne. Interrompues en raison de différends juridiques entre Bagdad, Ankara, et les autorités régionales kurdes, ces exportations devraient renforcer la capacité de l’Irak à atteindre de nouveaux marchés internationaux, notamment africains. Le gouvernement irakien cherche ainsi à stabiliser ses revenus énergétiques, dépendants pour 90 % des exportations pétrolières, tout en réduisant sa vulnérabilité face aux marchés asiatiques qui représentent aujourd’hui plus de 70 % de ses débouchés.
Le secteur énergétique irakien poursuit parallèlement une série d’initiatives pour garantir son autosuffisance à moyen terme. L’arrêt des importations iraniennes oblige Bagdad à investir rapidement dans des alternatives fiables, notamment via l’acquisition de deux unités flottantes de regazéification (FSRU – Floating Storage Regasification Unit) destinées à importer du gaz naturel liquéfié (GNL) depuis le Qatar et Oman. Ces unités devraient être opérationnelles dès juin 2025, permettant ainsi de réduire significativement la dépendance énergétique vis-à-vis de Téhéran, conformément aux exigences américaines.
Développement des infrastructures pétrolières
Dans ce contexte, Bagdad mise également sur le développement de champs pétroliers stratégiques, notamment dans la région de Kirkouk, grâce à un récent accord conclu avec la compagnie britannique BP (British Petroleum). Ce partenariat prévoit l’accroissement de la production pétrolière et la réduction du torchage excessif de gaz naturel, une pratique courante dans le pays. Ce projet, en plus de consolider l’indépendance énergétique irakienne, devrait permettre de renforcer la compétitivité du pétrole irakien sur le marché africain, une zone économique en pleine expansion où la demande énergétique progresse rapidement.
Enfin, le gouvernement irakien explore activement la mise en place du projet « Iraq Development Road », en partenariat avec la Turquie, le Qatar et les Émirats arabes unis. Ce projet de corridor logistique, reliant l’Asie à l’Europe via l’Irak, pourrait renforcer sensiblement les échanges commerciaux entre Bagdad et plusieurs pays africains, tout en facilitant l’accès à de nouveaux marchés. Cette initiative pourrait également générer d’importants revenus additionnels en diversifiant les voies d’exportation et en créant un environnement économique attractif pour des investisseurs internationaux.
Ces actions simultanées positionnent clairement l’Irak dans une stratégie d’adaptation rapide aux contraintes géopolitiques et économiques actuelles, tout en renforçant son attractivité auprès des marchés émergents, particulièrement en Afrique. Les résultats économiques et commerciaux de cette réorientation stratégique seront observés de près par les acteurs internationaux du secteur énergétique.