Le secteur de l’énergie géothermique nord-américain a connu un niveau record d’investissements au premier trimestre 2025 avec un montant de 1,7 milliard de dollars, soit une hausse de 85 % par rapport au total annuel de 2024, indique un rapport de Wood Mackenzie publié le 30 juin. Cette accélération est liée à l’émergence de nouvelles techniques capables d’exploiter des ressources géothermiques auparavant inexploitées, grâce notamment aux systèmes géothermiques stimulés (Enhanced Geothermal Systems, EGS).
Accélération des projets commerciaux
Selon l’étude intitulée Geothermal Market Update, ces innovations comprennent les systèmes géothermiques stimulés (EGS), les systèmes géothermiques avancés (Advanced Geothermal Systems, AGS) et la technologie dite des roches super-chaudes (Super-hot rock). Ces techniques permettent l’accès à des ressources thermiques profondes, indépendamment des sites géothermiques traditionnels naturellement exploitables.
Le marché a ainsi annoncé 47 nouveaux forages au premier trimestre 2025, en progression de 80 % sur un an. Les États-Unis et la Turquie dominent ces développements avec près de la moitié des nouveaux projets. Le projet Cape Station développé par l’entreprise américaine Fervo Energy en Utah, d’une puissance de 500 mégawatts (MW), affiche une compétitivité commerciale à un coût de 79 dollars par mégawattheure, hors subvention.
Un potentiel de 500 gigawatts inexploité
Bien que l’énergie géothermique représente aujourd’hui moins de 1 % de la production énergétique mondiale, son potentiel pourrait atteindre jusqu’à 15 % d’ici 2050 selon Wood Mackenzie. Actuellement, les États-Unis détiennent une capacité installée de 4 gigawatts (GW), très en deçà du potentiel estimé à plus de 500 GW. Les régions les plus prometteuses sont principalement situées dans les États de l’Ouest américain, où les températures dépassent 150 degrés Celsius et où le flux thermique est supérieur à 80 milliwatts par mètre carré.
Le Canada affiche également un potentiel significatif de développement géothermique, particulièrement en Colombie-Britannique, Alberta, Saskatchewan, Yukon ainsi qu’en Nouvelle-Écosse. En 2024, le secteur canadien a attiré des partenariats majeurs comme celui entre Deep Earth Energy Production Corp. et la société SLB, visant à lancer en Saskatchewan un premier projet de nouvelle génération.
Soutien gouvernemental et nouvelles applications
Les autorités américaines renforcent leur soutien aux projets géothermiques. Le Département de l’Énergie des États-Unis (Department of Energy, DOE) a ainsi accordé un engagement conditionnel de financement de 1,36 milliard de dollars au projet ATLiS, qui prévoit d’extraire du lithium à partir de saumures géothermales. Par ailleurs, de nouvelles explorations ont été lancées sur plus de 100 000 acres au Chili, en Alaska et dans l’Utah.
Les initiatives politiques régionales se multiplient également aux États-Unis avec des mesures prises au Colorado, au Nevada, en Utah et au Dakota du Nord afin de faciliter l’autorisation et l’accélération des projets. Le Canada a pour sa part alloué en 2024 plus de 50 millions de dollars canadiens (CA$50mn) pour soutenir le secteur.
Technologiques clés pour l’avenir énergétique
Trois innovations majeures expliquent cette dynamique d’investissements. Les systèmes EGS utilisent la fracturation hydraulique afin d’exploiter la chaleur des roches sèches profondes. Les systèmes AGS permettent une exploitation via des circuits fermés sans extraction directe des fluides de formation. Enfin, la technologie des roches super-chaudes cible des températures supérieures à 374 degrés Celsius, à des profondeurs dépassant les cinq kilomètres.
Selon les projections de Wood Mackenzie, ces technologies pourraient représenter 46 % de la production totale d’énergie géothermique à l’horizon 2050 dans un scénario d’atteinte de la neutralité carbone. Ce développement technique répond aux défis historiques du secteur : coût élevé, contraintes géologiques et limites techniques.
Avec la maturation progressive des techniques et la baisse anticipée des coûts, l’énergie géothermique pourrait jouer un rôle central dans la stabilité du réseau électrique nord-américain, complétant les sources intermittentes déjà déployées.