Le dernier cycle d’enchères de l’Open Acreage Licensing Policy (OALP) en Inde a une nouvelle fois révélé le déséquilibre croissant entre l’intérêt des entreprises privées locales et le manque de participation des acteurs internationaux. Malgré des politiques de plus en plus favorables, aucun investisseur étranger n’a soumis d’offre pour les 28 blocs pétroliers et gaziers répartis sur huit bassins sédimentaires de l’Inde. Le gouvernement avait pourtant espéré attirer des groupes internationaux avec des conditions flexibles, incluant la possibilité de délimiter eux-mêmes leurs périmètres d’exploration.
Le contexte économique mondial, marqué par la volatilité des prix du pétrole et des incertitudes géopolitiques, freine l’enthousiasme des investisseurs étrangers pour les projets indiens. En outre, le manque de nouvelles découvertes significatives au cours des dernières années limite l’attractivité du secteur amont du pays. Les entreprises locales, en revanche, perçoivent ces conditions comme une opportunité de renforcer leur position sur le marché domestique, comme le démontre la participation active de Vedanta Limited, qui a proposé des offres pour l’ensemble des blocs mis en jeu.
Les entreprises locales prennent le relais
Les entreprises locales, qu’elles soient privées ou publiques, ont dominé cette neuvième phase d’enchères de l’OALP. Outre Vedanta Ltd., le principal producteur public, Oil and Natural Gas Corporation (ONGC), a déposé des offres indépendantes sur 15 blocs. Oil India Limited, une autre entreprise publique, a soumis six propositions, tandis que Sun Petrochemicals a participé pour sept blocs. La seule collaboration internationale enregistrée est celle du consortium formé par ONGC, Reliance Industries Limited, et BP plc, qui a candidaté pour un bloc en eaux peu profondes dans le bassin de Saurashtra.
L’enthousiasme des acteurs locaux s’explique par la volonté de diversifier les ressources de production nationale pour compenser le déclin naturel des gisements existants. Selon les analystes de S&P Global Commodity Insights, le taux de croissance annuel composé de la production amont indienne a baissé de 1,1 % au cours de la dernière décennie, en grande partie en raison de la maturité des gisements actuellement exploités par ONGC et Oil India. Ces sociétés locales cherchent donc à compenser la baisse de production par des investissements dans des blocs plus risqués, notamment dans les zones en eaux profondes des bassins de Krishna-Godavari, Mumbai, et Cauvery offshore.
Un secteur en quête de découvertes majeures
L’Inde propose principalement trois types de blocs dans ses cycles d’enchères : les blocs de catégorie-1, déjà en production, les blocs de catégorie-2, qui possèdent des ressources contingentes, et les blocs de catégorie-3, encore non explorés. Lors de ce dernier tour, seuls des blocs de catégorie-1 et 2 ont été offerts, mettant en évidence le manque de potentiel perçu pour de nouvelles découvertes. Les analystes estiment que l’exploration des bassins de catégorie-3 est freinée par l’absence d’un cadre politique et fiscal suffisamment attractif pour compenser les risques élevés.
Les grandes entreprises internationales préfèrent ainsi investir dans des marchés aux ressources confirmées ou dans des environnements fiscaux plus prévisibles. Le cas récent de l’accord de concession signé entre Urja Bharat, un consortium entre Indian Oil Corporation et Bharat Petro Resources Ltd, et l’Abu Dhabi National Oil Company (ADNOC) pour l’exploration du bloc onshore 1 à Abu Dhabi illustre cette tendance. Plutôt que d’engager des ressources importantes sur le marché domestique, les entreprises indiennes choisissent de diversifier leur portefeuille à l’étranger.
Réformes nécessaires pour capter l’intérêt étranger
Pour attirer davantage d’investisseurs, le Ministère du Pétrole indien a introduit plusieurs réformes, dont la flexibilisation des termes de l’OALP, l’ouverture de nouveaux bassins sédimentaires, et la réduction des taxes sur les hydrocarbures non conventionnels. Ces mesures visent à stimuler l’investissement dans des ressources moins accessibles, comme les pièges géologiques complexes et les formations non conventionnelles.
Cependant, ces incitations restent insuffisantes face à des défis structurels plus profonds, tels que la complexité bureaucratique, la lenteur des autorisations environnementales et les coûts élevés de développement des infrastructures. Les experts estiment que l’Inde devra mettre en place un cadre de régulation plus simple et des partenariats public-privé plus dynamiques pour encourager les investissements à long terme dans les blocs non conventionnels et les projets offshore.
Perspectives à court terme
À court terme, les perspectives de développement du secteur amont en Inde reposent principalement sur l’exploration des ressources encore non exploitées des bassins de catégorie-1 et sur l’exploitation de nouveaux gisements dans les bassins en eaux profondes. Toutefois, sans une découverte majeure, l’Inde continuera à dépendre fortement de ses acteurs locaux pour compenser la baisse de production des gisements matures.
Le manque de participation des grands groupes internationaux met également en lumière la nécessité pour le gouvernement de reconsidérer sa stratégie globale. Les efforts de diversification à l’étranger, comme les discussions récentes avec le Brésil sur des projets en eaux profondes, témoignent de la volonté de l’Inde de se positionner sur le marché international. Néanmoins, ces initiatives ne pourront à elles seules combler le déficit d’investissements dans le secteur amont domestique.