L’Inde a confirmé qu’elle n’achètera pas de gaz naturel liquéfié (GNL) produit par le projet Arctic LNG 2 de la société russe Novatek. Ce choix s’explique par le respect des sanctions internationales imposées contre les entités russes impliquées dans le conflit en Ukraine. Bien que l’Inde ait continué d’importer du pétrole russe à prix réduit, elle souhaite éviter toute implication avec des produits soumis à des sanctions strictes, notamment pour des raisons diplomatiques et financières.
L’Arctic LNG 2, d’une capacité de production annuelle de près de 20 millions de tonnes par an une fois pleinement opérationnel, est l’un des projets majeurs de la stratégie russe pour diversifier ses exportations vers l’Asie. Cependant, le retrait de l’Inde en tant que client potentiel complique encore plus la position de la Russie. Avec ce refus, Moscou perd un acheteur stratégique sur le quatrième marché mondial de GNL, ce qui pourrait forcer le pays à concentrer ses exportations vers d’autres partenaires, principalement la Chine et des acteurs plus marginaux.
Sanctions occidentales : un frein majeur pour l’Arctic LNG 2
Les sanctions imposées par les États-Unis et l’Union Européenne compliquent le développement du projet Arctic LNG 2. En novembre 2023, de nouvelles mesures américaines ont ciblé directement les entités et individus soutenant l’effort de guerre de la Russie, en ajoutant Arctic LNG 2 à leur liste noire. Le Département du Trésor américain a notamment précisé que ces sanctions visaient à limiter la capacité de la Russie à augmenter sa production et ses revenus énergétiques, affectant ainsi les perspectives de croissance à long terme de Novatek, l’opérateur du projet.
L’impact de ces restrictions se fait sentir sur toute la chaîne de valeur. Les partenaires industriels européens et asiatiques tels que TotalEnergies (France), CNPC et CNOOC (Chine) ainsi que le consortium japonais Japan Arctic LNG, ont tous dû revoir leurs engagements. Cela crée une incertitude importante quant aux livraisons futures de GNL et à la capacité de l’Arctic LNG 2 de respecter ses calendriers de production.
Conséquences sur le marché asiatique du GNL
L’exclusion de l’Inde change la donne pour le marché du GNL en Asie. Traditionnellement, l’Inde a été un acheteur dynamique de GNL, profitant de sa proximité géographique avec les projets russes et de son besoin croissant de gaz pour soutenir son développement économique. Avec ce refus, la demande asiatique devra être compensée par d’autres fournisseurs, principalement le Qatar, l’Australie et les États-Unis. Cela crée un nouvel équilibre de marché, avec des implications possibles sur les prix.
La Russie, quant à elle, se tourne vers la Chine pour combler ce manque. En 2023, Novatek a signé plusieurs accords avec des importateurs chinois pour des volumes totalisant 7,6 millions de tonnes de GNL par an, soit plus de la moitié de sa production annuelle prévue de l’Arctic LNG 2. Cependant, cette concentration des ventes vers un seul marché crée un risque de dépendance excessive, surtout si la Chine parvient à négocier des tarifs préférentiels, exploitant la position affaiblie de Moscou.
Implications pour la Russie : diversification ou isolement ?
Le retrait de l’Inde et les sanctions occidentales poussent la Russie à réévaluer sa stratégie énergétique. L’Arctic LNG 2 devait marquer une nouvelle ère de diversification des flux énergétiques russes, après le succès de Yamal LNG. Désormais, Moscou doit revoir ses ambitions et pourrait se retrouver à opérer à perte si elle ne parvient pas à trouver d’autres acheteurs sur des marchés à plus faible demande.
Les pressions sur la Russie pour diversifier ses clients sont accrues par le risque de surcapacité. Si le projet ne peut pas fonctionner à pleine capacité, Novatek pourrait être contraint de vendre sur les marchés spot à des prix réduits, accentuant encore la pression financière sur le groupe. L’option d’une restructuration du projet est également envisagée, bien qu’elle réduirait considérablement la rentabilité prévue à long terme.