L’Asie, qui reste au centre de la croissance économique mondiale, se heurte à des défis majeurs en matière de transition énergétique. Une nouvelle étude commandée par l’Asia Natural Gas & Energy Association (ANGEA) et réalisée par Wood Mackenzie met en lumière le rôle vital du gaz naturel liquéfié (GNL) américain pour répondre aux besoins croissants en énergie de la région tout en réduisant la dépendance au charbon.
Le GNL Américain : Un Marché Essentiel pour l’Asie
Selon l’étude, la demande de GNL en Asie pourrait presque doubler, passant de 270 millions de tonnes en 2024 à 510 millions de tonnes par an d’ici 2050. Ce bond reflète les besoins croissants des pays en développement comme l’Inde, le Vietnam et l’Indonésie, où l’énergie est cruciale pour soutenir la croissance économique et les investissements industriels.
L’Asie reste structurellement dépendante des importations de GNL, faute de ressources suffisantes pour satisfaire sa demande intérieure. Le GNL américain, en tant que premier exportateur mondial, apparaît comme une solution clé pour répondre à ces besoins. Cependant, sa capacité à maintenir son rôle stratégique dépend largement des politiques américaines.
Deux Scénarios, Deux Trajectoires
Wood Mackenzie a modélisé deux scénarios :
1. Levée des restrictions sur les exportations : Si les États-Unis reprennent les approbations d’exportation vers les pays non liés par des accords de libre-échange dès 2025, ils pourraient représenter jusqu’à un tiers des exportations mondiales de GNL d’ici 2035.
2. Maintien des restrictions : Si les approbations restent suspendues, l’Asie devra se tourner vers des sources alternatives moins compétitives. Cela pourrait entraîner une augmentation des prix du GNL, rendant difficile le remplacement du charbon dans plusieurs pays émergents.
L’incertitude entourant l’approvisionnement américain freine actuellement les investissements dans les infrastructures gazières en Asie, compromettant des projets essentiels à long terme.
Des Enjeux Économiques Cruciaux pour l’Asie
Pour de nombreux pays asiatiques, comme le Bangladesh, le Vietnam et les Philippines, le charbon demeure une option familière et économiquement viable. Cependant, sans accès à des approvisionnements compétitifs en GNL, ces pays risquent de prolonger leur utilisation du charbon.
L’étude estime qu’en 2035, une baisse de 30 % de la demande en GNL due à des prix élevés entraînerait une consommation supplémentaire de 95 millions de tonnes de charbon dans la région. Ce scénario souligne les implications économiques et industrielles pour les économies émergentes, qui pourraient se retrouver confrontées à des coûts énergétiques prohibitifs et des approvisionnements instables.
Les Défis des Exportateurs Américains
Pour répondre aux besoins asiatiques, les acteurs américains du secteur du GNL doivent relever plusieurs défis :
– Capacités d’infrastructure : La construction de nouveaux terminaux de liquéfaction et d’exportation est indispensable pour accroître l’offre mondiale.
– Partenariats contractuels : Les importateurs asiatiques cherchent des contrats long terme qui offrent une stabilité, tout en exigeant une flexibilité dans les termes.
– Pressions réglementaires : L’accélération des approbations est cruciale pour permettre aux projets américains de se concrétiser et de rivaliser avec d’autres exportateurs comme l’Australie ou le Qatar.
Perspectives Régionales : L’Inde et l’Asie du Sud-Est au Cœur de la Demande
L’étude prévoit que la demande en GNL des économies matures comme le Japon, la Corée du Sud et Taïwan ralentira progressivement après 2030 en raison de la diversification énergétique et des projets de gazoducs.
À l’inverse, l’Asie du Sud et du Sud-Est, avec des pays comme l’Inde, le Vietnam et l’Indonésie, devrait enregistrer une forte croissance jusqu’en 2050. L’Inde, en particulier, verra sa consommation de GNL augmenter pour répondre aux besoins de l’industrie pétrochimique, des engrais et du gaz urbain.
Un Mix Énergétique Plus Complexe
L’analyse de Wood Mackenzie souligne également les limites des énergies renouvelables pour répondre à la demande asiatique. Les objectifs ambitieux de plusieurs pays, tels que l’Indonésie et le Vietnam, se heurtent à des défis logistiques et financiers, notamment :
– Des contraintes de réseau et un stockage insuffisant pour compenser l’intermittence des énergies solaires et éoliennes.
– Des régimes tarifaires peu attractifs pour les investisseurs étrangers.
– Des limitations géographiques, comme la faible densité de vents en Indonésie ou la densité de population élevée au Bangladesh.
Le GNL, grâce à sa flexibilité et à son coût relativement compétitif, se positionne comme une alternative transitoire essentielle pour répondre à la demande énergétique croissante, tout en garantissant la sécurité énergétique des pays de la région.