L’ancien ministre d’État au Pétrole du Nigeria, Timipre Sylva, fait l’objet d’un mandat d’arrêt émis par la justice fédérale de Lagos. L’ex-gouverneur de l’État de Bayelsa est accusé d’avoir participé à une opération de « conspiration et de conversion malhonnête » de $14,86mn, destinés au développement d’une raffinerie modulaire dans le delta du Niger. Les fonds avaient été alloués par le Nigerian Content Development and Monitoring Board (NCDMB), un organisme public chargé de promouvoir le contenu local dans l’industrie pétrolière.
Un projet pétrolier fantôme
La raffinerie, censée renforcer la capacité locale de raffinage du Nigeria, n’a jamais vu le jour malgré l’investissement déjà engagé. Ce développement a poussé la Economic and Financial Crimes Commission (EFCC) à lancer un avis de recherche national, invitant le public à transmettre toute information pouvant aider à localiser Sylva. L’affaire est concomitante à une autre enquête parlementaire en cours sur la gestion de $35mn affectés au même projet inabouti.
Ce dossier s’inscrit dans une longue série de scandales de détournements liés au secteur pétrolier nigérian, principale source de revenus pour le pays. Il rappelle notamment le cas de Diezani Alison-Madueke, ancienne ministre du Pétrole sous le président Goodluck Jonathan, accusée d’avoir facilité des transactions frauduleuses contre des avantages contractuels.
Fonds détournés, actifs saisis
En janvier 2025, les États-Unis ont convenu avec le Nigeria de restituer $52,88mn issus des avoirs confisqués à Alison-Madueke. Ces fonds provenaient de pots-de-vin versés entre 2011 et 2015 par des investisseurs pour l’obtention de contrats pétroliers. Une grande partie de ces fonds avait été blanchie aux États-Unis, notamment dans des biens immobiliers à New York et en Californie, ainsi que des actifs de luxe.
Parmi les montants restitués, $50mn seront réaffectés à un projet d’électrification supervisé par la Banque mondiale, tandis que le solde appuiera des programmes judiciaires et sécuritaires. En novembre 2022, les autorités américaines avaient également transféré $23mn volés sous le régime de Sani Abacha, après une restitution précédente de $311,8mn en 2019.
Une gouvernance mise à l’épreuve
Le mandat d’arrêt visant Timipre Sylva intervient dans un contexte de pression accrue sur la transparence financière au sein de l’industrie pétrolière. Malgré la mise en œuvre de réformes réglementaires, le secteur reste confronté à des mécanismes de détournement sophistiqués, souvent impliquant des figures politiques de premier plan. L’implication d’un ancien ministre dans un scandale de cette ampleur souligne l’ampleur des défis persistants.
« Il est impératif que la redevabilité soit appliquée à tous les niveaux, surtout dans un secteur aussi stratégique que le pétrole », a déclaré un haut responsable de la commission anticorruption, sans commenter le dossier en cours.