L’Europe envisage la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone à ses frontières (MACF) qui sanctionnerait les importations polluantes. Une mesure qui vise à encourager les autres pays à réduire leurs émissions, mais qui pose des problèmes logistiques.
L’Europe propose un nouveau paquet législatif
Les membres de l’Union européenne (UE) se sont réunis afin de convenir d’un nouveau cadre législatif, intitulé Fit for 55. Il s’agit de soutenir la réduction d’émissions nettes de gaz à effet de serre de 55% d’ici à 2030. Par ailleurs, cela permettrait d’économiser jusqu’à 8 milliards de tonnes d’émissions cumulatives de CO2.
Ainsi, Bruxelles fait le constat de ces dernières années, définissant les moyens de ses objectifs ambitieux.
Secteur énergétique : des efforts à multiplier
Les émissions européennes dues au secteur énergétique ont chuté de plus de 50% depuis leur pic, une prouesse expliquée par le déploiement des énergies renouvelables. Cependant, de larges efforts restent à accomplir pour répondre à l’urgence climatique. C’est pourquoi le nouvel objectif exige 65% de l’approvisionnement énergétique de l’UE soit issu de sources renouvelables.
De fait, selon le cabinet d’étude Wood Mackenzie, les constructions de projets solaires et éoliens devraient augmenter de 160%. Ce, dans le but d’ajouter 472 GW d’énergie renouvelable supplémentaire. Wood Mackenzie estime que l’objectif est réalisable, mais qu’il nécessite d’autres changements de politique et de réglementation.
De lourds investissements attendus
L’objectif pour 2030 pose des défis majeurs à l’industrie énergétique et nécessite de vastes quantités de captal. Autant publics que privés, les investisseurs doivent faire de la décarbonation leur priorité. En outre, cette demande croissante laisse place à de nouvelles opportunités, notamment en ce qui concerne l’éolien, le solaire et le stockage.
Encourager la décarbonation
L’UE compte bien renforcer la tarification carbone, afin d’inciter la décarbonation industrielle, notamment dans des secteurs difficiles. Pour cause, si le système d’échange de quotas d’émissions (SEQE) n’évolue pas, il ne permettra de réduire qu’1/3 des émissions nécessaires pour 2030.
Ainsi, l’UE réfléchit à une extension des secteurs concernés par le marché du carbone européen SEQE, pour viser l’aviation et le transport maritime. Bruxelles envisage également de mettre en place un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF).
Un mécanisme calqué sur le SEQE
Comme le système de quotas interne à l’UE, il s’agirait d’une taxe carbone pour les pays extérieurs, qui viserait directement les produits. Pour l’heure, elle compte se concentrer sur un petit nombre d’industries à forte intensité de carbone et exposées au commerce.
Les premiers secteurs concernés seraient l’acier, le ciment, les productions chimiques et les engrais. Mais l’UE pourrait inclure tous les produits déjà visés par le SEQE.
Un « cauchemar logistique »
Pour autant, la mise en œuvre d’une telle mesure représente un contrôle titanesque aux frontières. En effet, le manque de transparence sur les émissions carbone liées aux produits individuellement pourrait entraver l’efficacité de la mesure. De plus, la difficile détermination du pays d’origine ne facilité pas la tâche.
Le risque des fuites d’émissions carbone
Bruxelles propose le MACF comme solution au rétablissement d’une concurrence juste entre les pays européens et les pays extérieurs. En raison d’un coût des quotas d’émissions en constante augmentation. C’est-à-dire qu’il est passé de 8€/tonne début 2018, à plus de 50€/t en mai dernier.
Mais la mesure ne fonctionnera « que si d’autres pays adoptent des politiques similaires » pour Wood Mackenzie. La Chine et les États-Unis, bien qu’ils aillent dans la même direction, avancent plus lentement sur la taxation carbone. Finalement, si le MACF ne couvre pas toute la chaîne de production, le risque de fuite d’émissions existe.