Les prix du diesel en Europe ont fortement augmenté dans l’après-midi du 18 juillet, après que l’Union européenne a dévoilé son 18ᵉ paquet de sanctions interdisant l’importation de produits raffinés issus de brut russe, y compris ceux transformés par des pays tiers. Cette décision, marquant un durcissement notable de la politique énergétique du bloc, vise à empêcher le contournement des précédentes sanctions via des chaînes d’approvisionnement intermédiaires.
L’Union européenne a introduit des exemptions pour le Canada, la Norvège, la Suisse, les États-Unis et le Royaume-Uni, tout en excluant des partenaires commerciaux majeurs de la Russie comme l’Inde et la Chine. La mesure a immédiatement provoqué des tensions sur le marché, avec le contrat ICE LSGO pour livraison en août grimpant de $42.50 à $755/tonne. Le différentiel entre août et septembre, indicateur clé de la rareté de l’offre, s’est élargi à $27.25/tonne, en hausse de $9.75.
Des flux redirigés depuis l’Inde et la Turquie
L’Inde et la Turquie, devenues des fournisseurs importants de diesel pour l’Europe depuis 2022, sont directement concernées par ces restrictions. Selon S&P Global Commodity Insights, environ 250 000 barils par jour (b/j) de diesel en provenance de ces deux pays pourraient être affectés. Ces volumes s’appuient fortement sur du brut russe transformé localement, désormais interdit à l’importation en Europe.
En juin, l’Europe a importé 124 000 b/j de diesel d’Inde et 94 000 b/j de Turquie, soit respectivement 7 % et 5 % de ses volumes totaux, selon Commodities at Sea de S&P Global. Ces chiffres sont en baisse par rapport à la moyenne annuelle de 2023, où les volumes indiens approchaient 200 000 b/j. Les États-Unis et l’Arabie saoudite ont été les deux plus grands fournisseurs européens le même mois, avec respectivement 380 000 b/j et 190 000 b/j.
Des stocks historiquement bas en Europe
Les inquiétudes liées aux stocks bas de diesel se renforcent avec l’entrée en vigueur des nouvelles sanctions. Les réserves dans le hub Amsterdam-Rotterdam-Anvers sont tombées à leur plus bas niveau en 18 mois au 17 juillet. Le marché étant fortement en backwardation, les acteurs ne voient pas d’intérêt économique à constituer des stocks.
« Personne ne veut stocker dans ces conditions », a déclaré un négociant européen. « Tout le monde fonctionne en flux tendu. » Un autre trader estime que « si tout le monde tourne avec des stocks faibles, les raffineries pourraient subir des contraintes qui amplifieraient la pression sur les prix ».
Répercussions géopolitiques potentielles
Ce durcissement s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu, les États-Unis menaçant de sanctions secondaires à 100 % contre les partenaires commerciaux de la Russie si aucun accord de paix n’est conclu d’ici septembre. Le ministre indien du Pétrole a déclaré le 17 juillet que l’Inde était prête à ajuster ses approvisionnements en brut, tout en reconnaissant une incertitude à court terme.
La raffinerie de Vadinar, exploitée par Nayara Energy et détenue en partie par Rosneft, est particulièrement concernée. Cette installation de 400 000 b/j exportait récemment 7 500 b/j vers l’Europe, soit plus du quart de ses expéditions totales. Le ministère turc de l’Énergie a indiqué attendre des précisions sur les modalités de mise en œuvre de l’embargo.