L’État, qui détient déjà 84% d’EDF, a annoncé mardi son intention de lancer une offre publique d’achat (OPA) pour le
renationaliser à 100%, une opération à 9,7 milliards d’euros destinée à sortir le groupe de son ornière financière et industrielle.
Le gouvernement a choisi la voie la plus simple pour procéder, au lieu d’une loi de nationalisation qui aurait été la première depuis 1981.
Le gouvernement envisage de déposer l’offre d’ici début septembre auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF), avec l’objectif de terminer l’opération fin octobre, selon le ministère de l’Économie.
Ce sera cependant sous réserve que le Parlement vote les crédits nécessaires, dans la loi de finances rectificative pour 2022.
Ce texte est en cours d’examen devant l’Assemblée nationale. L’OPA sur les 15,9% du capital restant à acquérir se fera sur la base d’une offre de 12 euros l’action.
Ce prix représente une prime de 53% sur le cours de bourse relevé la veille de l’annonce de l’intention de renationalisation. C’est aussi une hausse de 34% par rapport à la moyenne des cours de bourse des douze mois précédents, souligne Bercy.
L’État prévoit en outre de proposer 15,64 euros par OCEANE (obligation convertible). La cotation d’EDF, suspendue le 13 juillet le temps que le gouvernement précise ses intentions, a repris ce mardi et le cours a rapidement convergé
vers les 12 euros.
Si l’État rachète le groupe dans son intégralité, celui-ci sera ensuite sorti de la cote, 17 ans après son entrée en Bourse en fanfare.
Une étape avant la réorganisation
Ce retour de l’État à 100% dans EDF avait été annoncé le 6 juillet par la Première ministre Élisabeth Borne, dans son discours de politique générale.
“Cette opération donne à EDF les moyens nécessaires pour accélérer la mise en oeuvre du programme de nouveau nucléaire voulu par le président de la République, et le déploiement des énergies renouvelables en France,” a déclaré mardi Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, cité dans le communiqué de Bercy.
Le groupe, fortement endetté, est confronté à de lourdes charges financières, présentes et à venir, et de vastes chantiers industriels. Emmanuel Macron a annoncé le lancement d’un programme de six réacteur nucléaires de nouvelle génération EPR, voire quatorze, dont le seul modèle actuellement en construction en France, à Flamanville (Manche), accuse plus de dix ans de retard.
Alors que plus de la moitié de ses 56 réacteurs est aujourd’hui à l’arrêt, pour maintenance ou des problèmes de corrosion apparus récemment, EDF doit aussi gérer l’entretien d’un parc vieillissant.
Plombé par une dette qui pourrait atteindre plus de 60 milliards d’euros fin 2022, EDF a vu sa situation financière plus dégradée encore par la décision du gouvernement de lui faire vendre davantage d’électricité bon marché à ses concurrents pour protéger la facture des ménages.
La nationalisation à 100% ne devrait donc être que la première étape d’un vaste chantier. Ses dossiers prioritaires : quelle régulation pour le partage du nucléaire actuel, dont les revenus partent largement aux concurrents d’EDF via la vente d’électricité à bas coût, et comment financer le nouveau nucléaire. Le tout devra impliquer des discussions avec Bruxelles et d’éventuelles réformes pour le groupe.
“Ça permet à l’État de reprendre le contrôle des activités les plus régaliennes de notre production décarbonée”, dit Bercy de la renationalisation. “Ca permet d’ouvrir avec plus de sérénité des chantiers à extrêmement long terme”, ajoute la même source, qui confirme : “Ce n’est pas le bout des projets que nous avons pour EDF, s’agissant tant de sa production que de son organisation, mais c’est une étape très importante.”