L’énergie géothermique s’impose comme une alternative compétitive et durable dans le paysage énergétique européen. En Roumanie, le département de Bihor illustre comment des investissements bien orientés et une gestion ciblée peuvent transformer une ressource locale en avantage stratégique, sans pour autant compromettre les impératifs économiques.
Depuis l’intégration du pays à l’Union européenne, Oradea et Beiuș, deux municipalités de Bihor, ont canalisé les fonds européens pour renforcer leur infrastructure géothermique. Plus de 45 millions d’euros ont ainsi été investis pour moderniser les systèmes de chauffage, avec des résultats mesurables en termes de coûts et de fiabilité énergétique.
Investissements et infrastructure : les chiffres-clés
Oradea, principale ville du département, concentre une part significative des projets financés. L’un des plus récents, achevé en 2024, a nécessité un investissement de 19 millions d’euros, dont 15 millions issus de fonds européens. Ce projet inclut un réseau géothermique de 11,2 kilomètres, alimentant plus de 6 000 logements. Cette infrastructure a permis d’améliorer la distribution thermique tout en intégrant des technologies modernes, telles que des puits de réinjection et des modules de chaleur au niveau des bâtiments.
Beiuș, de son côté, exploite la géothermie depuis les années 1990. Aujourd’hui, le réseau couvre environ 1 600 appartements, 300 maisons individuelles et plusieurs infrastructures publiques. Les efforts pour maintenir un coût compétitif ont porté leurs fruits : en dépit d’une légère hausse cet hiver, les coûts de chauffage restent inférieurs à 32 euros par mégawattheure (MWh). À titre de comparaison, des villes comme Timișoara, dépendantes du gaz et du charbon, enregistrent des coûts bien plus élevés, dépassant 61 euros par MWh.
Un levier stratégique pour réduire les coûts
Les choix stratégiques réalisés à Oradea et Beiuș soulignent l’importance d’une gestion prudente des ressources géothermiques. L’adoption d’un modèle basé sur l’extraction et la réinjection d’eau géothermique garantit une exploitation durable, tout en minimisant les coûts opérationnels à long terme.
De plus, ces investissements se traduisent par des gains économiques tangibles pour les collectivités locales. La capacité à maintenir des tarifs compétitifs sur le chauffage constitue un avantage économique majeur dans un contexte européen marqué par une volatilité des prix des combustibles fossiles.
Le rôle de l’Union européenne dans ce processus est déterminant. Les subventions allouées permettent non seulement de couvrir les coûts de développement, mais également de bénéficier de l’expertise internationale. À Beiuș, par exemple, le projet en cours avec l’Autorité nationale islandaise de l’énergie intègre des technologies de modélisation 3D des réservoirs géothermiques, renforçant ainsi la précision des prévisions sur l’exploitation.
Perspectives de développement et impact économique
Pour pérenniser ces efforts, des études de faisabilité sont en cours à Beiuș et Oradea, notamment pour optimiser les systèmes de distribution et évaluer le potentiel des pompes à chaleur pour les gros consommateurs. Ces initiatives, financées par Innovation Norway, visent à structurer les prochains cycles d’investissement.
Dans une démarche stratégique, les autorités locales cherchent également à intégrer les projets géothermiques dans le cadre des initiatives européennes de diversification énergétique. La proposition récente de Dan Jørgensen, commissaire européen à l’énergie et au logement, de mettre en place une stratégie dédiée à la géothermie pourrait ouvrir de nouvelles opportunités de financement et de partenariat.
Un modèle adaptable à d’autres régions
L’expérience de Bihor démontre que la géothermie peut être bien plus qu’une alternative énergétique : elle constitue une solution économique viable dans des marchés où les coûts énergétiques pèsent sur les budgets publics et privés. Cependant, la réussite de tels projets repose sur une combinaison de financements solides, d’expertise technique et d’une gouvernance efficace.
En se positionnant en pointe sur ces aspects, le département de Bihor offre un exemple concret de l’impact que peuvent avoir des choix stratégiques dans le secteur énergétique, sans céder à des promesses spéculatives ou non vérifiées.