L’industrie automobile traverse une période de transformation, portée par l’adoption progressive des véhicules électriques (VE). Ce changement structurel affecte directement le secteur de la réparation automobile, un marché estimé à 38,5 milliards d’euros en 2022, et qui devrait atteindre environ 40 milliards d’ici 2030, selon une étude de TCG Conseil réalisée pour Mobilians. Cependant, ce chiffre d’affaires global cache des évolutions significatives dans la nature des interventions et les marges des professionnels du secteur.
Les VE, bien que moins exigeants en termes de maintenance traditionnelle, ont des spécificités qui transforment l’activité des garages. Avec un nombre réduit de pièces mécaniques, l’absence de certains services courants comme les vidanges, et une durabilité accrue des composants, les garagistes pourraient observer une diminution des interventions récurrentes. Ce changement est renforcé par les avancées technologiques qui améliorent la fiabilité des systèmes électroniques et prolongent la durée de vie des véhicules. En conséquence, la structure des coûts de maintenance évolue, poussant les professionnels à diversifier leurs offres pour compenser cette perte de revenus.
Des réparations plus coûteuses pour les véhicules électriques
Si les VE nécessitent moins de réparations mécaniques, les coûts liés aux réparations après collision sont nettement plus élevés que pour les véhicules thermiques. Les batteries, éléments clés des VE, sont particulièrement vulnérables en cas d’accident. Le coût de remplacement ou de réparation de ces batteries alourdit la facture pour les clients, avec une augmentation estimée à 25 % par rapport aux véhicules thermiques. Cette tendance est également alimentée par l’utilisation croissante de matériaux coûteux comme l’aluminium ou la fibre de carbone dans la construction des VE, des éléments qui complexifient les interventions.
L’étude de TCG Conseil souligne que, si la fréquence des interventions pourrait diminuer, notamment pour les sinistres classiques, les coûts plus élevés des réparations complexes pourraient compenser en partie cette réduction. Les garagistes sont donc contraints de réorienter leur activité vers des segments à plus forte valeur ajoutée.
Les systèmes ADAS et la réduction des sinistres
Les systèmes avancés d’aide à la conduite (ADAS) jouent également un rôle central dans cette transformation. Ces technologies, comme le freinage d’urgence ou le maintien de voie, réduisent la fréquence des accidents mineurs, ce qui entraîne une baisse prévue de 11 % des sinistres liés à la carrosserie ou aux bris de glace d’ici 2030. Cela modifie directement la nature des interventions en atelier, les garagistes voyant leurs marges sur les réparations légères diminuer.
Cependant, les ADAS, encore en phase de maturation, n’ont pas encore pleinement atteint leur potentiel en matière de réduction des accidents. Leur utilisation croissante suscite également des inquiétudes quant à l’attention des conducteurs, certains devenant trop dépendants de ces technologies. Cela crée un paradoxe : une baisse du nombre d’accidents mineurs, mais un potentiel risque accru pour les accidents plus graves, en partie liés à une inattention accrue.
Une diversification des services pour les garages
Face à ces évolutions, les garages ne peuvent plus se contenter de leur modèle économique traditionnel. Le contrôle technique, les services d’entretien périodique et la vente de pièces détachées pour installation à domicile deviennent des segments clés pour maintenir une rentabilité. Les acteurs du marché se tournent également vers des activités complémentaires comme le lavage ou la vente d’accessoires automobiles, des services qui permettent de compenser la baisse des interventions mécaniques.
La mutation du marché de l’après-vente automobile n’est pas uniquement due aux véhicules électriques. La généralisation des offres de mobilité partagée, l’essor des zones à faibles émissions (ZFE) dans les grandes villes et le vieillissement des véhicules en circulation influencent également la demande. Ces tendances poussent les consommateurs à se tourner vers des solutions de mobilité plus durables et à adopter des comportements de conduite différents, réduisant ainsi le kilométrage annuel des véhicules et, par conséquent, le besoin de maintenance.
Adaptation nécessaire à l’évolution du parc automobile
La convergence de ces facteurs place le secteur de la réparation automobile à un tournant. Les acteurs traditionnels, souvent centrés sur des services mécaniques et des interventions régulières, devront développer de nouvelles compétences, notamment autour de la réparation des composants électroniques, des systèmes de batterie ou encore des technologies embarquées. Cette montée en compétences est indispensable pour répondre aux besoins d’une clientèle qui évolue avec l’adoption croissante des VE et des technologies d’assistance à la conduite.
En définitive, la croissance du marché de l’après-vente automobile d’ici 2030 ne sera pas le fruit d’une simple augmentation des interventions mécaniques, mais d’une redéfinition complète des services offerts par les garagistes. Ceux qui sauront diversifier leur offre et s’adapter à ces nouvelles technologies tireront leur épingle du jeu.