Le Soudan du Sud, fortement dépendant de ses exportations de pétrole, voit la relance de cette activité compromise par la situation militaire au Soudan. Les Forces de Soutien Rapide (FSR), une milice paramilitaire dirigée par Mohamed Hamdane Daglo, dit Hemedti, contrôlent des infrastructures stratégiques essentielles à l’exportation de brut sud-soudanais. Ce contrôle empêche toute reprise effective des flux pétroliers, bloqués depuis plus d’un an, et engendre des répercussions importantes sur l’économie du Soudan du Sud.
Le pays, dont 90 % des revenus sont générés par le secteur pétrolier, perd environ 100 millions de dollars par mois depuis la suspension des exportations. Ces pertes affectent également le Soudan, qui profite des droits de transit pour le pétrole sud-soudanais traversant son territoire. Toutefois, les FSR, en pleine rivalité avec le président soudanais Abdel Fattah al-Burhan, disposent d’un levier stratégique en maintenant leur emprise sur les infrastructures pétrolières.
Blocage stratégique des FSR
Le contrôle des FSR sur les stations de pompage représente un obstacle majeur à la reprise des exportations pour le Soudan du Sud. En détenant cette position clé, Hemedti et ses forces paramilitaires imposent des conditions au Soudan dans le cadre des négociations politiques internes. La rivalité entre Hemedti et al-Burhan se joue ainsi sur plusieurs fronts, compliquant davantage toute résolution rapide de la situation.
La capacité des FSR à bloquer les exportations constitue un atout pour Hemedti dans ses négociations avec al-Burhan. Cette stratégie retarde l’avancée des discussions visant à restaurer les flux pétroliers, élément essentiel à la stabilisation économique de la région. La menace que représente ce contrôle militaire ne se limite pas uniquement aux relations entre les deux généraux soudanais, mais s’étend à l’ensemble de l’économie sud-soudanaise.
Conséquences économiques pour le Soudan du Sud
La prolongation du blocage a des répercussions dramatiques pour l’économie du Soudan du Sud. La Banque africaine de développement (BAD) prévoit que, sans reprise des exportations, le déficit de la balance courante sud-soudanaise restera à 7 % du PIB en 2023/2024, limitant la capacité du pays à financer ses infrastructures et ses services publics. Une reprise pourrait réduire ce déficit à 4 % en 2024/2025, mais cette perspective dépend entièrement de l’évolution des négociations au Soudan.
L’interruption des flux pétroliers affecte également la stabilité des prix sur les marchés internationaux, le pétrole sud-soudanais étant une composante importante des exportations régionales. La persistance de ce blocage maintient une pression sur les équilibres économiques du pays, exacerbant les tensions internes et limitant les marges de manœuvre de Juba sur la scène internationale.
Alternatives pour le Soudan
Du côté du Soudan, la nécessité de sécuriser ses propres exportations pousse les autorités à envisager des alternatives logistiques. Un projet de pipeline reliant le Soudan à Djibouti, via l’Éthiopie, est actuellement à l’étude. Bien que Djibouti ait exprimé son soutien à cette initiative, sa mise en œuvre pourrait prendre plusieurs années, retardant tout effet bénéfique à court terme. Ce projet, s’il se concrétise, permettrait de diversifier les routes d’exportation, réduisant la dépendance à l’égard des infrastructures partagées avec le Soudan du Sud.
La question des infrastructures énergétiques demeure critique pour le Soudan, qui cherche à stabiliser son économie tout en faisant face à une crise politique prolongée. Les droits de transit liés au pétrole sud-soudanais constituent une source de revenus importante pour Khartoum, notamment dans un contexte de grande instabilité financière et d’inflation. La concrétisation de ce pipeline pourrait néanmoins offrir un certain soulagement à moyen terme, tout en modifiant les dynamiques géopolitiques de la région.
Rivalités internes et implications régionales
Le conflit entre Hemedti et al-Burhan a un impact direct sur les relations économiques entre le Soudan et le Soudan du Sud. Tant que ces tensions politiques internes ne seront pas résolues, les perspectives d’une reprise des exportations pétrolières resteront fragiles. Cette situation amplifie les défis auxquels Juba est confronté, mettant en lumière la dépendance du pays vis-à-vis de la stabilité du Soudan.
Les rivalités internes au Soudan compliquent également les efforts des investisseurs et des partenaires économiques internationaux, qui attendent une résolution rapide pour envisager une reprise des investissements dans le secteur pétrolier. Sans un accord stable entre les différentes factions soudanaises, les perspectives économiques pour le Soudan du Sud et le Soudan resteront limitées à court terme.