Gazprom a récemment annoncé suspendre ses livraisons de gaz en direction de Pologne et de Bulgarie. Ces derniers avaient refusé de payer la firme en rouble. S&P Global Commodity Insights considère que cette décision crée un précédent, rendant plus probable l’annulation d’autres contrats dans les mois à venir. Un certain nombre de facteurs seront à surveiller de très près concernant l’évolution des prix du gaz. Nous allons les détailler.
Les flux commerciaux
La Russie est le principal fournisseur de gaz par gazoduc à l’Europe. En outre, l’arrêt des livraisons à la Pologne et à la Bulgarie a suscité des inquiétudes. Des Etats membres de l’UE s’attendent ainsi à un possible élargissement de l’embargo.
La société polonaise PGNiG importe du gaz russe dans le cadre d’un contrat d’importation à long terme qui doit expirer à la fin de 2022. Elle a importé 9,9 milliards de m3 de gaz russe en 2021, répondant ainsi à environ 63 % de la demande. Au premier trimestre 2022, les importations russes ont représenté environ 53 % de la consommation.
De la même manière, la Bulgarie importe du gaz russe dans le cadre d’un accord décennal. Ce dernier porte sur des livraisons à hauteur de 2,9 Gm3/an et expirera à la fin de 2022. En outre parmi les États membres de l’UE, seule la Hongrie a déclaré publiquement qu’elle n’aurait aucun problème à payer le gaz russe en roubles. De plus, la Bulgarie a prévenu le 27 avril qu’elle réexaminerait son accord de transit de gaz avec Gazprom. Cela pourrait avoir un impact sur les livraisons de gaz russe à la Hongrie et à la Serbie.
Les prix du gaz
Les prix du gaz en Europe ont grimpé en flèche en raison de l’incertitude croissante concernant les approvisionnements en provenance de Russie. Celle-ci a prononcé des menaces d’élargissement des coupures si les clients refusent de payer leurs approvisionnements en roubles. La confirmation, le 27 avril, de la suspension de l’approvisionnement de la Bulgarie et de la Pologne a entraîné une hausse de 28 % du prix du gaz. Ces derniers sont montés à des sommets de 125 euros/MWh. Le contrat avait été évalué le 26 avril par S&P Global Commodity Insights à 98,03 euros/MWh.
Selon les évaluations de S&Pet Global Commodity Insights, le prix du TTF pour le mois à venir a atteint un niveau record de 212,15 EUR/MWh le 8 mars. Cela représente une augmentation de 1 190 % en glissement annuel. Les prix du gaz ont de plus été très volatils au cours des deux derniers mois. Ils ont connu de grandes variations de prix lorsque la Russie a présenté son nouveau mécanisme de paiement en roubles en mars. Le ministre allemand de l’énergie, Robert Habeck, s’est récemment exprimé à ce sujet. Il a déclaré que 45 milliards de mètres cubes par an de gaz russe devraient être remplacés. Il serait alors possible de mettre fin à la dépendance vis-à-vis de Moscou.
Les infrastructures
La Pologne et la Bulgarie ont toutes deux déclaré qu’elles disposaient d’une capacité de stockage suffisante. Elles explorent également les alternatives au gaz russe. Selon la ministre polonaise du climat Anna Moskwa, les stocks polonais sont remplis à 76%. La Pologne fait également transiter le gaz russe par le gazoduc Yamal-Europe. Elle prélève des volumes à la frontière avec le Belarus, en faisant transiter le gaz à Mallnow, à la frontière avec l’Allemagne. Cependant, les flux vers Mallnow sont pratiquement nuls depuis fin 2021.
Depuis le début de 2020, la Bulgarie importe son gaz russe via le gazoduc TurkStream. Elle a également importé quelque 500 millions de m3 de gaz d’Azerbaïdjan via le corridor gazier du Sud l’année dernière. Le pays a affirmé avoir des alternatives au gaz russe. La capacité du gazoduc transbalkanique pourrait notamment être utilisée en flux inversé. De plus, la Hongrie et la Serbie sont dépendantes du transit via la Bulgarie. Belgrade a demandé instamment à la Bulgarie de continuer à faire transiter le gaz de TurkStream vers la Serbie, au cas où la Bulgarie cesserait d’importer du gaz russe pour ses propres besoins.
L’UE a également proposé de nouvelles règles en matière de stockage. Les installations étant désormais considérées comme des « infrastructures critiques » pour garantir la sécurité de l’approvisionnement. La Commission européenne a ainsi proposé une nouvelle certification obligatoire. Elle demande également une obligation de remplir les sites de stockage à 80 % de leur capacité d’ici le 1er novembre de cette année.