Les prix des quotas d’émission de carbone en Europe ont enregistré une hausse significative au cours de la semaine se terminant le 21 mars, sous l’effet combiné de facteurs géopolitiques, de la volatilité du gaz naturel et des mouvements techniques. Les discussions concernant une potentielle liaison entre les systèmes d’échange d’émissions (ETS) du Royaume-Uni et de l’Union européenne ont également alimenté les anticipations haussières sur les deux marchés.
Le 21 mars à 11h34 GMT, les quotas européens (EU Allowances – EUA) se négociaient à 73,04 EUR la tonne d’équivalent CO2, en hausse d’environ 3 % par rapport à la semaine précédente, selon les données de l’Intercontinental Exchange. La veille, l’échéance décembre 2025 avait été évaluée à 72,99 EUR par Platts, une division de S&P Global Commodity Insights. Un trader basé en Europe a indiqué à Platts que la dynamique restait haussière, attribuant cette progression notamment aux tensions sur le marché du gaz naturel.
Influence géopolitique et volatilité gazière
Le marché a réagi à la décision du président russe Vladimir Poutine de suspendre les attaques sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes durant 30 jours à partir du 18 mars, après un entretien téléphonique avec le président américain Donald Trump. Le 21 mars, une explosion survenue à la station de comptage de Sudzha, à la frontière russo-ukrainienne, a ravivé les tensions et fait grimper les prix du gaz naturel. Les analystes techniques ont identifié des niveaux de soutien entre 72,75 EUR et 73,42 EUR la tonne, renforçant l’activité algorithmique sur le marché des EUA.
La corrélation entre les EUA et les prix du gaz naturel néerlandais (Dutch TTF) a toutefois faibli au cours de la semaine. Le contrat EUA pour décembre 2025 progressait de 0,04 % le 21 mars, contre une hausse de 1,9 % pour le TTF à terme. Selon Ingvild Sorhus, responsable de l’analyse du carbone européen chez Veyt, cette décorrélation reflète un retour progressif vers des fondamentaux plus spécifiques au marché carbone.
La perspective d’un marché unifié soutient les UKAs
Les quotas britanniques (UK Allowances – UKA) ont bondi de 7 % sur la semaine, atteignant 47,35 GBP la tonne à 11h03 GMT le 21 mars. Cette progression s’inscrit dans la continuité de la déclaration du gouvernement britannique, datée du 20 mars, selon laquelle il envisage activement une liaison entre les systèmes ETS britannique et européen, à l’approche du sommet UK-UE prévu le 19 mai.
Un trader européen a toutefois averti que le processus nécessiterait une harmonisation technique, notamment concernant la réserve de stabilité du marché. Malgré les divergences sur les mécanismes d’allocation gratuite ou d’ajustement de l’offre, Sorhus estime que les deux systèmes partagent des structures suffisamment similaires pour permettre une intégration sans obstacle majeur.
Positionnement des fonds et évolution attendue
Les fonds d’investissement ont réduit leur position nette longue sur les EUA pour la cinquième semaine consécutive, selon un rapport Commitment of Traders publié le 19 mars par l’Intercontinental Exchange. Au 14 mars, ces fonds détenaient 31,1 millions de quotas nets, soit une baisse de 5,3 millions sur la semaine, principalement due à une augmentation de 5,8 millions de positions courtes brutes. Les positions longues sont restées relativement stables à 81,8 millions d’unités.
Sur le marché britannique, les fonds ont maintenu leur position nette longue à 12,9 millions de quotas, en hausse de 0,7 % sur la semaine. Toutefois, les analystes de Commodity Insights prévoient une correction des UKAs durant la seconde moitié de mars, liée à la publication imminente des données préliminaires sur les émissions du Royaume-Uni pour 2024, qui devraient influer sur les stratégies de trading pour l’année suivante.