L’augmentation marquée des exportations de pétrole iranien exerce une pression sur la demande pour les pétroliers conventionnels, a rapporté Frontline, une entreprise spécialisée dans le transport maritime de pétrole, le 27 novembre. Les volumes exportés par l’Iran ont bondi de 400 000 barils par jour (b/j) en 2019 à 1,56 million b/j en octobre 2024, selon les données de suivi maritime fournies par S&P Global Commodities at Sea. Cette tendance est largement alimentée par des cargaisons sanctionnées, vendues à prix réduit principalement à la Chine.
Frontline a noté que cette croissance inattendue, associée à une demande chinoise en ralentissement, réduit davantage la demande de transport dans le marché conforme. L’équilibre global du commerce pétrolier s’en trouve également fragilisé. La société pétrolière nationale iranienne (National Iranian Oil Co., NIOC) prévoit d’augmenter la production de pétrole de 250 000 b/j d’ici mars 2025, avec une hausse déjà enregistrée de 60 000 b/j depuis août.
Des dynamiques de marché complexes
Le ralentissement de la demande chinoise, attribué davantage à une activité économique affaiblie qu’à l’essor des véhicules électriques, amplifie les défis pour les pétroliers traditionnels. De plus, les pétroliers impliqués dans les échanges sanctionnés, souvent appelés « shadow fleet », transportent une part grandissante de pétrole iranien. Cette tendance a un impact direct sur les revenus des transporteurs maritimes conformes.
Au troisième trimestre, les revenus journaliers des superpétroliers (VLCC) ont chuté de 6 % par rapport à l’année précédente, atteignant 39 600 dollars, tandis que les Suezmax ont enregistré une baisse de 13 %, à 39 900 dollars par jour. Les indices de performance établis par Platts, une division de S&P Global Commodity Insights, indiquent également une baisse des tarifs journaliers pour ces catégories de navires.
Prévisions de surcapacité et vieillissement des flottes
Les perspectives pour les transporteurs maritimes restent sombres. L’Agence internationale de l’énergie prévoit une possible fermeture de 1 à 1,5 million b/j de capacité de raffinage en Europe d’ici 2030, exacerbée par une surcapacité attendue dans le transport des produits raffinés.
Par ailleurs, un grand nombre de nouveaux pétroliers sont attendus entre 2026 et 2027. Actuellement, les commandes mondiales comprennent 67 VLCC, 95 Suezmax et 167 pétroliers de type Long Range 2, représentant 17 % de la flotte mondiale existante. Ces ajouts devraient intensifier la concurrence et maintenir la pression sur les tarifs de fret.
En parallèle, le vieillissement des flottes continue. Selon Frontline, 16,5 % des pétroliers VLCC, Suezmax et Aframax/LR2 ont plus de 20 ans, un âge souvent incompatible avec les exigences des opérateurs conformes. Cependant, les flottes non conformes et sanctionnées, représentant 6 % de ces catégories, demeurent très actives, soutenues par des opérateurs prêts à contourner les réglementations internationales.
Un hiver sous le signe de l’incertitude
La morosité du marché s’accentue à l’approche de l’hiver. Des prévisions de demande pétrolière plus faibles qu’attendu et le report par l’OPEP+ de l’assouplissement des réductions volontaires de production aggravent encore la situation pour les transporteurs conventionnels. Les espoirs de voir une augmentation des exportations du Moyen-Orient stimuler la demande de transport maritime se dissipent.
Face à ces défis, les opérateurs traditionnels doivent naviguer dans un environnement marqué par une concurrence croissante et des changements structurels dans le commerce mondial du pétrole.