Les émissions mondiales de méthane liées aux énergies fossiles ont atteint 120 millions de tonnes en 2024, un niveau proche du record historique enregistré en 2019, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Cette estimation repose sur la dernière édition du Global Methane Tracker, qui s’appuie sur des données mesurées plutôt que déclarées.
Fuites chroniques et rôle du secteur fossile
Le méthane est principalement émis lors des opérations d’extraction, de torchage et de transport de combustibles fossiles. Ce gaz, qui constitue la molécule principale du gaz naturel, est environ 80 fois plus réchauffant que le dioxyde de carbone sur une période de 20 ans. Selon l’AIE, le secteur de l’énergie est responsable d’un tiers des émissions anthropiques de méthane, derrière l’agriculture.
Chaque année, environ 580 millions de tonnes de méthane sont rejetées dans l’atmosphère, dont 60% sont d’origine humaine. Le rapport de l’AIE souligne que 70% des émissions énergétiques de méthane pourraient être évitées à moindre coût, notamment grâce à des technologies de captage déjà disponibles sur le marché.
Surveillance satellitaire et écarts de déclaration
L’agence met en évidence un écart notable entre les chiffres mesurés par satellite et les données officielles communiquées aux Nations unies. Les estimations de l’AIE sont environ 80% plus élevées que les déclarations nationales. Cette différence s’explique par la détection de fuites massives, parfois concentrées sur des installations particulières, désignées comme “super-émettrices”.
Le satellite européen Sentinel 5P, spécialisé dans la détection des panaches de méthane, a enregistré un nombre record de ces événements en 2024. Les principaux foyers de fuites se situent aux États-Unis, en Russie et au Turkménistan, selon l’agence.
Sources diffuses et faibles normes de contrôle
Les infrastructures abandonnées, comme les puits de pétrole inactifs et les mines de charbon fermées, représentent une source importante d’émissions. Ces sites ont émis à eux seuls 8 millions de tonnes de méthane l’an dernier, ce qui en fait le quatrième plus grand émetteur mondial d’origine fossile selon l’AIE.
Malgré des engagements couvrant 80% de la production mondiale de pétrole et de gaz, seuls 5% de cette production respecterait des normes vérifiables proches de zéro émission. Cette absence de conformité généralisée alimente les inquiétudes du secteur quant à l’efficacité des mécanismes de régulation actuels.
Le groupe de réflexion Ember estime que les émissions de méthane du secteur fossile doivent être réduites de 75% d’ici 2030 pour répondre aux objectifs climatiques à long terme. « Le méthane du charbon est toujours ignoré », a déclaré Sabina Assan, analyste chez Ember. Elle affirme que des solutions techniques rentables sont déjà disponibles et simples à mettre en œuvre.