Selon Suhail al-Mazrouei, les Émirats arabes unis n’augmenteront pas leur production de brut sans consensus de l’OPEP + allant dans ce sens. Il rejette ainsi les critiques de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Cette dernière reprochait aux EAU de se reposer sur leurs capacités de production inutilisées au détriment de l’économie mondiale.
Un consensus de l’OPEP+ indispensable selon les EAU
Pour rappel, les ministres de l’OPEP+ doivent se réunir le 31 mars pour décider des niveaux de production du mois de mai. Dans un même temps, l’AIE a appelé la coalition à augmenter sa production au-delà des 400 000 b/j d’augmentation mensuelle mis en œuvre depuis août.
Les EAU resteront solidaires à l’OPEP+
Il est nécessaire de prendre en considération un facteur important. En effet, parmi les membres de l’OPEP+, seuls les EAU et l’Arabie saoudite sont en mesure d’augmenter sensiblement leur production de brut. M. Mazrouei a cependant déclaré que le fait d’agir seul briserait l’accord de production de longue date du groupe. Cela déstabiliserait, selon lui, la stabilité du marché.
Il s’exprime à ce sujet auprès de S&P Global Commodity Insights en marge du Forum mondial de l’énergie de l’Atlantic Council à Dubaï :
« Tout d’abord, je ne me soucie pas de ce que l’AIE ou d’autres disent. Nous faisons partie d’une organisation, d’une alliance appelée OPEP+. Nous devons faire les choses en fonction de l’offre et de la demande. Je dirais donc que nous allons faire tout ce que nous pouvons en tant que groupe, et non en tant que pays individuels, et nous vous donnerons ce verdict dans deux jours. »
Des tensions naissantes entre l’OPEP+ et les pays occidentaux
Les relations entre l’OPEP et les pays consommateurs occidentaux se sont détériorées avec la hausse des prix du pétrole. En effet, ce dernier a explosé depuis le début du conflit en Ukraine le 24 février dernier. Le marché mondial est ainsi confronté à un déficit d’approvisionnement estimé à 2,5 millions de b/j.
Par ailleurs, le directeur exécutif de l’AIE, Fatih Birol a déclaré que les pays de l’OPEP+ devaient se révéler comme des « acteurs responsables sur les marchés de l’énergie ». De plus, il a ajouté que le marché était « vraiment déçu » par le manque d’urgence de l’alliance. Il estime que les pays de l’OPEP+ sont en dessous de leurs objectifs de production, considérant l’état actuel du marché.
Un déficit d’approvisionnement insolvable ?
Selon le ministre de l’Energie des EAU, l’OPEP subit le contrecoup de la défense du climat par l’AIE. Cette politique aurait fait fuir les investisseurs nécessaires dans le secteur des combustibles fossiles.
Les EAU dénoncent une attitude ambiguë des États-Unis
En effet, le ministre émirati a vivement critiqué la position des États-Unis. Ils reprochent ainsi à la première puissance mondiale de faire pression sur l’OPEP alors même qu’ils imposent des sanctions à la Russie. Cette dernière est en effet un membre clé de l’alliance des producteurs de pétrole brut.
De plus, il a déclaré que la secrétaire américaine à l’énergie, Jennifer Granholm, n’a jamais pris contact avec lui par téléphone. Il ajoute également que l’administration Biden ne s’engageait pas avec l’OPEP de manière constructive :
« Elle ne m’a pas appelé. Elle ne m’a pas approché. Et si elle voulait appeler, elle sera toujours la bienvenue. Je ne dirais pas non. Je parle avec tout le monde… Nous avons beaucoup plus en commun avec les États-Unis, mais cela ne signifie pas que nous devrions être d’accord sur tout. Nous nous mettrions d’accord sur les choses sur lesquelles nous pensons pouvoir nous entendre. »
Cependant, nous savons que le secrétaire d’État américain Antony Blinken doit rencontrer le prince héritier d’Abou Dhabi Mohammed bin Zayed au Maroc dans les prochains jours. Les discussions porteront notamment sur l’état du marché énergétique.
La position des États-Unis et le dilemme de l’OPEP+
Amos Hochstein, le principal envoyé américain en matière d’énergie, a déclaré que les États-Unis n’avaient aucune demande spécifique à formuler aux ministres de l’OPEP+ avant leur réunion. Il s’exprime à ce sujet :
« Lors de leur réunion de jeudi, ils feront ce qu’ils considèrent comme la bonne chose à faire. Je pense que tout le monde à l’OPEP connaît bien le marché et est au courant de la pénurie actuelle. »
Dans le même temps, M. Mazrouei avait déclaré que la Russie était un fournisseur de pétrole mondial trop critique pour que l’OPEP abandonne son alliance avec Moscou. Il soulignait la nécessité de maintenir la politique commune du groupe.
Cependant, la guerre en Ukraine a, d’une certaine manière, remis en question les liens tissés par l’OPEP+. Les ministres de l’alliance ont toutefois jusqu’à présent soutenu Moscou. Ils ne souhaitent pas mettre en péril une relation qui s’est maintenant étendue au-delà du pétrole pour inclure la sécurité et le commerce. C’est en tout cas ce que confirme Mazrouei qui déclare qu’il ne voit pas « que quelqu’un puisse se substituer à la Russie ». Cette dernière est en effet la seconde productrice de l’alliance en termes de volume.