Les bioraffineries intégrées, capables de traiter simultanément différentes matières premières, gagnent en importance dans l’industrie énergétique. Leur capacité à diversifier les sources de biomasse contribue à la stabilité économique des projets industriels et réduit les risques liés à la dépendance à un unique type de ressource. La combinaison de matières premières issues de cultures alimentaires, comme la mélasse de sucre et les grains dégradés, ainsi que de résidus agricoles non alimentaires tels que la paille de riz, permet aux exploitants de flexibiliser leur production. Cette approche opérationnelle assure une meilleure rentabilité à travers la valorisation simultanée des sous-produits industriels.
Diversification des matières premières et rentabilité
La production d’éthanol de première génération, issue principalement de sources alimentaires telles que le maïs, le riz ou encore la mélasse de sucre, est une technologie mature, économique et maîtrisée par l’industrie. Néanmoins, elle demeure exposée aux critiques concernant la sécurité alimentaire en raison de son utilisation de cultures comestibles. À l’opposé, l’éthanol de seconde génération, fabriqué à partir de biomasse lignocellulosique non alimentaire (résidus de riz, paille de blé, bagasse), implique des procédés industriels plus complexes et coûteux. Toutefois, cette technologie, plus récente, est valorisée industriellement par son indépendance vis-à-vis des marchés alimentaires.
Ces bioraffineries dites intégrées améliorent leur rentabilité en produisant simultanément des biocarburants et des sous-produits industriels valorisables. Parmi eux figurent notamment le biogaz comprimé (CBG), obtenu à partir des déchets industriels issus de la fabrication d’éthanol, ainsi que des dérivés à forte valeur ajoutée comme les drêches sèches avec solubles (DDGS) et l’huile distillée de maïs. La vente de ces coproduits génère des revenus additionnels qui améliorent la viabilité économique des projets industriels dans le secteur des biocarburants.
Synergies industrielles et viabilité économique renforcée
La valorisation des coproduits industriels constitue un levier essentiel pour optimiser les modèles économiques des bioraffineries intégrées. Par exemple, le lignine, sous-produit de l’éthanol de seconde génération, est désormais transformé en biobitume, substitut industriel au bitume traditionnel utilisé dans la construction routière. Ce procédé a déjà été appliqué en Inde, où un premier tronçon routier national de 1 km utilisant du biobitume à base de lignine a été inauguré fin 2024 sur l’axe Nagpur-Mansar, confirmant ainsi sa viabilité opérationnelle.
Dans ce contexte, l’Inde déploie plusieurs programmes industriels, tels que le National Bioenergy Programme et la GOBARdhan scheme, destinés à soutenir financièrement et réglementairement les projets de bioraffineries intégrées. Ces dispositifs facilitent l’émergence de solutions énergétiques industrielles rentables, notamment à travers la production combinée de biocarburants, de biogaz comprimé et de fertilisants organiques solides et liquides issus des procédés de fabrication.
Développement industriel des carburants innovants
Parallèlement à la production d’éthanol, certaines sociétés explorent activement la production commerciale de carburant d’aviation durable (SAF) et de biohydrogène. Ce dernier, produit à partir de déchets organiques et de résidus agricoles, se distingue notamment par un besoin énergétique inférieur à celui requis par l’électrolyse classique de l’hydrogène. Il nécessite environ 10 kW par kilogramme d’hydrogène produit, comparativement à 60 kW par électrolyse. Ce mode de production intéresse les industriels par son potentiel de réduction significative des coûts opérationnels.
L’intégration des filières productives dans ces bioraffineries permet ainsi aux entreprises d’exploiter efficacement toutes les ressources disponibles tout en stabilisant leurs coûts d’exploitation. Cette configuration industrielle favorise l’émergence de projets à grande échelle, apportant une réponse concrète aux enjeux actuels de compétitivité économique dans le secteur des carburants renouvelables.