Le gouvernement vietnamien a officiellement lancé un système pilote d’échange de quotas d’émission de CO₂ (ETS, Emissions Trading Scheme) afin de réguler les émissions issues de trois industries stratégiques. Ce marché cible principalement les secteurs du ciment, de l’acier, et de l’électricité thermique, ensemble responsables d’une part significative des émissions nationales. Cette initiative s’inscrit dans un cadre réglementaire national visant à atteindre les objectifs climatiques que le pays s’est fixés dans le cadre de l’Accord de Paris. Le projet pilote, prévu jusqu’en décembre 2028, constitue une première étape avant une mise en œuvre élargie à d’autres secteurs économiques dès 2029.
Fonctionnement du marché carbone pilote
Durant la phase initiale, la majorité des quotas d’émission sera attribuée gratuitement aux entreprises concernées, dans le but de permettre une adaptation progressive à ce nouveau mécanisme. Les sociétés doivent cependant se conformer à des seuils précis d’intensité carbone, mesurés en émissions par unité de production. Le gouvernement prévoit que jusqu’à 30 % des émissions des entreprises puissent être compensées par des crédits carbone, achetés à partir de projets domestiques ou internationaux. Cette flexibilité vise à faciliter la transition des acteurs industriels concernés, tout en limitant l’impact immédiat sur leur compétitivité.
En pratique, les transactions de quotas seront gérées par la Bourse de Hanoi (Hanoi Stock Exchange, HNX), avec une structure de marché encadrée par des intermédiaires financiers spécialisés. Un registre national centralisé sera mis en place pour suivre précisément les allocations, les échanges, et les compensations réalisées par les entreprises participantes. Ce registre a pour rôle essentiel de garantir la transparence et la traçabilité du dispositif, critères indispensables au bon fonctionnement d’un marché carbone réglementé. Le gouvernement vietnamien a également annoncé que les premières allocations de quotas pour la période 2025-2026 seront distribuées d’ici la fin de l’année 2025.
Enjeux et perspectives pour les secteurs industriels concernés
La mise en place de ce marché carbone représente une évolution réglementaire importante pour les secteurs ciblés, particulièrement énergivores et émetteurs significatifs de gaz à effet de serre (GES). Les industries du ciment et de l’acier devront adapter leurs processus de production pour répondre aux nouvelles exigences en matière d’intensité carbone. Pour le secteur électrique thermique, qui dépend fortement du charbon, les entreprises devront soit améliorer l’efficacité de leurs installations existantes, soit envisager des investissements importants pour réduire leurs émissions totales.
Au-delà des enjeux immédiats de conformité, ce projet pilote prépare également le secteur industriel vietnamien à l’intégration progressive dans les marchés internationaux du carbone. Cette intégration pourrait influencer les stratégies futures d’investissements, tant sur le plan opérationnel que technologique. L’évolution réglementaire prévue après 2028, avec une extension possible à d’autres secteurs tels que le transport de marchandises et les bâtiments commerciaux, constitue un autre élément crucial pour les décideurs industriels nationaux. Cette perspective incite les entreprises à anticiper les futures contraintes réglementaires, notamment à travers l’innovation technologique ou l’efficacité énergétique.
Réactions et premiers impacts observés
Les entreprises impliquées dans ce projet pilote n’ont pas encore exprimé publiquement leurs stratégies détaillées face à ces nouvelles obligations. Cependant, les réactions initiales indiquent une volonté d’engager rapidement les ajustements opérationnels et technologiques nécessaires. Plusieurs acteurs financiers spécialisés dans les échanges de quotas et crédits carbone ont également manifesté leur intérêt à participer activement à l’infrastructure de marché proposée par le gouvernement.
Par ailleurs, le marché carbone vietnamien devrait être suivi de près par les investisseurs internationaux, notamment ceux impliqués dans les marchés asiatiques ou dans des projets de compensation carbone. Ce système pourrait devenir un modèle de référence régional, influençant potentiellement d’autres pays dans l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN). Le succès ou les difficultés rencontrées par le Vietnam dans cette phase initiale pourraient fournir des enseignements significatifs pour la mise en place ultérieure d’autres marchés carbone similaires dans la région.