Il manque toujours près de 24 millions de dollars pour financer le sauvetage d’un pétrolier abandonné au large du Yémen en guerre, a regretté jeudi l’ONU, qui espère malgré tout commencer d’ici fin mai l’opération destinée à empêcher une marée noire en mer Rouge.
« Il est urgent que cet écart soit comblé pour mener l’opération avec succès », a déclaré à la presse Farhan Haq, porte-parole adjoint du secrétaire général de l’ONU à l’issue d’une conférence des donateurs virtuelle organisée par le Royaume-Uni et les Pays-Bas.
En mars, l’ONU avait annoncé avoir acheté un immense navire-citerne pour pouvoir transvaser l’équivalent d’un peu plus d’un million de barils de pétrole brut du FSO Safer ancré au large du port stratégique de Hodeida (ouest du Yémen), qui risque à tout moment de se briser, d’exploser ou de prendre feu, selon des experts. Le supertanker Nautica est actuellement en route vers la région.
Malgré les fonds insuffisants, « nous pensons toujours que l’opération sur l’eau pourra commencer avant la fin du mois », a indiqué Farhan Haq à l’AFP, précisant que l’ONU avait des « mécanismes internes de financement » permettant d’attendre des dons supplémentaires. L’opération inédite pour l’ONU, dont le coût a explosé, est chiffrée au total à 148 millions de dollars: 129 millions pour le sauvetage, plus 19 millions pour la deuxième phase qui inclut notamment le remorquage du Safer une fois vidé et la sécurisation du Nautica.
Avec 5,6 millions supplémentaires annoncés jeudi, le total des dons se monte désormais à 105,2 millions, il manque donc encore 23,8 millions pour la phase de sauvetage. « La justification pour agir est claire: 20 millions de dollars maintenant pourrait épargner 20 milliards de coûts potentiels plus tard », a commenté dans un communiqué Achim Steiner, patron du Programme des Nations unies pour le Développement (PNUD), à la manoeuvre dans ce dossier, soulignant également les justifications « morales » pour épargner les populations de la région.
Construit en 1976, le FSO Safer, qui sert de terminal flottant de stockage et de déchargement, n’a pas été entretenu depuis 2015 alors que le Yémen est plongé dans l’une des pires crises humanitaires au monde en raison de la guerre qui oppose le pouvoir aux rebelles Houthis. Selon l’ONU, le Safer contient quatre fois la quantité de pétrole de l’Exxon Valdez, le pétrolier qui a provoqué en 1989 l’une des plus grandes catastrophes environnementales de l’histoire des Etats-Unis.
En cas de marée noire, l’ONU estime à 20 milliards de dollars le coût du seul nettoyage et met en avant les potentielles conséquences environnementales, économiques et humanitaires catastrophiques. Ainsi, 1,7 million de personnes au Yémen dépendent de l’industrie de la pêche qui serait dévastée et plusieurs ports acheminant de la nourriture à la population pourraient devoir fermer. « Nous sommes sur le point de pouvoir répondre à la menace du Safer (…) Mais nous ne pourrons pousser un soupir de soulagement que quand le travail sera fait », a souligné David Gressly, coordinateur de l’ONU pour le Yémen.