La compagnie pétrolière américaine Chevron, présente au Venezuela depuis près d’un siècle, fait l’objet d’un dispositif de dérogation exceptionnel dans le cadre des sanctions économiques américaines. Ce régime spécial a connu un tournant majeur avec la modification de sa licence d’exploitation, actée fin juillet par les autorités américaines, qui empêche désormais l’injection de dollars dans l’économie locale vénézuélienne.
Chevron, acteur central dans l’économie pétrolière vénézuélienne
Jusqu’à la révocation de sa précédente licence en février, Chevron représentait entre un quart et un tiers de la production pétrolière du Venezuela, jouant un rôle crucial dans l’entrée de devises. Grâce à ce statut, l’entreprise était autorisée à convertir ses revenus pétroliers en bolivars (monnaie locale) auprès du secteur privé, apportant indirectement des dollars au gouvernement vénézuélien.
La nouvelle configuration interdit à Chevron de verser directement des dollars au Venezuela. En contrepartie de ses opérations sur le sol vénézuélien, la société doit désormais rémunérer l’État par des livraisons de brut, privant ce dernier de liquidités immédiates en devises fortes.
Des effets en chaîne sur la devise et les équilibres internes
Le changement de mécanisme a engendré une rareté de dollars sur le marché intérieur, accentuant la pression sur le bolivar et favorisant un écart croissant entre le taux de change officiel et celui pratiqué sur le marché noir. Selon plusieurs économistes, cet écart dépasse désormais les 40%, entraînant un recul du pouvoir d’achat pour une grande partie de la population.
Tamara Herrera, économiste vénézuélienne, estime que l’impossibilité pour l’État de recevoir des dollars directement constitue un manque à gagner, l’obligeant à écouler son brut à prix réduit sur des marchés alternatifs et parfois en contrepartie de monnaies numériques instables. À l’inverse, Elias Ferrer considère que cette marge de manœuvre dans la gestion autonome des flux de brut renforce le contrôle de l’État sur ses recettes en devises.
Une déstabilisation amplifiée par la faiblesse structurelle du pays
Indépendamment de la licence Chevron, la fragilité de l’économie vénézuélienne repose sur une décennie de gestion déficiente, marquée par une dépendance excessive à la rente pétrolière et l’effondrement de la production. La décision américaine, bien qu’ayant un impact immédiat, intervient dans un contexte de vulnérabilité structurelle préexistante.
Les conséquences de la nouvelle licence se font toutefois sentir à court terme, avec une dynamique inflationniste accentuée. Selon les économistes locaux, tant que l’État n’utilise pas ses réserves en devises pour stabiliser la monnaie nationale sur le marché des changes, la pression sur les prix et la dévaluation du bolivar devraient persister.