Le prix du gaz naturel européen poursuit sa baisse, atteignant jeudi un nouveau plus bas depuis près de deux ans, grâce aux niveaux de stockage en Europe confortables et à la hausse des températures qui freine la demande.
Le contrat à terme du TTF néerlandais, considéré comme la référence européenne, évoluait jeudi vers 16H00 GMT autour de 30,09 euros le mégawattheure (MWh), peu après avoir touché les 29,69 euros le MWh, un prix plus vu depuis juin 2021. Le gaz britannique a également atteint jeudi son prix le plus bas depuis juin 2021, à 67,71 pence par thermie (une unité de quantité de chaleur), en baisse de plus de 63% depuis le début de l’année. Aux Etats-Unis enfin, le prix du gaz a chuté de plus de 43% depuis début 2023. « La combinaison d’un hiver doux, d’exportations record de GNL (gaz naturel liquéfié, ndlr) en provenance des Etats-Unis et d’une demande modérée de la part du secteur résidentiel et de l’industrie », a fait reculer les prix du gaz européen, explique à l’AFP Biraj Borkhataria, analyste chez RBC Capital Markets.
La demande de chauffage est en effet le principal poste de consommation de gaz pour les particuliers. « Le réchauffement climatique réduit la demande de gaz pour le chauffage », explique dans une note Bjarne Schieldrop, analyste chez Seb. Les niveaux de stockage en Europe se situent même « proche des niveaux records pour cette période de l’année », confirme M. Schieldrop. L’Europe est donc en bonne voie pour reconstituer ses stocks avant l’hiver prochain.
Le reflux des prix de l’énergie (gaz mais aussi pétrole, en baisse de plus 10% depuis le début de l’année pour le Brent) avait permis de faire reculer le taux d’inflation annuel en zone euro de novembre à mars, mais il est reparti légèrement à la hausse, à 7% en avril. Malgré la baisse des cours, « l’inflation européenne s’avère difficile à maîtriser », souligne Edward Moya d’Oanda, interrogé par l’AFP.
Mettre fin à la crise énergétique
L’Union européenne a lancé la semaine dernière son premier appel d’offres international pour des achats groupés de gaz, de façon à obtenir de meilleurs prix pour reconstituer les stocks avant l’hiver 2023-2024. Vingt-cinq fournisseurs ont déjà répondu à cet appel. Ces « achats groupés » européens doivent permettre d’éviter la situation de l’été 2022, où Etats et entreprises s’étaient précipités au même moment sur le marché du gaz pour constituer leurs stocks, alimentant la flambée des cours.
Mais il s’agit surtout pour l’UE de tenter de prévenir une nouvelle envolée des cours du gaz, comme à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et de la réduction drastique des approvisionnements de gaz russe. « La crise énergétique européenne a effectivement été interrompue grâce à une adaptation exceptionnelle de l’UE à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie », affirme M. Schieldrop. Les prix du gaz européen avaient connu une envolée stratosphérique, jusqu’à toucher les 345 euros le MWh en mars 2022, le record historique du contrat à terme du TTF.
L’Europe s’est depuis efforcée de remplir ses réserves pour réduire autant que possible sa dépendance à la Russie, courant derrière des sources alternatives d’approvisionnement, convoquant des réunions de crise et appelant à la sobriété énergétique. Résultat: le Vieux Continent est parvenu à fortement réduire sa dépendance au gaz russe. Selon les estimations des analystes de DNB, la Russie fournissait environ 40% des importations de gaz européennes avant la guerre en Ukraine, contre moins de 10% actuellement.
Depuis le début de l’année, le gaz naturel européen a chuté de plus de 60%, bien loin de son record historique, mais toujours à des niveaux élevés comparé aux années précédentes. En 2020, le gaz fluctuait autour des 15 euros le MWh. « L’Europe est toujours exposée à des risques de chocs de la demande », prévient toutefois Biraj Borkhataria, « et le stockage ne peut pas à lui seul répondre à une demande accrue dans cette éventualité ».