Les cours du brut sont brièvement repassés sous 70 dollars le baril mercredi pour la première fois depuis les baisses de production de l’Opep+, qui n’a pas réussi durablement à les faire remonter.
L’un des chefs de file du groupe de pays exportateurs, le vice-Premier ministre russe en charge de l’Energie Alexandre Novak, a réagi sans tarder en indiquant « surveiller » le marché. Vers 17H30 GMT (19H35 à Paris), le baril de West Texas Intermediate (WTI), pour livraison en juin, abandonnait 4,02%, à 68,78 dollars, après avoir dévissé de plus de 5%. Son équivalent européen, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet, perdait 3,66%, à 72,56 dollars. Depuis la clôture de vendredi, le Brent a perdu près de 10% et le WTI a dévissé de 11,50%.
Les deux références mondiales du brut ont ainsi largement perdu leurs gains liés aux réductions volontaires de production de certains membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et leurs alliés (Opep+). En mars, ils étaient tombés à jusqu’à près de 64 dollars le baril. Le passage à vide actuel des cours risque de frustrer le cartel « si peu de temps après » l’annonce de « leurs baisses de production », avance Craig Erlam, analyste pour Oanda.
Si les pays membres ont nié par le passé être guidés par les prix, pour l’analyste, « ce n’est pas tout à fait vrai ». Les coupes, annoncées début avril et effectives dès mai jusqu’à la fin de l’année 2023, avaient en effet été interprétées par de nombreux analystes comme une volonté de l’alliance de défendre une limite basse de 80 dollars le baril de Brent. « Nous surveillerons le marché. Nous surveillerons la situation », a déclaré Alexandre Novak, selon les agences de presse russes. « Nous devons comprendre les raisons, les perspectives. Comment cela va-t-il évoluer? », a-t-il répondu à propos de la situation des prix, dont la chute pourrait n’être que de « court-terme ». « Le groupe sera-t-il tenté d’organiser une réunion d’urgence ou attendra-t-il de voir comment la situation évolue? », s’interroge M. Erlam.
Selon l’analyste, une nouvelle intervention du groupe de pays exportateurs dissuaderait sans doute les investisseurs de vendre car ils sauraient que le cartel risque d’intervenir encore.
Craintes de récession persistantes
Même la baisse des réserves commerciales américaines de pétrole brut n’a pas permis aux cours de remonter, l’anxiété concernant la santé des banques régionales américaines, et les craintes plus globales de récession l’emportant. Les autorités et acteurs du secteur bancaire espéraient que le rachat de First Republic par JPMorgan lundi sonnerait, au moins temporairement, la fin des remous dans le monde de la finance mais les banques régionales restent sous pression à Wall Street.
« Les inquiétudes concernant le secteur bancaire américain ont refait surface à la suite de la deuxième plus grande faillite bancaire aux Etats-Unis depuis la crise de 2008 », explique Stephen Brennock, analyste de PVM Energy. « Les actions des banques régionales ont été mises à mal en raison des craintes de contagion ».
Dans le même temps, le marché s’attend à ce que la Réserve fédérale américaine (Fed) procède à une hausse d’un quart de point de pourcentage mercredi à l’issue de sa réunion de politique monétaire, pour contrer l’inflation. Une politique monétaire plus stricte pourrait peser sur la première économie mondiale en renchérissant le coût du crédit pour les ménages et pour les entreprises. De quoi accentuer les risques de récession, et donc de baisse de la demande de pétrole. « S’il existe un actif mondial dont on peut dire qu’il est particulièrement sensible aux craintes de récession, c’est bien le pétrole », affirme Jameel Ahmad, analyste chez CompareBroker.io.