À Niamey, le développement accéléré de l’énergie solaire reflète l’impact d’un rééquilibrage forcé de la stratégie énergétique du Niger après la suspension partielle des livraisons d’électricité par le Nigeria. Cette décision, motivée par des sanctions régionales à la suite du renversement du président Mohamed Bazoum en 2023, a provoqué une baisse de 30 à 50 % de la fourniture électrique nationale, selon Haoua Amadou, ministre de l’Énergie du Niger. Depuis, la Société nigérienne d’électricité (Nigelec) procède à des délestages réguliers, affectant la capitale et les centres urbains.
Conséquences d’une dépendance régionale
Le Nigeria, fournisseur principal d’électricité au Niger, a réduit ses exportations à 46 mégawatts contre 80 mégawatts habituellement. Cette réduction prolongée illustre les vulnérabilités liées à l’interdépendance énergétique régionale, exacerbée par les changements politiques au sein des États membres. Dans ce contexte, l’adoption accélérée de l’énergie solaire représente une réponse technique à un déséquilibre géopolitique.
Les résidents et commerçants de Niamey se procurent désormais massivement des équipements photovoltaïques, souvent importés de Chine. Leur prix, divisé par deux, rend ces technologies accessibles à une clientèle plus large. De simples installations domestiques permettent d’alimenter des télévisions, ventilateurs et appareils d’éclairage, en particulier dans les quartiers confrontés aux coupures récurrentes.
Expansion du marché local face aux tensions politiques
Le marché local est en forte croissance. Des fournisseurs tels que Djibril Tata et Hilaire Houndegnon observent une hausse continue de la demande, avec des volumes de vente en nette augmentation depuis 2023. Ce dynamisme est nourri par la disponibilité de batteries longue durée et par une main-d’œuvre technique plus expérimentée.
Dans les régions rurales, l’énergie solaire est employée pour l’alimentation de pompes à eau et d’infrastructures de santé. Des projets soutenus par la Banque mondiale et des entités arabes permettent de pallier l’absence de réseau conventionnel, notamment pour la conservation de médicaments.
Dimension institutionnelle et enjeux d’autonomie
En 2024, une centrale solaire de 30 mégawatts a été mise en service aux abords de Niamey, avec l’appui financier de l’Union européenne, dans le cadre d’un programme lancé avant le coup d’État. La ministre Haoua Amadou a également annoncé un projet à Agadez de 19 mégawatts ainsi qu’un autre de 200 mégawatts encore à l’étude.
Le Niger est inscrit au programme Desert to Power porté par la Banque africaine de développement, qui vise à installer 10 000 mégawatts dans la région sahélienne. Cette réorientation vers l’énergie solaire s’inscrit dans une volonté déclarée de renforcer l’indépendance énergétique nationale, dans un contexte de désalignement politique croissant avec ses anciens partenaires régionaux.