La centrale nucléaire de Kashiwazaki-Kariwa, la plus puissante au monde en capacité installée, pourrait prochainement redémarrer partiellement après plus d’une décennie d’arrêt. Le gouverneur de la préfecture de Niigata, Hideyo Hanazumi, devrait annoncer dans les prochains jours son accord pour relancer l’un des sept réacteurs du site, selon plusieurs médias japonais citant des sources proches du dossier.
Cette décision constituerait une première pour Tokyo Electric Power Company Holdings Incorporated (Tepco) depuis l’accident nucléaire de Fukushima Daiichi en 2011, qui avait conduit à l’arrêt complet du parc nucléaire national. Le redémarrage envisagé concerne une tranche du site de Kashiwazaki-Kariwa, situé sur la côte ouest du Japon, qui dispose d’une capacité totale de 8 212 mégawatts répartis sur sept réacteurs à eau bouillante.
Un redémarrage progressif sous haute surveillance
Bien que l’Autorité de régulation nucléaire (Nuclear Regulation Authority, NRA) ait validé la conformité technique de la centrale aux nouvelles normes post-Fukushima, Tepco avait vu sa licence restreinte en 2021 à la suite de défaillances majeures dans les dispositifs de sécurité. Ces failles, notamment en matière de contrôle d’accès et de prévention des intrusions, avaient entraîné une interdiction totale de mouvement de combustible sur le site.
Ce gel opérationnel a été levé fin 2023, après une série d’inspections complémentaires, permettant à la centrale de retrouver un statut favorable de suivi réglementaire. Toutefois, l’accord du gouverneur ne représente qu’une étape : l’assemblée préfectorale de Niigata devra également se prononcer, et des consultations restent en cours avec les autorités locales et les communautés riveraines.
Une priorité économique pour Tepco et le gouvernement
Pour Tepco, la remise en service progressive des unités 6 et 7 représente un levier significatif de redressement financier. Selon des estimations relayées dans la presse japonaise, l’opération pourrait générer jusqu’à 100 milliards de yens ($656mn) d’économies annuelles en réduisant la dépendance aux combustibles fossiles, principalement le gaz naturel liquéfié (GNL), massivement importé depuis 2011.
Sur le plan national, le gouvernement japonais ambitionne de ramener la part du nucléaire à 20-22% de son mix électrique d’ici 2030, contre moins de 10% actuellement. À ce jour, 14 réacteurs sur les 33 encore exploitables ont redémarré commercialement, représentant une capacité totale d’environ 13 gigawatts. L’activation partielle de Kashiwazaki-Kariwa pourrait ainsi constituer une avancée notable dans cet objectif.
Vers une stabilisation du mix énergétique japonais
Le Japon a récemment actualisé ses objectifs énergétiques à long terme, intégrant à la fois le renforcement du parc nucléaire et l’essor des énergies renouvelables. D’ici 2040, les autorités prévoient que le solaire et l’éolien assurent entre 40 et 50% de la production électrique nationale, tandis que le nucléaire continuerait de jouer un rôle de base pour répondre à la demande industrielle, notamment dans les secteurs des semi-conducteurs et des centres de données.
Le calendrier précis de remise en service reste soumis à plusieurs facteurs techniques et politiques. Des travaux sont toujours en cours pour achever les équipements de sécurité anti-terrorisme requis. En parallèle, l’acceptation locale demeure un élément clé, dans une région encore marquée par les conséquences de l’accident de 2011.