Une loi entrée en vigueur au Japon modifie les règles sur la durée d’exploitation des réacteurs nucléaires, autorisant leur fonctionnement au-delà de la limite de 60 ans imposée après la catastrophe de Fukushima en 2011. Cette mesure s’inscrit dans une stratégie nationale visant à renforcer le rôle de l’énergie nucléaire dans l’approvisionnement énergétique du pays.
Une stratégie motivée par les besoins énergétiques futurs
Le gouvernement japonais souhaite répondre à la montée de la consommation d’électricité, en particulier liée au développement de l’intelligence artificielle et à l’expansion des usines de semi-conducteurs. La loi permet désormais d’ajouter des années de fonctionnement aux réacteurs, à condition que les arrêts aient été causés par des « circonstances imprévisibles ». Cela pourrait permettre à certaines centrales, comme celle de Fukui, arrêtée douze ans après Fukushima, de rester en service jusqu’en 2047, soit 72 ans après leur mise en route, selon Asahi Shimbun.
Parallèlement, la législation introduit des dispositifs de renforcement des inspections de sûreté pour les réacteurs vieillissants. Ces mesures visent à sécuriser l’approvisionnement en électricité face aux tensions du marché mondial, exacerbées par la guerre en Ukraine.
Un tournant dans la politique énergétique japonaise
Ce changement marque une inflexion par rapport au précédent Plan stratégique énergétique, dans lequel le Japon s’était engagé à « réduire autant que possible » sa dépendance à l’énergie nucléaire. Cette orientation a été supprimée dans la dernière version du plan validée en février, qui prévoit désormais une part de 20 % d’énergie nucléaire dans le mix énergétique d’ici à 2040, contre 5,6 % en 2022.
Le Japon reste cependant confronté à des critiques concernant ses engagements climatiques. En février, Tokyo a promis une réduction de 60 % de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2035 par rapport aux niveaux de 2013. Cette cible est jugée insuffisante par plusieurs observateurs par rapport aux objectifs définis dans l’Accord de Paris.
Un secteur toujours marqué par l’héritage de Fukushima
La loi permet de compenser les longues périodes d’arrêt imposées par les procédures de sûreté post-Fukushima, sans modifier la limite théorique de 60 ans. Le Japon, cinquième plus grand émetteur de dioxyde de carbone derrière la Chine, les États-Unis, l’Inde et la Russie, cherche ainsi à stabiliser son approvisionnement tout en maîtrisant ses émissions.
« Le Japon tente d’équilibrer ses contraintes économiques et énergétiques tout en tenant compte des réalités géopolitiques et climatiques », a rappelé un responsable gouvernemental cité par Connaissance des Énergies le 6 juin.