« Le nucléaire est de retour ! » : les industriels réunis près de Paris dans le plus grand salon mondial du secteur ont célébré le retour en grâce de cette énergie controversée à la faveur de la crise climatique, mais attendent toujours les détails du futur programme français.
Le nucléaire civil bénéficie d’une meilleure image
Le World Nuclear Exhibition (WNE) se tient jusqu’à jeudi à Villepinte, au nord de la capitale française, pour la première fois depuis trois ans, l’édition 2020 ayant été reportée en raison de la pandémie de Covid-19.
« Je suis venu ici une nouvelle fois, mais dans des conditions plus favorables qu’en 2018, défendre cette filière historique qu’est la filière nucléaire française », a déclaré en ouverture le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. « Les choses ont profondément évolué » depuis trois ans et le nucléaire représente « la seule voie qui nous permettra d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 », a-t-il lancé.
18.000 personnes attendues
Les organisateurs attendent 18.000 participants pour ce salon international du nucléaire civil, un secteur qui revient sur le devant de la scène dix ans après l’accident de la centrale nucléaire Fukushima qui lui avait porté un coup d’arrêt.
Les industriels mettent aujourd’hui en avant l’avantage climatique de cette énergie qui n’émet pas de CO2 lors de son fonctionnement.
Outre les grandes ambitions chinoises en la matière, le nucléaire suscite en Europe l’intérêt de divers pays comme la Pologne ou la République tchèque par exemple. Tous ces pays espèrent ainsi réduire leur dépendance au charbon.
Signe d’une conjoncture plus favorable, l’Agence internationale de l’énergie atomique (IAEA) a relevé cette année ses projections pour la première fois depuis la catastrophe de Fukushima, prévoyant désormais un doublement de la puissance nucléaire installée d’ici à 2050 dans le scénario le plus favorable.
« Soif pour le nucléaire »
« On est dans les enjeux du changement climatique, de la croissance économique, de la relance économique donc c’est évident qu’il y a un besoin, qu’il y a une soif pour le nucléaire qui est globale », a souligné le directeur général de l’IAEA, Rafael Grossi. « Il y a 51 réacteurs qui sont construits en ce moment », et « ce n’est pas une histoire de deux ou trois pays », a-t-il souligné.
« Le nucléaire est de retour », a aussi assuré le directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (IEA), Fatih Birol, citant outre la question climatique le besoin de stabilité à l’heure d’une crise sur les marchés mondiaux de l’énergie.
« Mais rien n’est encore joué », a-t-il nuancé, en adressant également une mise en garde aux professionnels : « l’industrie nucléaire doit délivrer à temps et selon le budget ! ».
Les coûts et les délais
Un propos qui résonne particulièrement en France, où le seul réacteur nucléaire en construction, l’EPR de Flamanville (Manche), connaît au moins dix ans de retard et des surcoûts à répétition. Alimentant les doutes sur la capacité de l’industrie à répondre à temps à l’urgence climatique.
La France, l’un des pays les plus nucléarisés au monde, a finalement décidé de ne pas attendre le démarrage de cet EPR pour construire de nouveaux réacteurs sur son sol, a annoncé Emmanuel Macron le 9 novembre. Le Président s’empare ainsi d’un thème de campagne porteur.
Un WNE sans Emmanuel Macron
Espéré par les professionnels, le président n’est toutefois pas venu au WNE pour détailler ce nouveau programme tant attendu. « Il faut un nombre significatif de réacteurs nucléaires », a seulement déclaré Bruno Le Maire, sans précision sur le nombre ou le calendrier.
En attendant, il a promis que le nucléaire civil serait inclus « dans les jours qui viennent » dans la « taxonomie » verte européenne, une liste d’énergies jugées vertueuses pour le climat et l’environnement qui aura ainsi un accès facilité à certains financements.