L’Allemagne réfléchit pour s’écarter du gaz russe. La quatrième économie mondiale prévoit même de couper l’approvisionnement en gaz russe. La maintenance de Nord Stream 1 pousse davantage à y réfléchir.
Très dépendante, l’Allemagne cherche par tous les moyens de se détacher de l’énergie russe. De plus, une maintenance de Nord Stream 1 est en cours depuis le 11 juillet. Le gouvernement est à la recherche de solutions.
L’enjeu de la maintenance de Nord Stream 1
Nord Stream 1 est crucial pour l’Allemagne. De fait, c’est la plus grande route empruntée le gaz russe pour approvisionner le pays. Cette route permet d’apporter 55 milliards de mètres cubes par an. À savoir, l’année dernière, la consommation allemande s’élevait à 100 milliards de m3.
En outre, Kremlin exerce une pression politique sur l’Occident via le gaz. Moscou a déjà cessé d’envoyer du gaz en Pologne cette année et réduit ses envois en Ukraine du fait de la guerre. De plus, le chauffage en gaz est indispensable pour la moitié des ménages allemands, en particulier d’octobre à mars. Par conséquent, l’enjeu est d’autant plus important étant donné que l’hiver arrive prochainement.
Depuis le 23 juin, les volumes de Nord Stream 1 ont fortement chuté. Ainsi, l’Allemagne entre dans la phase 2 de son plan d’urgence. Cette deuxième phase signale la perturbation de l’approvisionnement en gaz alors que la demande est exceptionnellement élevée. Toutefois, le marché reste capable de répondre à la demande, sans prendre de mesures.
Cependant, la fermeture de Nord Stream 1 serait le scénario catastrophique. Cela impliquerait que le stockage souterrain de gaz ne sera pas effectué avant l’hiver. En théorie, avec un remplissage de 64,6% au lieu de 80% au 1er octobre, le stock actuel pourrait subvenir à la demande nationale uniquement pendant 2 mois et demi.
Une économie qui dépend du gaz russe
Les principaux consommateurs de gaz industriels en Allemagne sont les producteurs de produits chimiques, d’acier, de verre et de papier. Par conséquent, de nombreux secteurs sont en jeu.
De plus, une réduction de gaz de l’ordre de 30% peut rendre inactive la moitié des usines d’aluminium, selon le groupe industriel Aluminiumm Deutschland. Hydro Aluminium, Speira et Trimet en seraient les premières victimes. De fait, l’industrie de l’aluminium est dépendante du gaz pour la fusion et le recyclage. Avec un chiffre d’affaires de 22 milliards d’euros et 60.000 salariés, ce secteur n’est pas négligeable pour l’économie allemande.
Quant à l’industrie papetière, cela représente 15 milliards d’euros et 40.000 salariés. À noter, les emballages en papier et en carton sont indispensables pour l’alimentation, les médicaments et les articles d’hygiène.
De même, le géant de la chimie BASF devrait entamer un plan d’urgence à l’échelle de l’entreprise si les flux russes s’arrêtent. L’approvisionnement en gaz d’environ 50% de sa demande maximale permet de maintenir l’entreprise viable.
S’ajoutent les prévisions peu optimistes en cas d’arrêt complet de l’approvisionnement en gaz russe. D’après le groupe industriel bavarois vbw, les performances économiques sont susceptibles de chuter de 12,7% au second semestre 2022.
Par ailleurs, les alternatives au gaz sont faibles. D’autant plus que les prix de l’énergie augmentent fortement depuis l’année dernière, tout comme la demande après la pandémie.
Outre l’aspect économique, les risques sont également sociopolitiques. L’instabilité générée pourrait créer des conflits sociaux. De plus, cela renforcerait les partis populistes. Ce climat de tension pourrait porter préjudice aux réponses apportées à la crise.
La réponse allemande
À la demande du plus grand importateur de gaz d’Allemagne, Uniper, le gouvernement prévoit un plan de sauvetage. Selon une source politique, ce plan s’élève à 9 milliards d’euros. À noter, d’autres services publics risquent des problèmes similaires.
Pour faire face à la flambée des prix de l’énergie, Berlin approuve plusieurs lois notamment une loi introduisant un mécanisme de partage. Ce mécanisme prévoit de partager les coûts du gaz entre les consommateurs. Cela éviterait de laisser les prix affecter les secteurs individuels et les parties de la chaîne de valeur.
En outre, les entreprises privées se mobilisent, notamment le principal sidérurgiste Thyssenkrupp. Ce dernier élabore des plans en cas de perturbations. Ces plans sont très importants puisque le gaz ne peut pas être remplacé par le pétrole ou le charbon.
Ainsi, l’Allemagne travaille sur tous les scénarios possibles. La maintenance de Nord Stream 1 incite davantage à trouver des solutions. Pour le moment, le futur énergétique du pays n’est pas assuré.
Illustration : Factory Game Background par KOMAL KUMARI