Le gaz russe ne sera pas suffisant pour soutenir la demande domestique tout en assurant les exportations vers l’Europe. Par conséquent, son prix s’envole sur le marché européen. La Russie prévoit pourtant une hausse de sa production pour 2021. Mais celle-ci devrait se destiner au marché asiatique.
Le gaz russe ne peut pas satisfaire la demande européenne
La production de gaz russe ne sera pas suffisante pour faire face à la hausse de la demande sur le marché européen. La nécessité de renflouer les stocks domestiques au troisième trimestre affecte les capacités d’export. Même si les autorités prévoient une augmentation de la production sur l’année 2021. Dans ce contexte, le marché européen est sous tension.
D’autres facteurs cumulatifs expliquent les tensions gazière en Europe. Dans un premier temps, la nécessité de remplir les réserves à l’approche de la saison hivernale, dans un contexte de reprise économique générale. Dans un second temps, la chute de la production gazière européenne (Pays-Bas, Norvège, Royaume-Uni). En conséquence, le prix du gaz explose. Il atteint ainsi les $881/1000m3 au hub TTF. Le 17 septembre 2021, il dépassait les $900/1000m3 sur l’ICE de Londres.
Pourtant, les exportations de gaz russe vers l’Europe ont augmenté de 20% par rapport à l’année dernière pour atteindre leur niveau de 2018-2019. Cependant, la plus grande partie de ces exportations sont allées vers la Turquie et l’Allemagne, qui sont tous les deux connectés directement à la Russie via les gazoducs sous-marins Turkstream et Nord Stream 1-2. Avec la baisse des approvisionnements en Europe, Gazprom, seul, ne peut pas faire face aux pics de demande.
Difficultés autour de l’augmentation des investissements dans la production gazière
Les réserves de gaz russe sont suffisamment abondantes pour couvrir la croissance de la demande globale. Néanmoins, cela ne pourra pas se faire d’un seul coup. Il faut donc des investissements et l’assurance que le gaz produit sera bel et bien acheté. C’est ce que demandait le président Poutine lors de la visite d’Angela Merkel, le 20 août 2021 au Kremlin.
Diversifier les débouchés en se tournant vers l’Asie
En outre, il ne faut pas nier l’importance des changements dans la distribution géographiques des réserves. Les flux vers la Chine en provenance de Sibérie orientale via le gazoduc Force de Sibérie (Sila Sibiri) ont augmenté. De nouveaux gisements sont prêts à être développés dans la péninsule de Yamal (qui approvisionne Nord Stream), alors que ceux de Nadym-Pur-Taz, qui fournissent Turk Stream et l’Ukraine, sont en train de diminuer. Or, avec les incertitudes liés à Nord Stream 2, Gazprom semble hésitant à l’idée d’investir dans de nouveaux outils de production.
Cela favorisera une certaine volatilité sur le marché européen. Surtout après 2024 et l’expiration de l’accord de transit par l’Ukraine. Même si, pour l’heure, Vladimir Poutine assure que l’Ukraine restera un pays de transit après cette date.
La transition énergétique européenne serait un problème ?
L’objectif de transition énergétique de l’Europe vers la neutralité carbone est une épée de Damoclès au-dessus du commerce gazier. La Russie doit donc s’assurer de nouveaux marchés et contrebalancer sa dépendance au marché occidental. En ce sens, Gazprom est en train de s’orienter vers des solutions GNL. Elle pourra ainsi plus facilement se tourner vers l’Asie en offrant l’accès à ses réserves via de nouveaux pipelines.
En outre, la mise en activité de Nord Stream 2 permettra un allègement de la pression. Mais il faudra attendre que sa capacité de transit soit convenable pour que le marché européen s’assouplisse. Pour 2021, Gazprom a annoncé que seulement 5 milliards de m3 passerait par le gazoduc. Sa capacité maximale étant de 55 milliards de m3, un si faible volume ne suffira pas à rassurer le marché cet hiver.