Le conglomérat indien Adani a annoncé une réduction de moitié de l’électricité qu’il fournit au Bangladesh, invoquant des impayés s’élevant à 850 millions de dollars. Cette décision, prise pour maintenir la stabilité financière de ses engagements, met le Bangladesh en difficulté face à une demande énergétique accrue en période de forte chaleur, bien que novembre apporte habituellement un léger répit.
Rezaul Karim, président du Bangladesh Power Development Board (BPDB), a confirmé que le gouvernement tente de compenser le manque d’approvisionnement en mobilisant d’autres centrales électriques. « Nous discutons activement avec Adani pour trouver une solution et avons précisé qu’il n’est pas possible de régler l’intégralité du montant dû en un seul mois, » a-t-il déclaré. En octobre, le Bangladesh a réussi à verser 97 millions de dollars au groupe indien, un montant supérieur aux paiements effectués durant les trois mois précédents, dans un effort pour réduire l’ardoise.
Pressions économiques et implications pour Adani
Adani, qui avait déjà alerté en septembre sur une « situation financière intenable », se trouve contraint de respecter non seulement ses engagements envers le Bangladesh mais aussi envers ses créanciers et fournisseurs. Cette déclaration reflète les tensions financières croissantes auxquelles le conglomérat doit faire face dans un contexte où le non-recouvrement des créances menace la continuité de l’approvisionnement.
La centrale au charbon de Godda, située dans l’État indien du Jharkhand, est un projet phare d’Adani. Inaugurée l’année précédente pour un coût de 2 milliards de dollars, cette infrastructure, incluant des lignes de transmission, répond habituellement à environ 7 à 10 % de la demande énergétique du Bangladesh, dont la consommation s’élève à environ 13 gigawatts (GW). Toutefois, avec la baisse de production imposée, la centrale n’a fourni que 724 mégawatts vendredi, bien en deçà de sa capacité installée de 1.496 MW.
Efforts de rééquilibrage énergétique au Bangladesh
Le BPDB cherche activement à atténuer les effets de cette réduction d’approvisionnement. Face à un délestage de 1.680 MW dans le pays, le Bangladesh dépend également de 1.160 MW importés des États voisins du Bengale occidental et de Tripura, en Inde. L’arrêt progressif des appareils de climatisation, qui constituent une part importante de la consommation d’électricité lors des saisons chaudes, pourrait réduire la demande intérieure et permettre de limiter les pénuries.
La situation souligne les risques inhérents à la forte dépendance énergétique du Bangladesh vis-à-vis de fournisseurs étrangers. Environ 45 % de l’électricité consommée dans le pays provient de l’importation, ce qui place la sécurité énergétique du Bangladesh en position vulnérable, particulièrement en cas de tensions financières. Le gouvernement bangladais prévoit toutefois de renforcer ses capacités de production interne, afin de pallier les possibles interruptions dans les années à venir.
Perspectives et enjeux financiers
La situation actuelle pose également la question des finances publiques et de la gestion des dettes contractées par les organismes responsables de l’énergie au Bangladesh. Selon des experts, sans un règlement rapide des arriérés, Adani pourrait être contraint de revoir ses engagements ou même d’imposer de nouvelles réductions d’approvisionnement. Cela pourrait entraîner des coûts supplémentaires pour le Bangladesh, devant recourir à des sources de production moins optimales pour combler le déficit.
D’un point de vue stratégique, cette affaire illustre l’importance croissante des infrastructures énergétiques transfrontalières et les risques associés aux relations commerciales pour des produits aussi essentiels que l’électricité. La situation qui oppose aujourd’hui Adani et le Bangladesh pourrait devenir un cas d’école pour les pays qui dépendent fortement de sources d’énergie extérieures.