Prix à la pompe, contraintes techniques: un éventuel embargo européen sur le pétrole russe, en discussion depuis de longues semaines à Bruxelles, aurait de coûteuses conséquences sur les consommateurs et les entreprises, avertit le Cepii dans une note publiée mercredi. Si l’Europe se détourne du pétrole russe en réaction à la guerre en Ukraine, “il faudra remplacer un peu plus d’un quart des importations totales” d’or noir du continent, alerte le Centre d’études prospectives et d’informations internationales, un organisme rattaché à Matignon. En effet, 30% des importations européennes de pétrole proviennent de Russie et 40% des importations de produits pétroliers émanent de Moscou, selon le Cepii, d’où la nécessité de diversifier les approvisionnements européens
d’hydrocarbures, par exemple en se tournant vers l’Arabie Saoudite, le Brésil, les États-Unis ou le Canada.
Difficile de trouver d’autres approvisionnements
Mais ces grandes puissances pétrolières sont géographiquement plus éloignées de l’Europe que la Russie et la diversification des approvisionnements européens se traduira donc par une hausse des coûts de transport, mettent en garde les auteurs de la note. Convaincre ces nouveaux partenaires d’augmenter leur production pour répondre à la demande européenne de pétrole pourrait aussi être délicat. Pour le Cepii, le contrat signé mi-mars par la Russie avec des entreprises indiennes à un prix bradé de 25 dollars le baril constitue d’ailleurs un “message” à l’adresse des autres grands producteurs de pétrole. “Le signal transmis par la Russie est qu’elle n’hésitera pas à casser les prix s’ils venaient à augmenter leur production” pour satisfaire les velléités européennes de diversification, analysent les chercheurs.
Enfin, “il est important de considérer la qualité des pétroles bruts” que l’Europe pourrait importer à l’avenir. “Le pétrole russe ayant de bonnes qualités pour produire des distillats moyens (gazole), son remplacement par un autre pétrole pourrait demander un traitement plus complexe en raffinerie pour obtenir les mêmes produits finis”, pointe le Cepii. “Le prix des produits pétroliers devrait donc augmenter sous l’effet de ces contraintes techniques, indépendamment du jeu de l’offre et de la demande”, conclut-il.
La note apparaît alors que les membres de l’Union européenne tentent depuis plusieurs semaines de s’accorder sur un embargo sur les importations de pétrole russe. Malgré les réticences de la Hongrie, en quête de garanties sur le maintien de son approvisionnement, un accord sur un embargo est possible “d’ici quelques jours”, a estimé lundi le ministre allemand de l’Economie Robert Habeck.