Le commerce énergétique entre le Canada et les États-Unis, qui représente un pilier stratégique des relations bilatérales, pourrait être bouleversé par la mise en place d’une taxe douanière de 25 % sur les importations de pétrole canadien. Une telle mesure, évoquée récemment par des responsables américains, mettrait à rude épreuve l’économie canadienne tout en perturbant l’équilibre du marché énergétique nord-américain.
Un partenariat énergétique essentiel
Le Canada, principal fournisseur de pétrole brut des États-Unis, a représenté près de 60 % des importations américaines en 2022. Cette interdépendance repose en grande partie sur des infrastructures stratégiques comme le pipeline Keystone XL, qui permet de transporter efficacement le brut lourd des sables bitumineux de l’Alberta vers les raffineries américaines, situées majoritairement sur la côte du Golfe.
Malgré cette relation mutuellement bénéfique, le commerce énergétique entre les deux pays n’est pas à l’abri des tensions. La taxe envisagée par les États-Unis s’inscrit dans une logique protectionniste visant à réduire leur dépendance énergétique envers les importations étrangères, tout en répondant aux critiques liées à l’impact environnemental du pétrole canadien, souvent décrié pour son intensité carbone.
Les répercussions pour le Canada
Une taxe de 25 % sur les exportations pétrolières canadiennes aurait des conséquences directes pour l’Alberta, cœur de l’industrie pétrolière du pays. Une telle mesure alourdirait les coûts d’importation pour les raffineries américaines, réduisant ainsi la demande de pétrole brut canadien. En réponse, les producteurs canadiens verraient leurs revenus diminuer drastiquement, mettant en danger des milliers d’emplois dans le secteur.
Le Canada, fortement dépendant des exportations vers les États-Unis, devrait explorer d’autres débouchés, comme l’Europe ou l’Asie. Cependant, ces marchés exigeraient d’importants investissements en infrastructures, notamment dans des pipelines capables de diversifier les flux d’exportation. En parallèle, les pertes de revenus affecteraient également les finances publiques de l’Alberta et du gouvernement fédéral.
Un impact également pour les États-Unis
Si les États-Unis espèrent renforcer leur industrie nationale grâce à cette taxe, ils ne seraient pas épargnés par ses répercussions. Les raffineries américaines, spécialement conçues pour traiter le brut lourd canadien, auraient du mal à s’adapter à d’autres sources d’approvisionnement. Cela entraînerait une augmentation des coûts opérationnels et, inévitablement, des hausses de prix pour les consommateurs américains.
Cette taxe pourrait également perturber les marchés pétroliers mondiaux, déjà fragilisés par les tensions géopolitiques et la guerre en Ukraine. En limitant l’accès à une source d’approvisionnement stable comme le Canada, les États-Unis risqueraient de déstabiliser davantage un équilibre déjà précaire.
La réponse de l’Alberta et du gouvernement fédéral
Face à cette menace, la Première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, a intensifié ses efforts pour défendre les intérêts de son industrie. En multipliant les échanges avec les décideurs américains, elle cherche à souligner l’interdépendance économique et énergétique entre les deux pays.
L’Alberta travaille également à diversifier ses exportations. L’expansion du pipeline Trans Mountain, qui vise à ouvrir des débouchés vers l’Asie, constitue un élément clé de cette stratégie. Par ailleurs, le gouvernement fédéral explore des solutions juridiques pour contester la taxe via l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), tout en renforçant son soutien aux industries affectées.
Un contexte mondial incertain
Cette taxe, bien qu’encore au stade de projet, reflète une réalité plus large : la transition énergétique et les dynamiques protectionnistes redéfinissent les priorités économiques et politiques des pays producteurs et consommateurs. Le Canada, fortement dépendant du marché américain, se trouve à un tournant stratégique, où la diversification des marchés et la modernisation des infrastructures énergétiques deviennent essentielles pour préserver sa compétitivité.