L’Arabie saoudite cherche à développer de nouveaux débouchés pour ses ressources minières en Europe, en particulier en France, afin de soutenir la croissance de son secteur industriel. Le ministre de l’Industrie et des ressources minérales, Bandar Al Khorayef, a présenté le titane et l’aluminium produits dans le royaume comme des matériaux stratégiques pouvant alimenter la filière aéronautique européenne.
Une réponse aux tensions sur l’approvisionnement
Une coentreprise saoudo-japonaise, active depuis 2015 en Arabie saoudite, produit jusqu’à 15 000 tonnes par an d’« éponge de titane », une matière utilisée dans l’aéronautique. Le ministre a déclaré que cette capacité pourrait être augmentée, dans un contexte où Airbus et Safran cherchent à réduire leur dépendance à la Russie. Il a effectué une visite de trois jours en France, incluant des échanges avec des sous-traitants d’Airbus à Toulouse, Airbus Helicopters à Marignane, ainsi qu’avec la direction du motoriste Safran.
Le titane est un métal léger et résistant à la corrosion, largement utilisé dans les structures aéronautiques. Si les sanctions internationales n’ont pas encore visé le titane russe, les entreprises européennes anticipent des risques d’approvisionnement. Un expert du secteur interrogé par AFP a qualifié ces discussions de « stratégiques » pour diversifier les sources d’approvisionnement, tout en notant que la production saoudienne actuelle reste insuffisante pour couvrir les besoins d’Airbus.
Matériaux alternatifs et approbation attendue
Le royaume souhaite également faire reconnaître son aluminium comme conforme aux standards d’Airbus, pour une utilisation dans les fuselages d’avions. En parallèle, l’Arabie saoudite entend développer l’exploitation et la transformation de ses ressources en minéraux, plastiques industriels et composites issus de la pétrochimie.
Parmi les ressources identifiées figurent la bauxite, le phosphate, le cuivre, le zinc, l’or, l’argent et une quantité jugée significative de terres rares. Depuis 2018, un programme géologique a permis de doubler l’estimation des réserves minérales du pays, passant de 1 300 milliards à 2 500 milliards de dollars, selon les chiffres communiqués par le ministre.
Discussions bilatérales sur les métaux rares
Bandar Al Khorayef a indiqué que le conseil des ministres lui avait donné mandat pour engager des négociations directes avec le gouvernement français en vue d’un accord sur les métaux rares. À cette occasion, il a rencontré Benjamin Gallezot, délégué interministériel français aux approvisionnements en minerais et métaux stratégiques.
Le ministre a également eu un entretien avec l’entreprise Orano, fournisseur français de combustible nucléaire, afin d’évaluer les techniques d’extraction de l’uranium à partir du phosphate. Cette démarche s’inscrit dans une stratégie annoncée en janvier par le ministre saoudien de l’Énergie, Abdelaziz ben Salmane, selon laquelle le royaume prévoit d’enrichir et de commercialiser de l’uranium.
Plateforme industrielle et environnement commercial
Dans un contexte international marqué par la guerre en Ukraine et les tensions commerciales avec les États-Unis, le ministre estime que le royaume peut devenir un centre industriel attractif. Il a mentionné la possibilité pour des entreprises issues de pays ciblés par des sanctions plus strictes de s’implanter en Arabie saoudite afin d’exporter vers le marché nord-américain. Cette stratégie impliquerait des coentreprises avec des investisseurs saoudiens dans un cadre réglementaire perçu comme plus stable.