L’Arabie saoudite, acteur central de l’OPEC+, ajuste son approche pour faire face à l’érosion de ses parts de marché au niveau mondial. Depuis plusieurs années, la stratégie de réduction de la production de l’OPEC+ visait à stabiliser les prix du pétrole, maintenant un prix de référence autour de 100 dollars par baril. Toutefois, avec la montée en puissance des producteurs non membres de l’OPEC, en particulier des États-Unis, cette approche montre ses limites.
En 2024, l’Arabie saoudite décide d’abandonner cet objectif de prix. Elle choisit plutôt d’augmenter sa production pour défendre ses parts de marché. Ce changement est perçu comme nécessaire, la part de l’OPEC+ dans l’offre mondiale étant tombée à 48 %, tandis que celle des États-Unis atteint désormais 20 %. Le royaume prend cette décision à un moment où les prix du pétrole ont déjà baissé de 5 % cette année, affectés par une demande mondiale morose, notamment en Chine.
L’OPEC+ et ses alliés face à une concurrence accrue
La stratégie actuelle de l’OPEC+ repose sur une réduction collective de l’offre pour soutenir les prix mondiaux. Cependant, cette méthode n’a pas réussi à freiner l’augmentation de la production dans d’autres régions du monde, surtout aux États-Unis, où la technologie du pétrole de schiste permet une flexibilité accrue. En conséquence, malgré les efforts saoudiens pour maintenir les prix élevés, la compétition externe a capturé une part croissante du marché.
Riyad a pris la tête des efforts de l’OPEC+ pour restreindre la production, réduisant elle-même ses volumes de près de 2 millions de barils par jour depuis 2022. Cependant, cette stratégie, qui avait initialement pour but de limiter l’offre pour stabiliser les prix, a fini par affaiblir la position de l’Arabie saoudite sur la scène mondiale. En augmentant sa production à partir de décembre 2024, l’Arabie saoudite signale qu’elle préfère sacrifier les prix élevés à court terme pour sécuriser sa part de marché sur le long terme.
Des défis pour les autres membres de l’OPEC+
La décision saoudienne risque de provoquer des tensions au sein de l’OPEC+. Certains membres, plus dépendants des prix élevés du pétrole pour équilibrer leurs budgets, pourraient voir cette augmentation de la production comme une menace à leurs revenus. L’Arabie saoudite, grâce à ses réserves financières substantielles et à sa capacité d’endettement, est mieux équipée que d’autres pour supporter une période de prix plus bas.
Cependant, cette décision pourrait également encourager d’autres membres à suivre l’exemple saoudien, augmentant à leur tour leur production pour compenser les pertes de revenus. Cela risquerait d’entraîner une surabondance de l’offre sur le marché mondial, amplifiant ainsi la pression à la baisse sur les prix. L’impact sur les pays plus vulnérables de l’OPEC+, dont les économies sont étroitement liées aux revenus pétroliers, pourrait être significatif.
Répercussions sur le marché pétrolier mondial
La hausse de la production saoudienne intervient à un moment où le marché est déjà confronté à une offre excédentaire. Les producteurs américains, en particulier, ont profité des réductions de l’OPEC+ pour renforcer leur présence sur le marché mondial. La production de pétrole de schiste aux États-Unis, grâce à des coûts d’extraction plus bas, a pu s’adapter rapidement à l’évolution des prix. En réponse à l’augmentation de la production saoudienne, les producteurs américains pourraient réduire leurs investissements ou se tourner vers des stratégies plus conservatrices.
Cette nouvelle dynamique pourrait également redéfinir les relations entre les grands acteurs du secteur pétrolier mondial. L’Arabie saoudite semble déterminée à reprendre sa place de premier plan, même si cela implique une baisse temporaire des revenus. La stratégie saoudienne pourrait aussi marquer le début d’une nouvelle ère où les parts de marché priment sur les prix élevés.
Le pari à long terme de Riyad
L’Arabie saoudite mise sur sa capacité à résister à une période de prix plus bas pour regagner du terrain face à ses concurrents. Riyad estime que ses solides réserves financières lui permettront de tenir tête aux autres grands producteurs, même dans un environnement de prix réduits. Ce pari à long terme pourrait lui permettre de sécuriser des parts de marché plus importantes une fois la demande mondiale de pétrole redynamisée.
Ce changement marque un tournant dans la stratégie pétrolière de l’Arabie saoudite, qui ne vise plus uniquement à soutenir les prix, mais à renforcer sa domination dans le paysage pétrolier mondial. Reste à savoir si cette stratégie s’avérera payante face aux défis géopolitiques et économiques qui se profilent.