L’ammoniac bas-carbone face aux défis techniques et financiers du maritime

Selon l’Oxford Institute for Energy Studies, l’adoption de l’ammoniac bas-carbone dans le transport maritime se heurte à des barrières économiques, réglementaires et sécuritaires, malgré la pression internationale croissante pour réduire les émissions de la flotte mondiale.

Partager:

Les articles d'energynews.pro en intégralité à partir de 4.90€/mois sans engament

30 000 articles déjà publiés depuis 2021.
150 nouvelles analyses chaque semaine pour décrypter les marchés.

Digital PRO access MENSUEL

Accès immédiat — 4.90€/mois*

sans engagement - annulable à tout moment, activation en 2 minutes

*Tarif indiqué HT applicable pendant 1 mois d’abonnement sans engagement, puis révisé à 14.90 €/mois à partir du 2ᵉ mois.

Digital PRO access annuel

Accès immédiat — 99€/an*

Pour accéder à tout energynews.pro sans aucune limite

*Tarif indiqué HT applicable pendant 1 an d’abonnement, puis révisé à 149,00 €/mois à partir de la 2ᵉ année.

L’industrie du transport maritime se trouve à un moment charnière. La majorité de la flotte mondiale fonctionne encore aux combustibles fossiles, mais les nouvelles règles de l’Organisation maritime internationale (International Maritime Organization, IMO) imposeront des réductions d’émissions contraignantes dès 2028. Dans ce contexte, l’ammoniac bas-carbone, qu’il soit produit par électrolyse à partir d’électricité renouvelable (« ammoniac vert ») ou par reformage du gaz naturel avec captage du carbone (« ammoniac bleu »), attire l’attention comme futur carburant maritime. Toutefois, son adoption pose une série d’obstacles financiers, techniques et réglementaires qui ralentissent sa mise en œuvre.

Un coût de production encore prohibitif

Le premier frein à l’essor de l’ammoniac comme carburant marin réside dans son prix. Le coût de production de l’ammoniac vert avoisine en moyenne 730 $ par tonne, soit près de trois fois celui des fiouls conventionnels utilisés aujourd’hui dans le transport maritime. Même l’ammoniac bleu, produit à environ 600 $ la tonne, reste bien au-dessus des prix de marché des carburants fossiles, évalués à 500 $/tonne pour le fioul lourd. L’écart est encore plus marqué lorsque l’on compare l’énergie réellement fournie : l’ammoniac possède une densité énergétique plus faible, ce qui augmente le volume nécessaire pour une propulsion équivalente.

Les perspectives de baisse des coûts reposent largement sur l’amélioration des électrolyseurs et sur la disponibilité d’électricité renouvelable à très bas prix. Dans les régions bénéficiant d’un accès abondant à l’énergie solaire et éolienne, comme le Moyen-Orient, les coûts pourraient descendre à 480 $/tonne d’ici 2030. Toutefois, en Europe occidentale ou en Asie du Sud-Est, où l’électricité reste plus chère et la production renouvelable contrainte, ces prix compétitifs semblent hors d’atteinte dans un futur proche.

Incertitudes liées aux infrastructures et aux investissements

Au-delà de la production, l’acheminement et le stockage de l’ammoniac nécessitent des infrastructures portuaires spécifiques. Peu de ports disposent aujourd’hui d’installations de soutage adaptées à cette molécule. Les investissements pour construire des terminaux dédiés, des systèmes de pompage sécurisés et des réservoirs résistants à la corrosion s’annoncent considérables. Les armateurs, eux, doivent également adapter leurs moteurs. Plusieurs fabricants, tels que WinGD, travaillent déjà sur des moteurs « ammonia-ready », mais leur déploiement à grande échelle reste embryonnaire.

Le coût des navires convertis ou neufs, conjugué aux incertitudes sur la demande future et les règles à venir, pèse sur les décisions d’investissement. Les institutions financières et les armateurs réclament des signaux politiques clairs pour engager des capitaux dans cette transition.

Une toxicité qui impose des normes de sécurité strictes

L’ammoniac est une substance toxique et corrosive, ce qui pose un défi majeur pour son utilisation comme carburant. Les bases de données d’accidents industriels recensent plus d’une centaine d’incidents liés à l’ammoniac en Europe et aux États-Unis, souvent dus à des erreurs humaines ou des défaillances d’équipements. En mer, douze accidents impliquant des navires transportant de l’ammoniac ont été enregistrés entre 1978 et 2021, dont plusieurs mortels.

À bord, le contact direct ou l’inhalation à des concentrations supérieures à 300 ppm entraîne des lésions graves, tandis qu’au-delà de 5 000 ppm, l’exposition peut être fatale. Les systèmes de détection, d’isolation des compartiments et de ventilation devront donc être renforcés pour limiter les risques d’exposition. Le Code international de sécurité pour les navires utilisant des gaz ou autres combustibles à faible point éclair (International Code of Safety for Ships Using Gases or Other Low-flashpoint Fuels, IGF Code) doit être adapté d’ici 2026 pour intégrer les spécificités de l’ammoniac.

Des risques environnementaux sous surveillance

Contrairement aux carburants fossiles, l’ammoniac ne rejette pas de dioxyde de carbone lors de sa combustion. Cependant, il produit d’autres polluants préoccupants. La formation d’oxydes d’azote (NOx) et de protoxyde d’azote (N₂O), un gaz à effet de serre près de 300 fois plus puissant que le CO₂, reste une difficulté technique. Des systèmes de réduction catalytique sélective (Selective Catalytic Reduction, SCR) peuvent limiter ces émissions, mais leur performance dans le cadre d’une utilisation massive d’ammoniac en propulsion maritime reste encore à démontrer.

Par ailleurs, les risques de fuite ou de « slip » lors du stockage ou de la combustion soulèvent des inquiétudes pour la qualité de l’air et la santé des marins. Dans les milieux marins, l’ammoniac dissous peut perturber les écosystèmes, provoquer des mortalités piscicoles et contribuer à l’eutrophisation des zones côtières.

Un cadre réglementaire en construction

L’adoption de l’ammoniac comme carburant maritime ne dépend pas seulement de la technique et de l’économie, mais aussi du droit international. L’IMO a approuvé en avril 2025 un projet de « Net-Zero Framework » imposant aux navires de plus de 5 000 tonnes brutes une réduction progressive de l’intensité carbone de leur carburant à partir de 2028. Le dispositif inclura un mécanisme de quotas et de pénalités, avec la possibilité de générer ou d’acheter des unités de compensation.

En parallèle, l’Union européenne a déjà intégré le transport maritime dans son système d’échange de quotas d’émissions (EU Emissions Trading System, ETS) et mis en place le règlement FuelEU Maritime, qui impose une intensité carbone maximale sur l’énergie consommée par navire. Si les règles de l’IMO et de l’UE coexistent, les armateurs risquent de devoir se conformer à deux cadres différents, compliquant la gestion de leur flotte.

Perspectives pour les acteurs du secteur

Face à ces contraintes, les industriels avancent avec prudence. Les projets pilotes se multiplient, mais restent limités en échelle. Les constructeurs de moteurs poursuivent la recherche, tandis que certains ports stratégiques, notamment en Europe et au Moyen-Orient, étudient la mise en place d’installations de soutage. Toutefois, l’équilibre économique de l’ammoniac bas-carbone ne pourra être atteint sans politiques de soutien, comme des crédits d’impôt, des subventions à la production d’hydrogène propre et des mécanismes de prix du carbone.

Pour les armateurs et les investisseurs, la question n’est plus de savoir si l’ammoniac deviendra une option, mais dans quelles conditions et à quelle échéance il pourra rivaliser avec les autres carburants alternatifs comme le méthanol ou le gaz naturel liquéfié associé au captage du carbone. Les choix stratégiques pris dans les prochaines années détermineront la place réelle de l’ammoniac dans le mix énergétique maritime mondial.

Lhyfe débute ses livraisons d’hydrogène vert aux Pays-Bas pour le projet GROHW

Lhyfe entame l’approvisionnement d’Essent en hydrogène vert renouvelable dans le cadre d’un contrat pluriannuel, marquant une première commerciale majeure aux Pays-Bas pour le producteur français.

RWE obtient €551mn pour un électrolyseur de 100 MW à Eemshaven

Le gouvernement néerlandais accorde une subvention majeure à RWE pour développer une installation d’électrolyse alimentée par l’éolien offshore, marquant une étape clé dans le projet OranjeWind.

ScottishPower stoppe ses projets d’hydrogène vert malgré les financements publics

ScottishPower met en pause ses projets d’hydrogène renouvelable au Royaume-Uni, bien qu’ils aient bénéficié de subventions publiques, invoquant un manque de viabilité commerciale dans le contexte du programme HAR1.
en_1140030925540

thyssenkrupp nucera acquiert les actifs technologiques de Green Hydrogen Systems

thyssenkrupp nucera a finalisé l’achat des actifs clés de Green Hydrogen Systems, consolidant sa position sur le marché de l’électrolyse alcaline sous pression pour la production d’hydrogène à usage industriel.

GH2 Solar investit $48.2mn dans une usine d’électrolyseurs à Gwalior avec AHES

GH2 Solar Ltd s’allie à AHES Ltd pour développer une usine d’électrolyseurs à Gwalior, avec 500 MW de capacité visés d’ici 2030 et un appui gouvernemental de $19mn.

Inde et Japon activent un corridor hydrogène-ammoniac avec objectifs 2030-2040

Accord de coopération, mécanisme bilatéral de crédits carbone et normalisation convergente posent les bases d’un flux Inde→Japon en hydrogène et ammoniac, avec cibles de volumes, soutiens de prix et premiers projets d’export en montée d’échelle.
en_1140310830540

L’Allemagne et le Japon accélèrent leurs contrats d’achat d’hydrogène pour sécuriser l’offre

Les accords d’achat d’hydrogène se multiplient, l’Allemagne et le Japon en tête, mobilisant producteurs et acheteurs industriels dans un marché encore naissant mais déjà fortement concurrentiel.

Vema Hydrogen s’appuie sur un conseil scientifique d’élite pour accélérer l’hydrogène géologique

Vema Hydrogen crée un conseil scientifique international pour appuyer le déploiement industriel de son hydrogène minéral à grande échelle, alors que ses premiers puits pilotes doivent être forés en Amérique du Nord avant la fin de l’année.

La Californie lance un appel d’offres pour le transport public d’hydrogène

L’autorité First Public Hydrogen ouvre un appel à propositions pour la livraison d’hydrogène gazeux et liquide sur tout le territoire californien, avec une échéance fixée au 12 septembre.
en_11402808262540

Ohmium réduit l’empreinte au sol de ses électrolyseurs à 29,7 m²/MW

Le fabricant américain Ohmium dévoile une nouvelle génération d’électrolyseurs modulaires, intégrant tous les systèmes de production sur un espace réduit, avec pour objectif d’abaisser les coûts d’installation et d’exploitation de l’hydrogène vert.

ABO Energy et Hydropulse lancent une alliance stratégique dans l’hydrogène vert

ABO Energy et Hydropulse unissent leurs forces pour développer des unités décentralisées de production d’hydrogène vert en Europe, avec une priorité donnée à l’Espagne et à la Finlande.

Next Hydrogen obtient 1,1 million USD de prêts pour renforcer sa trésorerie

Next Hydrogen obtient deux prêts distincts, dont un auprès de ses dirigeants, afin de consolider ses liquidités et poursuivre ses activités pendant l’évaluation de solutions financières à long terme.
en_1140250844540

Metacon valide une livraison partielle et encaisse 14,9 millions d’euros

Metacon reçoit 14,9 millions d’euros de Motor Oil Hellas pour la livraison approuvée de dix unités d’électrolyse, première étape d’un projet industriel stratégique en Grèce.

Les raffineries européennes visées par la réglementation sur l’hydrogène vert à 2030

Le cadre réglementaire de l’Union européenne impose aux raffineries l’intégration d’hydrogène vert, générant une demande estimée à 0,5 million de tonnes d’ici 2030.

Air Products livre 730 000 gallons d’hydrogène liquide à la NASA pour Artemis

Air Products a acheminé plus de 50 camions-citernes vers le Kennedy Space Center pour remplir le plus grand réservoir d’hydrogène liquide au monde, destiné à soutenir les missions Artemis de la NASA.
en_11402108205540

Les investissements dans l’hydrogène vert devraient atteindre 510 milliards USD d’ici 2032

Porté par les incitations fédérales, les hubs hydrogène et la demande industrielle, le marché américain de l’hydrogène vert affiche un taux de croissance annuel moyen de 63,8 % jusqu’en 2032.

Next Hydrogen limite sa perte nette et sécurise des financements stratégiques au T2 2025

Malgré une baisse de revenus, Next Hydrogen assure sa continuité opérationnelle au second trimestre 2025 grâce à de nouveaux financements privés et institutionnels.

Bonatti obtient le contrat clé pour les infrastructures du projet Pacifico Mexinol

Transition Industries confie à Bonatti la construction des installations critiques du complexe Pacifico Mexinol, un projet stratégique au Mexique destiné à devenir un acteur majeur du marché mondial du méthanol.
en_1140170839540

GeoPura renforce ses capacités hydrogène avec des actifs GHS et une base européenne

GeoPura a acquis des actifs clés de Green Hydrogen Systems et ouvert une filiale au Danemark pour soutenir son expansion dans la production et la maintenance d’électrolyseurs à hydrogène.

L’Australie recalibre ses ambitions hydrogène après la vague d’abandons de projets majeurs

Les retraits de BP et Fortescue révèlent l'écart entre promesses et réalité économique du secteur, malgré 22,7 milliards de dollars australiens d'incitations gouvernementales.

Connectez-vous pour lire cet article

Vous aurez également accès à une sélection de nos meilleurs contenus.

ou

Passez en illimité grâce à notre offre annuelle:
99€ la 1ère année, puis 199€ /an.