articles populaires

La Turquie confrontée à l’emprise russe sur son avenir nucléaire à Akkuyu

Face à la domination russe dans le projet nucléaire d’Akkuyu, la Turquie accélère ses négociations internationales, cherchant à limiter les risques liés à sa dépendance énergétique et aux possibles conflits d’intérêt stratégiques.

Partagez:

Le projet nucléaire d’Akkuyu, piloté par le géant russe Rosatom, soulève des préoccupations importantes en Turquie sur le plan économique, technique et sécuritaire. Estimé à 25 milliards USD, ce chantier crucial pour la politique énergétique du pays est aujourd’hui contrôlé à 99 % par Rosatom, via sa filiale Akkuyu Nükleer A.Ş. Le Parlement turc, réuni récemment, a exprimé de vives inquiétudes quant aux implications économiques de l’accord signé avec la Russie, qui garantit un prix élevé de 12,35 cents US par kilowattheure durant 15 ans, très supérieur aux prix domestiques et internationaux. Cette situation, ajoutée à la domination actionnariale russe, alimente des interrogations sur de potentiels conflits d’intérêt au détriment des intérêts nationaux turcs.

Débats sur la sécurité et dépendance technologique

En plus du coût financier, les députés turcs ont mis en lumière les retards dans le projet, notamment liés aux difficultés de Siemens, entreprise allemande initialement chargée de fournir certains équipements essentiels. Face à ces retards, Rosatom s’est tourné vers des alternatives chinoises, accroissant les questions autour de l’indépendance technologique turque. La faible participation locale, estimée entre 25 et 30 % seulement des contrats, renforce les craintes d’une dépendance technique durable vis-à-vis de l’expertise étrangère, principalement russe et chinoise. Depuis 2011, 319 ingénieurs turcs ont été formés en Russie, ce qui place la Turquie dans une dépendance technologique à long terme envers les méthodes et normes russes.

Des préoccupations environnementales et sécuritaires ont également été évoquées par les parlementaires. Mehmet Tahtasız a souligné le manque d’infrastructures locales adaptées à la gestion à long terme des déchets radioactifs générés par Akkuyu. Par ailleurs, Mahmut Tanal a exigé des garanties concernant les évaluations sismiques et les dispositifs d’urgence, rappelant que le site d’Akkuyu se trouve en zone fortement exposée aux tremblements de terre. Ces éléments accentuent le risque lié à une gestion étrangère d’une infrastructure aussi sensible.

Stratégie de diversification des partenaires

Face à cette emprise russe, Ankara s’est lancée dans une diplomatie énergétique active pour ses futures centrales nucléaires, notamment à Sinop, au bord de la mer Noire, et en Thrace. Selon le ministre turc de l’Énergie, Alparslan Bayraktar, des négociations avancées ont lieu actuellement avec le Canada, via Candu Energy, ainsi qu’avec la Chine et la Corée du Sud. La Turquie vise à atteindre 20 gigawatts (GW) de capacité nucléaire d’ici 2050, ce qui nécessite une diversification rapide des partenariats pour éviter toute situation similaire à celle d’Akkuyu.

Les discussions avec la Chine sont particulièrement avancées concernant le projet en Thrace, notamment avec la State Power Investment Cooperation (SPIC). Bayraktar a aussi rencontré les représentants de CNOS et de CATL pour examiner différents modèles d’investissement et technologies nucléaires envisageables. Cette diversification apparaît cruciale dans un contexte marqué par la domination russe actuelle sur le projet Akkuyu.

Des leviers juridiques encore inexploités

Malgré ces nouvelles initiatives, la Turquie n’a toujours pas utilisé l’article 5 de l’accord bilatéral signé avec la Russie en 2010, qui lui permettrait de reprendre jusqu’à 49 % des parts du projet Akkuyu au nom de la sécurité nationale. Jusqu’à présent, Ankara considère Akkuyu comme une entité commerciale nationale soumise au droit turc, mais n’a pas exercé ce droit de prise de participation. Ce statu quo préserve de fait le contrôle russe sur une installation destinée à fournir 10 % de l’électricité du pays.

Pour les acteurs du secteur énergétique, la situation actuelle d’Akkuyu et les décisions stratégiques futures du gouvernement turc seront cruciales. Les prochains développements, notamment la mise en service d’Akkuyu prévue pour fin 2025, et les avancées des négociations avec de nouveaux partenaires, détermineront l’ampleur réelle de l’influence étrangère sur le secteur nucléaire turc.

Publicite

Récemment publiés dans

Poutine propose un rôle de médiateur entre Washington et Téhéran sur le nucléaire iranien

Le Kremlin a confirmé que Vladimir Poutine souhaite s’impliquer dans le règlement du conflit nucléaire entre les États-Unis et l’Iran, en s’appuyant sur ses liens stratégiques renforcés avec Téhéran.
Le président Lee Jae-myung adopte une diplomatie énergétique fondée sur l'intérêt national, confrontée à un contexte délicat de rivalités internationales qui pourraient créer des situations complexes pour le pays et ses entreprises énergétiques.
Le président Lee Jae-myung adopte une diplomatie énergétique fondée sur l'intérêt national, confrontée à un contexte délicat de rivalités internationales qui pourraient créer des situations complexes pour le pays et ses entreprises énergétiques.
Paris et Varsovie ont tenu un atelier bilatéral à Varsovie pour renforcer leur coordination sur les investissements dans les infrastructures électriques et la sécurité d’approvisionnement dans le cadre du Traité de Nancy.
Paris et Varsovie ont tenu un atelier bilatéral à Varsovie pour renforcer leur coordination sur les investissements dans les infrastructures électriques et la sécurité d’approvisionnement dans le cadre du Traité de Nancy.
Donald Trump rejette fermement tout enrichissement d'uranium par l'Iran, tandis que la Russie affirme le droit de Téhéran au nucléaire civil, intensifiant les tensions dans les négociations autour du programme nucléaire iranien.
Donald Trump rejette fermement tout enrichissement d'uranium par l'Iran, tandis que la Russie affirme le droit de Téhéran au nucléaire civil, intensifiant les tensions dans les négociations autour du programme nucléaire iranien.

La Syrie conclut un accord énergétique de $7bn avec des partenaires étrangers

La Syrie a signé un accord de $7bn avec un consortium composé d’entreprises du Qatar, de Turquie et des États-Unis pour reconstruire son secteur électrique national.
Friedrich Merz a confirmé que l’Allemagne bloquerait toute tentative de relancer le gazoduc Nord Stream 2, malgré des appels internes évoquant une possible réouverture du dialogue avec Moscou.
Friedrich Merz a confirmé que l’Allemagne bloquerait toute tentative de relancer le gazoduc Nord Stream 2, malgré des appels internes évoquant une possible réouverture du dialogue avec Moscou.
Un mémorandum d’accord officialise la coopération énergétique entre l’Union européenne et l’Organisation latino-américaine de l’énergie, incluant une participation permanente de l’UE aux organes de gouvernance de l’organisation régionale.
Un mémorandum d’accord officialise la coopération énergétique entre l’Union européenne et l’Organisation latino-américaine de l’énergie, incluant une participation permanente de l’UE aux organes de gouvernance de l’organisation régionale.
Le Premier ministre Viktor Orban a annoncé que la Hongrie s’opposerait juridiquement et politiquement au projet européen de bannir les livraisons d’énergie russe d’ici 2027.
Le Premier ministre Viktor Orban a annoncé que la Hongrie s’opposerait juridiquement et politiquement au projet européen de bannir les livraisons d’énergie russe d’ici 2027.

Un dirigeant conservateur allemand appelle à rouvrir le dossier Nord Stream 2

Michael Kretschmer, ministre-président de Saxe, a proposé de reprendre le dialogue avec la Russie autour du gazoduc Nord Stream 2, malgré l’opposition affirmée du gouvernement allemand à tout redémarrage du projet.
Donald Trump appelle le Royaume-Uni à abandonner l'énergie éolienne au profit d'une relance du pétrole offshore, provoquant un débat sur les implications économiques et politiques d'une telle stratégie énergétique après leur récent accord commercial.
Donald Trump appelle le Royaume-Uni à abandonner l'énergie éolienne au profit d'une relance du pétrole offshore, provoquant un débat sur les implications économiques et politiques d'une telle stratégie énergétique après leur récent accord commercial.
La Chine et l’Égypte ont conclu plus de 30 accords à portée énergétique, incluant véhicules électriques, réseaux intelligents et technologies de stockage.
La Chine et l’Égypte ont conclu plus de 30 accords à portée énergétique, incluant véhicules électriques, réseaux intelligents et technologies de stockage.
L’Union européenne a élargi ses mesures contre la Russie en visant près de 200 nouveaux navires transportant illégalement du pétrole, dans le cadre de son 17e paquet de sanctions.
L’Union européenne a élargi ses mesures contre la Russie en visant près de 200 nouveaux navires transportant illégalement du pétrole, dans le cadre de son 17e paquet de sanctions.

Pourquoi la Chine accélère ses investissements dans les énergies renouvelables à l’étranger

Face à la surcapacité industrielle nationale, la Chine intensifie ses investissements internationaux dans les énergies renouvelables, cherchant à dominer les chaînes de valeur mondiales tout en ouvrant de nouveaux marchés pour ses entreprises.
Bruxelles souhaite convaincre le G7 de réduire le prix plafond du pétrole russe à 50 $ le baril, dans le cadre de négociations sur le prochain paquet de sanctions visant les revenus énergétiques de Moscou.
Bruxelles souhaite convaincre le G7 de réduire le prix plafond du pétrole russe à 50 $ le baril, dans le cadre de négociations sur le prochain paquet de sanctions visant les revenus énergétiques de Moscou.
Après trois ans de séparation post-Brexit, le Royaume-Uni et l'Union Européenne annoncent leur intention d'étudier les conditions d'une réintégration du Royaume-Uni dans le marché européen de l’électricité, visant à optimiser les échanges transfrontaliers.
Après trois ans de séparation post-Brexit, le Royaume-Uni et l'Union Européenne annoncent leur intention d'étudier les conditions d'une réintégration du Royaume-Uni dans le marché européen de l’électricité, visant à optimiser les échanges transfrontaliers.
Un partenariat structurant prévoit la construction de lignes HVDC, de centrales au gaz naturel et d’infrastructures de dessalement, avec un financement assuré par un consortium incluant TAQA et Nareva.
Un partenariat structurant prévoit la construction de lignes HVDC, de centrales au gaz naturel et d’infrastructures de dessalement, avec un financement assuré par un consortium incluant TAQA et Nareva.

Les BRICS Alertent sur les Risques Énergétiques liés aux Sanctions Économiques

Les BRICS dénoncent les sanctions économiques et les restrictions commerciales imposées par l’Occident, mettant en garde contre leurs conséquences sur les marchés énergétiques mondiaux, notamment en matière d'approvisionnement et de stabilité financière du secteur énergétique global.
Au Kenya, la Chine renforce sa position dominante dans le secteur énergétique via des exportations massives de technologies propres et d’importants contrats d’infrastructures, alors que Nairobi accélère ses objectifs énergétiques et industriels à l’horizon 2030.
Au Kenya, la Chine renforce sa position dominante dans le secteur énergétique via des exportations massives de technologies propres et d’importants contrats d’infrastructures, alors que Nairobi accélère ses objectifs énergétiques et industriels à l’horizon 2030.
Des responsables iraniens ont rencontré à Istanbul les membres du trio européen pour discuter du programme nucléaire, alors que Washington menace de nouvelles sanctions en cas de blocage.
Des responsables iraniens ont rencontré à Istanbul les membres du trio européen pour discuter du programme nucléaire, alors que Washington menace de nouvelles sanctions en cas de blocage.
L’Union européenne a validé un nouveau train de sanctions visant 345 navires soupçonnés d’aider la Russie à contourner les restrictions sur ses exportations de pétrole brut et produits raffinés.
L’Union européenne a validé un nouveau train de sanctions visant 345 navires soupçonnés d’aider la Russie à contourner les restrictions sur ses exportations de pétrole brut et produits raffinés.

L’UE maintient son objectif d’interdire les importations de gaz russe, même après un potentiel accord de paix

Dan Jørgensen, commissaire européen à l'Énergie, confirme que l'UE poursuivra l'interdiction des importations de gaz russe, indépendamment de l'issue des négociations de paix en Ukraine, avec des propositions législatives prévues pour juin.
Le 13 mai, les ministres de l'Énergie des pays de la région de la mer Baltique ont signé un nouveau protocole d'accord pour renforcer les interconnexions et la sécurité énergétique, dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes.
Le 13 mai, les ministres de l'Énergie des pays de la région de la mer Baltique ont signé un nouveau protocole d'accord pour renforcer les interconnexions et la sécurité énergétique, dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes.
Belgrade souhaite préserver des conditions tarifaires favorables pour ses importations de gaz russe, alors que le contrat actuel arrive à échéance le 31 mai.
Belgrade souhaite préserver des conditions tarifaires favorables pour ses importations de gaz russe, alors que le contrat actuel arrive à échéance le 31 mai.
Le président américain entame une visite d’État en Arabie saoudite axée sur un partenariat économique ambitieux, reléguant la normalisation israélo-saoudienne au second plan en raison de la guerre à Gaza.
Le président américain entame une visite d’État en Arabie saoudite axée sur un partenariat économique ambitieux, reléguant la normalisation israélo-saoudienne au second plan en raison de la guerre à Gaza.

Publicite