Ebba Busch, ministre de l’Énergie et vice-première ministre suédoise, exhorte les institutions européennes à ne plus entraver le développement du nucléaire. Elle rappelle que chaque État membre de l’Union Européenne (UE) conserve le droit de choisir ses propres solutions énergétiques, et que la majorité des pays de l’UE, ainsi que le Conseil européen, soutiennent l’énergie nucléaire. Lors de la conférence « Roadmaps to New Nuclear » à Paris, organisée par l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OECD), Busch insiste sur l’importance pour l’UE de ne pas imposer de blocages, notamment à travers des réglementations contraignantes.
Le secteur nucléaire est perçu comme essentiel pour répondre aux défis énergétiques et de décarbonation, notamment dans un contexte où plusieurs pays, dont la Suède, visent à réduire leur dépendance aux énergies fossiles. En 2023, sous la présidence suédoise de l’UE, l’Alliance Nucléaire Européenne a été créée, regroupant 12 pays favorables à l’énergie nucléaire. Cette initiative vise à renforcer la coopération entre ces nations pour soutenir le développement et l’innovation dans ce secteur.
Un soutien financier nécessaire pour la compétitivité nucléaire européenne
Busch insiste sur la nécessité d’un soutien étatique plus fort pour l’industrie nucléaire européenne, soulignant que des puissances comme les États-Unis et la Chine ont déjà largement investi dans ce domaine. Sans une aide publique accrue, l’Europe risque de perdre sa compétitivité face à ces pays qui soutiennent massivement leur secteur énergétique, en particulier le nucléaire. La ministre pointe également que l’industrie nucléaire joue un rôle clé dans la décarbonation des économies et l’indépendance énergétique. Elle appelle donc les États membres à se mobiliser pour accompagner les investissements dans les nouvelles capacités de production.
Le soutien financier pour l’industrie nucléaire en Europe est aujourd’hui un enjeu crucial, non seulement pour rester compétitif à l’échelle mondiale, mais aussi pour respecter les objectifs énergétiques et climatiques fixés par l’UE. La Commission européenne, bien que divisée sur la question, est de plus en plus sollicitée pour apporter un cadre réglementaire facilitant ces financements.
Les projets nucléaires ambitieux de la Suède
La Suède, elle-même, a des projets clairs. Le pays prévoit d’ajouter 2,5 GW de nouvelles capacités nucléaires d’ici 2035, dans le cadre d’un objectif plus large de doubler sa production électrique d’ici 2045. Ces nouvelles capacités pourraient se concrétiser à travers de grandes unités ou des Small Modular Reactors (SMR), une technologie de réacteurs modulaires prometteuse qui permet de construire des centrales de plus petite taille avec des coûts réduits et une flexibilité accrue.
Busch précise également que la Suède cible plusieurs aspects cruciaux pour débloquer l’expansion de l’énergie nucléaire, y compris la simplification des réglementations qui freinent actuellement de nombreux projets. Un autre enjeu majeur est la gestion des déchets nucléaires, en particulier des déchets hautement radioactifs, pour lesquels des solutions de stockage sûres sont indispensables. Ces défis techniques et logistiques sont un frein à la réalisation des objectifs nucléaires, mais des efforts sont entrepris pour y remédier.
Défis et opportunités pour l’industrie nucléaire européenne
Le développement du nucléaire en Europe reste cependant divisé. Des pays comme l’Autriche, l’Allemagne, l’Irlande et le Luxembourg continuent de s’opposer à cette source d’énergie, s’appuyant sur des craintes liées à la sécurité et à l’impact environnemental du traitement des déchets radioactifs. Ce clivage entre les États membres complique la mise en place d’une stratégie européenne cohérente pour le nucléaire. Cependant, l’Alliance Nucléaire Européenne représente un effort significatif pour uniformiser les approches et encourager les échanges d’expertise et de technologies entre les pays favorables à l’énergie atomique.
Par ailleurs, l’industrie nucléaire européenne voit dans les SMR une opportunité de revitaliser le secteur. Ces réacteurs de petite taille offrent des avantages en termes de coûts, de sécurité et de modularité, permettant une intégration plus rapide dans les mix énergétiques nationaux. Leur développement est particulièrement suivi en Suède, où les projets en cours s’inscrivent dans une stratégie à long terme pour maintenir une indépendance énergétique tout en respectant les objectifs de décarbonation.
Perspectives pour le nucléaire en Europe
Le soutien étatique au nucléaire, que ce soit à travers des subventions directes, des partenariats publics-privés ou des incitations fiscales, est désormais vu comme une condition sine qua non pour garantir la compétitivité de l’Europe dans ce domaine. La Suède, par son plaidoyer actif en faveur du nucléaire, tente d’influencer les décisions de la Commission européenne et des autres États membres pour favoriser un environnement réglementaire et financier propice à l’expansion du secteur.
L’Europe doit également accélérer la recherche et le développement, notamment autour des technologies de nouvelle génération comme les SMR et les réacteurs de quatrième génération. Cela inclut des efforts pour améliorer la gestion des déchets et garantir la sécurité des installations, points souvent critiqués par les opposants au nucléaire.
L’avenir du nucléaire en Europe se jouera donc autant sur le terrain politique que sur le terrain économique, avec des enjeux qui dépassent largement les frontières des États membres et qui affecteront la place de l’Europe dans la transition énergétique mondiale.