La centrale nucléaire de Zaporizhzhya, la plus grande d’Europe, demeure dans un état précaire en raison du conflit militaire en Ukraine, a déclaré Rafael Mariano Grossi, Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Les six réacteurs du site restent à l’arrêt complet, leur redémarrage étant jugé impossible tant que la situation sécuritaire sur place reste incertaine.
Approvisionnement électrique vulnérable
Lors de sa récente visite en Ukraine, le Directeur général Grossi a souligné la dépendance actuelle de la centrale à une seule ligne électrique externe de 330 kilovolts (kV), contre dix lignes opérationnelles avant le conflit. Ce manque de ressources électriques menace directement la capacité de refroidissement indispensable des réacteurs nucléaires et du combustible usagé entreposé sur place. Une ligne de secours existante a été déconnectée le 7 mai dernier en raison des affrontements militaires proches de la centrale, et l’état exact des cinq autres lignes reste incertain après des dommages subis en début de conflit.
Le site a indiqué que des travaux d’entretien avaient été entrepris sur l’une des quatre lignes de 750 kV initialement reliées à la centrale mais endommagées en 2022. Depuis cette date, trois autres lignes de cette même puissance sont restées inutilisables. L’AIEA a également précisé qu’un projet de station de pompage visant à rétablir l’alimentation en eau depuis le fleuve Dnipro vers le bassin de refroidissement était en préparation, bien que sa réalisation dépende de l’arrêt des combats.
Inspections et mesures de sécurité
Par ailleurs, l’autorité russe de régulation nucléaire Rostekhnadzor a prévu des activités d’inspection préalables à l’obtention des licences pour les unités 1 et 2 de la centrale, dont les licences ukrainiennes actuelles expireront respectivement en décembre 2025 et février 2026. L’AIEA a demandé à observer ces inspections et souhaite obtenir des précisions sur les critères d’évaluation appliqués à la sécurité nucléaire lors de ces contrôles.
Sur place, les équipes de l’AIEA continuent de surveiller étroitement la situation sécuritaire. Elles ont notamment signalé une fuite dans le système de refroidissement essentiel d’un des réacteurs, due à de la corrosion, récemment réparée sans conséquences significatives pour la sécurité générale. Cependant, des bruits d’activités militaires à proximité immédiate de la centrale ont été rapportés régulièrement, y compris un incident impliquant une attaque présumée de drone sur un centre de formation du site.
Autres centrales ukrainiennes sous pression
Les centrales ukrainiennes de Khmelnytskyy, Rivne et Sud Ukraine continuent à fonctionner malgré le conflit, bien que trois de leurs neuf réacteurs opérationnels soient actuellement arrêtés pour des raisons planifiées de maintenance et de recharge de combustible. Les équipes de l’AIEA présentes sur ces sites, ainsi qu’à Tchernobyl, doivent régulièrement composer avec les contraintes sécuritaires imposées par le conflit, notamment des survols réguliers de drones à proximité.
Parallèlement, l’AIEA a intensifié son programme d’assistance à l’Ukraine en livrant du matériel essentiel financé par l’Autriche, la Belgique, la France et la Norvège, visant à améliorer les conditions de travail et la sécurité radiologique des sites nucléaires ukrainiens. Depuis le début du conflit, 140 livraisons coordonnées par l’AIEA ont été effectuées en soutien à la sécurité nucléaire du pays.