Les autorités russes ont évalué à 84,9 milliards de roubles (environ 903 millions d’euros) les dommages causés par une marée noire survenue à la mi-décembre dans le détroit de Kertch, entre le sud-ouest de la Russie et la péninsule de Crimée. D’après Svetlana Radionova, directrice de l’Agence fédérale de supervision écologique, technologique et nucléaire (Rosprirodnadzor), les sociétés propriétaires des deux pétroliers disposent d’un mois pour verser cette somme à l’État. En cas de non-paiement, des actions judiciaires seront engagées.
Les deux navires transportaient plus de 9 000 tonnes de fioul lorsqu’ils se sont échoués lors d’une tempête hivernale. L’accident a entraîné un déversement massif de pétrole, affectant durablement les plages du kraï de Krasnodar et celles de la Crimée, territoire annexé par la Russie en 2014. L’opération de nettoyage a mobilisé des équipes locales et des volontaires afin de collecter des tonnes de sable souillé, et pomper les hydrocarbures restants à bord du pétrolier Volgoneft-239.
Navigation non autorisée et gestion contestée
Le Service fédéral de supervision des transports (Rostransnadzor) a confirmé que les deux bâtiments n’étaient pas autorisés à circuler dans cette zone maritime à cette période de l’année. Malgré des conditions météorologiques défavorables annoncées, les pétroliers ont poursuivi leur route, violant les normes de sécurité imposées pour la navigation hivernale. La faille dans la chaîne de commandement a relancé les critiques sur les pratiques de régulation maritime en mer Noire.
Le président Vladimir Poutine a qualifié l’accident de « désastre écologique », tout en reprochant aux autorités locales un manque de réactivité. Plusieurs cétacés, dont des marsouins, ont été retrouvés morts sur les côtes touchées, selon des observations rapportées par des associations russes spécialisées. Les répercussions environnementales immédiates n’ont toutefois pas été abordées par les instances judiciaires en charge du litige.
Pressions sur les responsabilités industrielles
Le montant réclamé par Rosprirodnadzor représente l’une des plus lourdes sanctions financières imposées à des opérateurs maritimes dans la région. Toutefois, le nom des sociétés concernées n’a pas été rendu public par les autorités. Cette décision soulève des interrogations quant à la transparence du processus réglementaire, notamment dans un contexte où les relations entre les autorités de contrôle et les exploitants maritimes sont étroitement imbriquées.
La gestion du sinistre met en lumière les enjeux de gouvernance environnementale dans une zone géopolitique sensible. Alors que les procédures judiciaires sont annoncées comme inévitables en cas de non-versement, les critiques sur l’absence de sanctions administratives préventives pointent un possible conflit d’intérêts entre régulateurs et opérateurs du secteur pétrolier maritime.