La République démocratique du Congo (RDC) a annoncé la mise en place d’un système de quotas limitant les exportations annuelles de cobalt à 96 600 tonnes métriques pour les années 2026 et 2027. Cette mesure représente 52 % de la production nationale estimée pour 2024. Elle fait suite à l’interdiction d’exporter du cobalt hydroxydé, en vigueur depuis février, et marque un changement stratégique dans la gestion des ressources minières du pays.
Une décision aux effets immédiats sur le marché
Premier producteur mondial de cobalt, la RDC a extrait 185 739 tonnes du métal en 2024, selon les données de Commodity Insights. Utilisé dans les batteries des véhicules électriques et certaines applications industrielles de haute performance, le cobalt est un composant clé de plusieurs chaînes d’approvisionnement stratégiques. La réduction drastique des volumes exportables a surpris le marché, générant une hausse rapide des prix et des prévisions de déséquilibre durable entre l’offre et la demande.
Entre le 19 et le 26 septembre, les prix du cobalt hydroxydé livrés en Chine ont progressé de 6.8 %, atteignant $15.6/lb. Depuis janvier, les prix ont grimpé de 170 %, accentuant les tensions sur les marges des raffineurs et fabricants de batteries. Commodity Insights anticipe un prix moyen de $15.96/lb en 2026 et $16.12/lb en 2027, à condition que les quotas soient strictement appliqués.
Pression sur les stocks et adaptation des industriels
Les limitations à l’exportation interviennent alors que les stocks des raffineries sont déjà au plus bas. Bien que les exportations reprennent en octobre, les premiers chargements ne devraient arriver en Chine qu’en janvier, maintenant une pression sur l’offre pendant plusieurs mois. Face à cette situation, les constructeurs de véhicules électriques envisagent déjà de modifier la composition chimique de leurs batteries pour réduire leur dépendance au cobalt.
La demande du secteur des batteries devrait atteindre 142 803 tonnes en 2025, puis 154 891 tonnes en 2026, selon Commodity Insights. Le quota de 96 600 tonnes pourrait ainsi créer un déficit important, forçant les industriels à ajuster leurs stratégies d’approvisionnement.
Sources alternatives et incertitudes réglementaires
Une hausse durable des prix pourrait favoriser l’investissement dans des sources alternatives, comme les gisements de cobalt-nickel en Indonésie, où la production est attendue à 38 324 tonnes en 2025. D’autres acteurs s’intéressent aux ressources sous-marines, notamment dans la zone Clarion-Clipperton dans le Pacifique, considérée comme un réservoir majeur de métaux critiques, selon le US Geological Survey.
Sur le plan réglementaire, l’Agence de régulation des marchés de cobalt (ARECOM) en RDC attribuera les quotas sur la base de volumes historiques, mais sans préciser les années de référence. Cette incertitude accroît les risques pour les producteurs, notamment ceux dont la production a fortement évolué ces dernières années.
Répartition inégale et ajustements potentiels
Les entreprises ayant augmenté leur production récemment, comme CMOC, pourraient bénéficier d’allocations plus importantes. La société a produit 85 975 tonnes en 2024, en hausse de 480 % par rapport à 2021. D’autres opérateurs, notamment en dehors de la RDC, pourraient profiter de la tension sur l’offre pour capter une part de marché accrue.
Des ajustements restent possibles. Le gouvernement congolais pourrait relever les quotas si les prix dépassent certains seuils ou si des engagements sont pris pour investir dans des unités de traitement locales. Le ministère des Mines a laissé entendre qu’une concertation avec les opérateurs et la société civile serait menée à l’avenir pour adapter le système à l’évolution du marché.