La Norvège, leader de la production pétrolière en Europe, se trouve dans un bras de fer juridique concernant le développement de trois champs pétroliers : Yggdrasil, Tyrving et Breidablikk. Ces projets, soutenus par le ministère de l’Énergie, ont été bloqués après une décision de justice en janvier qui a invalidé les permis d’exploitation pour insuffisance d’évaluation des impacts climatiques, en particulier les émissions de « scope 3 » qui incluent les émissions générées par l’utilisation du pétrole et du gaz extraits. Greenpeace et Nature and Youth, à l’origine du procès, estiment que ces évaluations sont cruciales pour respecter les engagements climatiques de la Norvège.
Le gouvernement norvégien a fait appel de cette décision et a demandé à la cour d’appel de lever les injonctions qui bloquent le développement des champs. Selon Goeran Oesterman Thengs, avocat représentant l’État, les conditions nécessaires pour une injonction ne sont pas réunies. Il soutient que les pertes économiques potentielles pour l’État et les opérateurs des champs, Aker BP et Equinor, l’emportent sur les avantages environnementaux avancés par les organisations environnementales.
Implications Économiques des Injonctions
Les opérateurs des champs, Aker BP et Equinor, ont déjà investi massivement dans ces projets. Les investissements actuels et prévus dans les trois champs sont estimés à environ 140 millions de couronnes norvégiennes (13 millions de dollars). Si les injonctions sont maintenues, les pertes financières directes pourraient être considérables pour les entreprises impliquées, impactant également les recettes de l’État norvégien provenant des hydrocarbures.
Les autorités soutiennent que la poursuite du développement des champs Yggdrasil, Tyrving et Breidablikk est essentielle non seulement pour l’économie nationale, mais aussi pour garantir la sécurité énergétique régionale dans un contexte de transition énergétique mondiale. Le champ Breidablikk a démarré sa production en octobre 2023, et Tyrving a suivi récemment, augmentant la pression pour une résolution rapide du litige.
Les Arguments des Organisations Environnementales
Les groupes environnementaux, menés par Greenpeace Norvège, insistent sur le fait que la poursuite de l’exploitation des nouveaux champs de pétrole compromet les efforts mondiaux de réduction des émissions de CO2 et va à l’encontre des objectifs climatiques de la Norvège. Ils affirment que chaque nouveau projet pétrolier augmente l’empreinte carbone et aggrave la crise climatique. « La production continue sur ces champs montre pourquoi des injonctions sont nécessaires pour prévenir des dommages irréparables, » déclare Frode Pleym, responsable de Greenpeace Norvège.
Pour les défenseurs de l’environnement, les décisions judiciaires doivent servir de contrepoids aux politiques énergétiques nationales qui, malgré les promesses de neutralité carbone d’ici 2050, continuent de s’appuyer fortement sur l’extraction des hydrocarbures. Yggdrasil, le troisième champ en litige, est prévu pour commencer la production en 2027, mais il reste soumis aux décisions de justice qui pourraient interdire son développement.
Vers un Équilibre entre Croissance Économique et Responsabilité Climatique
La situation met en lumière le dilemme auquel font face les pays exportateurs de pétrole comme la Norvège : trouver un équilibre entre le maintien de leur position économique et la responsabilité climatique mondiale. Le gouvernement soutient que ses actions sont conformes aux engagements de l’Accord de Paris et souligne que le pays s’efforce de réduire ses émissions nationales, tout en poursuivant l’exploitation de ses ressources pétrolières et gazières.
Les observateurs du secteur énergétique suivront de près les développements juridiques à venir, car ils pourraient non seulement influencer la politique énergétique de la Norvège, mais aussi envoyer un message clair aux autres nations productrices sur l’importance croissante des considérations climatiques dans le développement des ressources naturelles.