Les sourciers géobiologues, régulièrement appelés sur les chantiers d’éoliennes, se retrouvent au cœur d’une polémique grandissante. Leur mission consiste à détecter des « courants telluriques » censés perturber les animaux, notamment les bovins. Ce phénomène, bien que populaire dans certaines régions de France, n’a jamais été validé scientifiquement. Pourtant, ces pratiques continuent d’attirer l’attention, notamment sur les sites d’implantation d’éoliennes.
Un employé d’un développeur éolien, ayant requis l’anonymat, a rapporté à l’AFP qu’un géobiologue avait été invité sur un projet dans l’ouest de la France. Sa méthode consistait à secouer une tige de plastique et à observer ses mouvements pour détecter la présence d’un cours d’eau souterrain. L’idée étant que ces flux invisibles affecteraient les animaux à proximité des éoliennes.
En 2017, un projet d’éolienne avait également sollicité un géobiologue à la demande d’un éleveur préoccupé par les courants telluriques. L’expert en question avait préconisé une méthode consistant à « informer » la dalle de béton avant son coulage, une approche censée redonner une fonction vibratoire à la structure. Selon un rapport consulté par l’AFP, cela se ferait en ajoutant un produit homéopathique appelé Pneumatit, qui inclut des procédés aussi étonnants que des lectures bibliques ou l’écoute de musique classique lors de sa fabrication.
Les accusations de charlatanisme
La pratique des géobiologues est dénoncée par plusieurs experts, dont Sébastien Point, physicien au CNRS. Selon lui, la géobiologie se présente comme une discipline scientifique en empruntant des termes tels que « cheminées cosmo-telluriques » ou « champs de torsion », mais qui n’ont aucune base scientifique. « Cela fait deux siècles qu’on sait que c’est une arnaque », affirme-t-il.
Cependant, ces critiques sont rejetées par les géobiologues eux-mêmes, qui défendent la légitimité de leur métier. Bernard Olifirenko, président de la Confédération nationale de géobiologie, estime que la profession ne devrait pas être jugée par les actes isolés de quelques praticiens peu scrupuleux.
Un protocole controversé
La pratique de la géobiologie a pris une ampleur particulière dans les régions comme la Loire-Atlantique, où elle est parfois incluse dans les démarches préliminaires avant l’installation d’éoliennes. La chambre d’agriculture du Pays de la Loire a même mis en place un protocole demandant aux entreprises d’éoliennes de financer ces études géobiologiques avant toute implantation. Si la préfecture de Loire-Atlantique confirme l’existence de ce protocole, elle précise que ce diagnostic n’est en aucun cas imposé par arrêté préfectoral.
Robin Dixon, représentant de France Renouvelables, dénonce cette pratique comme un exemple de « droit mou ». Selon lui, l’absence de ce type d’étude géobiologique pourrait pénaliser les porteurs de projet dans l’obtention des autorisations administratives, même si toutes les autres études environnementales sont réalisées.
Le manque d’études scientifiques
Bien que la géobiologie soit populaire dans certaines régions, notamment en Loire-Atlantique, aucun lien de causalité n’a été prouvé entre les courants telluriques et les perturbations ressenties par les éleveurs. L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) souligne qu’il n’existe à ce jour que très peu d’études scientifiques rigoureuses sur ce sujet.
Dans ce contexte, les experts du secteur des énergies renouvelables craignent que la géobiologie devienne un filon lucratif pour certains praticiens, exploitant la détresse des agriculteurs face à des phénomènes mal expliqués.